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lundi 5 avril 2021

Dans l’œil de : Wolvennest – 10 œuvres intemporelles

Corvus & Leslie

Dolorès

Non.

Le 5 mars, Van Records nous a fait le plaisir de sortir le deuxième album des Belges de Wolvennest. Après des collaborations avec Der Blutharsch, un premier album VOID largement bien reçu dans le monde de la musique extrême et un petit EP intitulé Vortex il y a déjà deux ans, nous découvrons une nouvelle facette du projet avec Temple. Au programme, toujours une ambiance lourde entre Doom et Black, teintée de nombreuses autres influences sombres et hypnotiques et marquée de quelques clins-d'oeil.

Aujourd'hui, ce sont Corvus (guitare) et Leslie (vidéo) qui participent à cette série spéciale d'interviews. « Dans l'oeil de... » permet de donner la parole aux artistes sur leurs inspirations et les œuvres qui les ont marqués, qu'il s'agisse de littérature, de cinéma, d'art ou de musique (hors-metal, histoire de découvrir d'autres horizons) sur une thématique, ici les oeuvres qu'ils jugent intemporelles et qui les influencent dans leur créativité.
 

Corvus (Guitare)

Malpertuis
Film de Harry Kummel - 1971

J’ai découvert ce film il y a 2 ans, un peu par hasard, à un festival du film à Rotterdam. La salle était petite, la sono crachait beaucoup trop de fréquences medium, j’en suis sorti les oreilles en sang. Mais les yeux plein d’émerveillement (le regard qu’on perd en quittant l’enfance). Ce film est un ovni (on y voit notamment Orson Welles, Sylvie Vartan et son compagnon de l’époque), où se mélangent la beauté absolue et le grivois. L’ambiance qui s’en dégage est forte, on se sent confiné avec ces Dieux oubliés et déchus. Alecto, avec son regard hanté par la tristesse et l’ennui envoûte quiconque le croise. La vision de ce film a littéralement débouché sur une chanson (Alecto) qui apparaît sur le nouveau Wolvennest.


Adam's Apples
Film de Anders Thomas Jensen - 2005

Réaliser un film autour du concept du Bien et du Mal, c’est a priori classique. Mais le développement de l’influence de l’un (le pasteur, Mads Mikkelsen) et un néo-nazi en réinsertion (Adam joué par Ulrich Thomsen), voilà qui est plus intéressant. Les pistes se brouillent, les certitudes s’effritent autour d’une tarte aux pommes dont la réalisation devient une obsession. Bande-son sobre, qui prouve qu’il faut finalement peu pour installer une ambiance, qui passe du léger au dérangeant en permanence. L’ironie de la « chute » nous fait dire que la vérité se situe souvent plus loin que celle qu’on base sur nos certitudes, celle qui nous fait voir le monde de façon bien binaire. Ce qui définit, finalement, assez bien notre époque.
 

Twin Peaks
Saison 3 de la série de David Lynch - 2017

Cette troisième saison a irrité et testé la patience de ceux qui auront eu le courage d’aller jusqu’au bout. Des longueurs abominables, des intervenants musicaux cheesy à en vomir (à part Nine Inch Nails), des pistes plus que des réponses. Se farcir toute la 3e saison, c’est se retrouver dans un mauvais rêve interminable (Audrey Horne en est sans doute la métaphore). Pourtant, 3 ans après, les images fortes sont toujours dans un coin de la tête, la bande-son aussi, les longueurs prennent sens, et l’absence de réponses offre le sens principal à la vie : tout ne doit pas faire sens. Vivre, c’est ressentir, se laisser porter, parfois se perdre dans les méandres de l’infini jusqu’à ce qu’on tombe sur ce qui est censé nous relier : l’empathie.


Live at Fillmore East
Album live de The Allman Brothers Band - 1971

Mon frère, de 5 ans mon aîné, a longtemps été mon guide musical. Son mur de mille CDs était une vraie médiathèque et cet album en particulier a vraiment changé ma vie. Les tragédies ayant touché ce line up ont ajouté la dose mystique suffisante pour me fasciner (le Black Metal a causé ses tragédies, les Allman Brothers les ont, eux, subies). C’est à peine si j’osais sortir le livret du double CD, de peur de l’abîmer. Cette pochette suinte la joie et la complicité, qu’on retrouve dans l’interprétation des titres joués. Elle est « forte » mais sobre, et s’inscrit avec force dans la ligne du temps, comme un point toujours vivant 50 ans après. Possiblement le meilleur live de tous les temps.
 

