"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Si nous avions du vous parler de DunkelNacht à ses débuts, l’entité n’aurait peut-être pas totalement eu sa place sur Horns Up, à moins d’une news Dungeon/Medieval Synth de Traleuh… car le groupe, qui à l’époque était un projet solo de Heimdall, évoluait dans un genre Dark Ambiant orchestral. Ce n’est qu’à partir du split avec Mass Grave en 2007 que DunkelNacht s’est présenté comme un vrai groupe de Metal. Atheist Dezekration (2010) lui a ensuite permis de définitivement affirmer sa nouvelle identité, à savoir un Black-Metal assez froid et mécanique, aux confins du Black-Indus même si le groupe n’a jamais aimé cette étiquette. Et de toute manière, son évolution musicale lui a ensuite permis d’affiner son style. Autour de Heimdall, du bassiste Alkhemohr et du reste du line-up assez variable (4 chanteurs se sont succédés depuis 2009), DunkelNacht poursuit son chemin dans un Black/Death plutôt offensif et toujours assez mécanique, notamment marqué par le sympathique Revelatio (2014). Depuis, les choses continuent à évoluer, le néerlandais M.C. Abagor s’est installé au micro, avec sa voix plus rauque que celles de Exp:/13 et Frost, plus criardes en leurs temps ; et DunkelNacht s’est montré très actif, sur scène mais aussi en studio avec la sortie des EPs Ritualz Of The Occult (2016) et Anthropocenia (2017). DunkelNacht, accompagné du batteur Tegaarst (Dust In Mind), continue à tracer sa route et à progresser à sa manière, avec désormais un troisième full-length à son actif, Empires Of Mediocracy. Repéré par Non Serviam Records qui a souvent le nez fin sur le Black/Death européen, DunkelNacht a l’occasion de montrer sa valeur et de propulser son Metal extrême plutôt bien fignolé.
Avec Revelatio, DunkelNacht était parvenu à poser sa personnalité et à faire dresser un constat qui est plutôt encourageant : sa musique n’évoque aucun nom en particulier et il est bien peu aisé de dire « ah ouais, ça sonne un peu comme… ». Bien sûr, des influences Black et Death-Metal, on pourra en trouver beaucoup, mais la mixture finale ne nous rapproche de rien de précis quand il s’agit de jouer au jeu des comparaisons. Ce qui fait que DunkelNacht est recommandable à tout amateur de Metal extrême et que chacun peut y trouver son compte. Rebelote pour Empires Of Mediocracy où l’ensemble ne ressemble à rien d’autre qu’à… du DunkelNacht. On retrouve globalement ce style assez incisif et massif, fait de riffs agressifs et percutants et de blasts presque inhumains. Toutefois, l’art de DunkelNacht évolue un tantinet. L’ensemble devient malgré tout moins mécanique, moins froid qu’à l’accoutumée, prenant un tournant un peu plus organique (notamment pour le son de batterie) mais surtout plus mélodique dans l’ensemble. Ce qui n’est pas forcément une surprise quand on se remémore des morceaux plus enlevés comme "Where Livid Lights Emblaze". DunkelNacht diversifie ainsi son jeu, au sein d’un troisième album malgré tout très cohérent et même plutôt passionnant. On retrouve d’emblée, dès le départ canon de "Relentless Compendium", ces riffs rangés assez puissants, mais très vite le Metal de DunkelNacht parvient à dégager à la fois un peu de lourdeur et d’ambiance, grâce d’une part aux patterns de Tegaarst et aux vocaux plus gras de M.C. Abagor, et d’autre part aux nombreuses incursions mélodiques allant jusqu’à des leads gracieux. La production moderne apporte du peps à l’ensemble, et sans prétention, DunkelNacht est donc encore en mesure de livrer du bon Black/Death, ni trop simpliste ni trop complexe, et plutôt léché. De quoi faire enfin franchir un palier au groupe ?
Et il y a de quoi avec les pépites ornant la première partie de cet album. A commencer par "Servants", un véritable tube au refrain imparable, aux trémolos entraînants et aux leads splendides. L’excellent "Eerie Horrendous Obsession" lui emboîte le pas avec une collection assez passionnante de mélodies (un peu à la Necrophobic par moments), pour ce qui est le morceau le plus marquant de cet Empires Of Mediocracy, on en redemanderait presque malgré ses 7 minutes. "Amongst the Remnants of Liberty" continue ce travail subtil autour des mélodies avec quelques claviers également, tout en proposant pas mal d’intensité grâce aux blasts ou aux super compos rythmiques. Des compos cossues que l’on retrouvera encore pour l’incisif "Verses and Allegations" ou le départ bien massif du morceau-titre, ou encore le final bien mordant qu’est "Non Canimus Surdis". Mais les mélodies sont encore très présentes, se distinguant encore de manière plus originale sur le morceau-titre ainsi que sur le final très épique de "The Necessary Evil", ou encore tout au long de "Non Canimus Surdis" (avec à la clé un solo endiablé). Après une première partie en fanfare, Empires Of Mediocracy se tasse un peu, laissant apparaître des longueurs au sein des morceaux qui s’allongent ("Amongst the Remnants of Liberty", "Empires of Mediocracy") ou un trop-plein de trémolos par moments ("Verses and Allegations" notamment). Un morceau comme "The Necessary Evil" se révèle d’ailleurs un peu anecdotique. Mais dans l’ensemble, DunkelNacht est inspiré et en réussite, étant parvenu à bien poser sa mixture plus mélodique, même si le dosage n’est pas encore parfait. DunkelNacht continue donc à évoluer, s’éloignant d’un Atheist Dezekration et proposant un Black/Death efficace injecté d’un travail mélodique qui fait mouche. Il faudra que le groupe confirme ces dispositions pour vraiment franchir un palier, mais il semble avoir trouvé sa voie et en profite pour se montrer actif. A nouveau, nous avons donc affaire à un bon petit album de Metal extrême très personnel, et tout amateur de musique amplifiée qui met à l’honneur guitares massives, grosses voix et leads endiablés devrait donner sa chance à DunkelNacht, si ce n’est déjà fait.
Tracklist de Empires Of Mediocracy :
1. Relentless Compendium (4:29)
2. Servants (4:56)
3. Eerie Horrendous Obsession (6:52)
4. Amongst the Remnants of Liberty (7:44)
5. Verses and Allegations (4:51)
6. Empires of Mediocracy (8:10)
7. The Necessary Evil (4:17)
8. Non Canimus Surdis (6:20)