Avocat le jour, rédacteur sur Horns Up la nuit et photographe à mes heures perdues.
L’annonce de la reformation d’As I Lay Dying nous a tous laissés un peu pantois. Difficile en effet d'imaginer le groupe reprendre son chemin après la condamnation de Tim Lambesis, une telle épreuve n'étant pas anodine. Le contexte de cette affaire laissait naturellement présager la mort pure et simple de ce qui a été, au milieu des années 2000, l’un des fers de lance du metalcore mondial. Et ce d'autant plus que l'on se rappelle des déclarations assassines de Nick Hipa à son encontre, fermant toutes les portes à une éventuelle réunion du groupe. Mais de l'eau a apparemment coulé sous les ponts, et tout ce beau monde se retrouve aujourd'hui à nouveau réuni, sans que la vidéo publiée par le groupe ait levé toutes les zones d’ombre quant au pourquoi du comment. Les tensions internes vaincues, le principal obstacle au retour du groupe demeurait la réaction de son public et, plus généralement, de la « communauté metal ». On pouvait en effet légitimement se demander comment les fans et le public en général appréhenderait le retour dans les bacs et sur les planches d’un tel personnage, fut-il au sein d’As I Lay Dying. La sempiternelle question « Comment traiter ce groupe ? » allait forcément se poser. Inutile de revenir sur les faits, si vous avez cliqué sur le lien de cette chronique, c’est certainement que vous connaissez un peu le groupe et son histoire. Alors, que faire ? Faire comme si de rien était ? Boycotter le groupe ? Le débat sur la séparation entre l'artiste et l’être humain derrière la musique ou le droit à une seconde chance est sans fin. Quelle que soit la justification que l’on pourrait donner, il y aura toujours quelqu’un pour trouver à redire. J’ai pris le parti de chroniquer cet album malgré tout le mal que je pense de son leader. Ceci étant dit, venons-en à la musique, car il y a à dire.
Après tant d’années d’absence, je n’étais pas rassuré sur ce que le groupe pouvait encore nous apporter. Surtout après la parenthèse Wovenwar qui n’a pas nécessairement marqué les mémoires. Et c’est sûrement la raison pour laquelle la claque a été encore plus violente. Le groupe nous revient avec un album qui, bien que résolument moderne, prend parfois des allures de retour aux sources avec un metalcore mélodique, rapide et très puissant. My Own Grave, sorti quelques mois avant l’album, avait été énonciateur d'un retour en fanfare : un refrain catchy, des breaks devastateurs, des riffs survitaminés et un duo Tim Lambesis/Josh Gilbert au top. Et, à vrai dire, le reste de l'album est du même acabit.
Premièrement, la production est particulièrement convaincante. Si l’on peut regretter que la basse soit mise en retrait (comme souvent malheureusement), le mix global est très efficace et met particulièrement l’accent sur les guitares. Tout est bien défini et l’on est très vite submergé par la puissance que délivre le combo. L’écoute est un délice dans ces conditions, surtout pour un genre qui a besoin de cette chaleur, de cette rondeur des sons, pour que l’effet cathartique qu'il procure soit optimal.
Deuxièmement, si les structures de chansons ne sont pas des plus originales, l’alternance entre l’agressivité des couplets de Tim et des refrains chantés de Josh offre une dynamique vraiment jouissive et ne bascule jamais dans le cliché ou le cheesy (à l’exception de Redefined ?). Surtout que ces derniers rendent une copie particulièrement bonne. Les titres, qui sont tous relativement courts, sont hyper dynamiques et portés par un duo Nick / Phil toujours à même de nous sortir des riffs entraînants à la pelle et des soli courts mais efficaces. L’influence Death mélo dans les riffs du groupe n’a jamais été aussi criante. Et que dire de la rapidité de cet album ? Undertow, Shaped By Fire ou l’excellente Only After We’ve Fallen sont des torrents de notes et de double-pédale, seulement brisés par des breaks de guitare bien pensés, des soli léchés (Blinded et Gatekeeper notamment) ou des breakdowns qui vont en faire suer plus d’un en concert. A tous égards, cet album est une réussite musicale.
Et il en va de même côté paroles. Sans trop de surprise, cet album fait de la rédemption un thème majeur. Redefined et Shaped By Fire en sont les exemples les plus flagrants : "Healed scars can be stronger than skin" / "The wounds we have can be rewritten" / "Even our mistakes can have the power - To light the way like a glaring tower - The pain can never be erased - Remain and turn it into strength - From our failures, we are refined - Replacing frailty, allowing us to be, be redefined". Forcément, compte tenu du contexte, ces paroles prennent une résonnance toute différente et apportent une certaine sincérité à la musique des Américains.
Bref, vous l’aurez compris, As I Lay Dying nous offre ici son meilleur album depuis plus d’une décennie. De la production aux compositions, j’ai été pleinement convaincu par un album riche, puissant et dense, sans toutefois être indigeste. Les Américains font ainsi leur retour sur le devant de la scène de la plus belle des manières - ce qui risque sans aucun doute de faire naître moult débats - et viennent nous rappeler qu’ils sont définitivement au sommet du metalcore mondial.
Tracklist :
Burn To Emerge
Blinded
Shaped By Fire
Undertow
Torn Between
Gatekeeper
The Wreckage
My Own Grave
Take What’s Left
Redefined (ft. Jake Luhrs of August Burns Red)
Only After We’ve Fallen
The Toll It Takes