Lucifer Rising
Court-métrage de Kenneth Anger  - 1966/1980

Impossible de ne pas évoquer la collaboration entre Kenneth Anger et Bobby Beausoleil dans le cadre de cette chronique. On contemple et ressent, on écoute et on apprend. Lorsqu’il ne restera que la poussière, on retiendra de Bobby Beausoleil qu’il a été l’auteur de la B.O. la plus significative de son époque. Quand la Volonté règne, il n’y a pas de barrière assez forte pour empêcher la créativité de s’exprimer.
 

Leslie (Vidéo)

L'œuvre de Gaspar Noé

Réalisateur générationnel, il incarne à mes yeux assez parfaitement une certaine violence de notre époque. Propos et (géniale) façon de filmer à l’appui, il vous envoie joyeusement dans vos zones d’inconfort et ne peut que provoquer une réaction forte tellement chaque film est radical dans son approche, ce qui selon moi devrait être une norme.


L'œuvre de Stanley Kubrick

De Noé à Kubrick, de l’élève au maître, tout a déjà été dit, mais les paroles s’envolent et les images restent. Gravées à jamais.
 

Les Dents de la Mer
Film de Steven Spielberg - 1975

La première coulée de sang, la première blessure cinématographique dans laquelle je me suis jeté corps et âme à l’âge de 6 ans pour ne jamais en ressortir, et à l’heure qu’il est toujours en train de découvrir ses recoins les plus sombres. Spielberg et son message généralement bien pensant m’a juste donné une soif de sang inextinguible haha !
 

La trilogie des morts vivants de George A. Romero
Night of the Living Dead (1968), Dawn of the Dead (1978), Day of the Dead (1985)

Avant le retour en force du Zombie sur les écrans ces dernières années, ces trois films réunissaient tout ce qu’il y a réellement à savoir sur ce type d’apocalypse : expansion rapide, les quelques survivants finissent leurs jours terrés dans des abris souterrains ou, au mieux, sur une île déserte. Et entre autres, le 2ème volet de la trilogie pointe clairement le fait que la société a détourné des instincts basiques de l’être humain vers celui du consumérisme aveugle. Visuellement, Savini aux manettes pour les effets spéciaux et on tient tout simplement des classiques du genre.
 

The Mothership Connection - Live From Houston
Album live de Funkadelic - 1976/1986

Musicalement, ils ont tout mélangé avant pas mal de monde et, en concert, ils ont mis le niveau de la mise en scène très haut. Ce live est un monstre d’imagination aux relents lysergiques.

N’importe quel amateur de guitare électrique reçoit une grosse droite lors du morceau d’ouverture et de son enchaînement de solos complètement fous. N’importe quel amateur de basse est irréversiblement entraîné dans le tourbillon de notes de Bootsy, et durant la traversée de ces 82 minutes de folie musicale et visuelle, on entend ici et là les bases de ce que sont devenus des tubes monstres de la musique comtemporaine. Intemporel.

En vrac, plein d’autres protagonistes de l’image que je me dois de mentionner :
Pier Paolo Pasolini, Jean Rouch, Werner Herzog, Phantom of the Paradise, The Rocky Horror Picture Show, Begotten, Kedi, Ingmar Bergman, Jan Svankmajer, Eraserhead, Takashi Miike, Lloyd Kaufman, Buffet Froid, Patrick Dewaere, Ken Le Survivant, Le Septième Continent, les clips de MGMT, Bruce Lee, Rocky Balboa, John Rambo, Apollo Creed, Ivan Drago, Interstellar, Diego, C'est arrivé près de chez vous, Holy Mountain, Jean Gabin, Stalker, les clips de Mylène Farmer, The Sopranos, Massive Attack Live, Peter Watkins, Pink Floyd Live in Pompei, Lino Ventura, Twin Peaks, Caligula, Clint Eastwood, The Wire, un nombre incalculable de films de série Z les plus violents et sanguinolents possibles, Le Sexe qui parle, Nabil Ayouch, David Cronenberg, Lars von Trier, Double Plus Ungood, Evil Dead, Michael Haneke, The Wicker Man, Midsommar, Pusher, Re-Animator, Predator, Death Wish, Ex Drummer, Andreï Tarkovsky, Ken Russel, John Carpenter, Deer Hunter, Mad Max, Klaus Kinski, Michel Audiard...

 

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Un grand merci aux membres de Wolvennest
d'avoir accepté de jouer le jeu !