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Je me souviens avoir pris mon bâton de pèlerin enseignant pour vous faire un petit cours sur l'hubris pour parler du groupe du même nom. En voyant le titre du premier album de Devious Experiment of Synesthesis je me suis dit que l'occasion était trop belle de recommencer à étaler ma science de grand connaisseur de concepts littéraires imbuvables. Ici, il faut revenir à Aristote et à ses écrits sur la Poétique (ah je vois que ceux du fond dorment déjà !). En gros, la catharsis est une purge : on se départit de nos émotions, de nos frustrations en voyant la tragédie les jouer. On fait tout ressortir en s'imaginant que ce sont avec nos émotions qu'ils jouent, on s'identifie. Alors pour ceux qui ne roupillent pas encore et qui tiennent à comprendre le lien avec DXS, et bien il est conceptuel.
Le groupe a développé un monde imaginaire ou l'homme, délivré de toute souffrance physiques, tente de se délivrer de ses maux mentaux. L'industrie pharmaceutique pensant avoir la solution va tenter quelques expériences grâce à un vaccin nommé Cartharsys. Le résultat sera un cuisant échec et de nombreuses pathologies mentales vont pourrir la vie des humains. Comme dans le concept développé par Ayreon, l'homme est rattrapé par ses progrès et son envie de jouer à Dieu, tout cela le plonge inexorablement vers sa chute. D'où le retour vers le concept de tragédie.
Après avoir posé de solides jalons au niveau des textes, DXS s'est adjoint les services de Sébastien Bernard du groupe Artefact afin d'enregistrer ce premier album. Le son est d'ailleurs convaincant et je n'aurais qu'une remarque à faire de ce côté là. Vous pourrez me trouver grognon, voire tatillon, mais certains titres comme Synthetic Affective Disorder, basé en grande partie sur des plans au clavier, et donc sur une certaine ambiance, sont ruinés par un problème avec la voix. Soit elle est mal mixée, soit la prononciation laisse grandement à désirer. Du coup on a cette désagréable impression qu'Aliénor chante en yaourt. Ce qui ne rend ni honneur à son chant, ni aux concept qu'ils se sont cassés la tête à trouver.
Cette remarque mise à part, on constate la présence de deux invités de groupes « amis » qui viennent poser leurs voix sur deux titres (voyez la tracklist pour plus de précisions). On est donc à la croisée d'une façon de faire plus « familial », made in PACA, et d'une autre plus professionnelle. Car les ambitions de DXS sont là et ils ont tout fait pour que Cathar5y5 soit une carte de visite que les fans de métal vont prendre au sérieux. Mais quels fans me direz-vous ?
Ce sont les premières notes de Mirror (of Terror) qui vont donner le ton. C'est dans le progressif que baigne le groupe, celui qui est infusé de métal et de grosses guitares. L'ouverture de l'album nous montre une musique à la fois complexe mais qui groove aussi, avec certaines parties de claviers qui pourront nous faire penser à des passages de V de Symphony X. Le clavier qui a concentré ses sons sur la partie électronique plus que symphonique pour coller au concept. Là dessus arriveront des growls du bassiste et quelques blasts à la fin du titre qui sont là pour prouver que le prog métal moderne ne s'encroûte pas dans du shred à gogo et pas d'ouverture aux genres avoisinants. Le tout est d'ailleurs amené assez naturellement, ou de manière prévisible si vous êtes cynique.
A l'instar d'un Adagio, on se situe dans la frange musclée du prog français même si la voix d'Adeline Colin adoucit le propos. Les riffs, eux, sont bien là, ils sentent parfois bon le Black Métal, et là ce sont les sons du claviers qui adoucissent l'ensemble, même si sur Nocturnal Phobia, ils ressortent avec une drôle de sonorité. Les titres ne révolutionnent pas vraiment le genre et n'apportent pas une innovation dramatique (j'en veux pour preuve le sempiternel passage arabisant dans Catharsys) mais le groupe a apporté un vrai soin à la variété des ambiances comme sur Aphasic Agony ou Psychotic Depression. La longueur des titres est là pour témoigner de ce travail de composition et on ne passe pas sous la barre des quatre minutes trente.
On notera aussi que leur morceau de bravoure, Synthetic Affective Disorder et ses neuf minutes se placent au centre de l'album, trustant l'attention de l'auditeur à mi-chemin. Mais DXS sait se reprendre et repartir après ce pavé avec un moment de calme, Psychotic Depression, qui ne tombe pas dans le mélo. En parlant de bizarrerie de construction l'enchaînement entre le titre éponyme et le suivant est inattendu, mais là encore, le concept parle et dépourvu que je suis des textes, il m'est impossible de jauger de cette cohérence.
Et quand sonnent les dernières notes de Nocturnal Phobia, qui s'arrête sans fioriture dramatique d'aucune sorte, on ne dit que c'est pour mieux préparer la suite. Qu'en fait on ne situe à la fin du numéro un et qu'on est en droit d'attendre un deuxième épisode. Et pourquoi pas ? Après tout DXS est pétri de talent et a compris les voies du prog qu'ils doivent suivre. Ils ne manquent pas de personnalité et devront maintenant développer une patte qui leur est propre, afin qu'on puisse les reconnaître entre mille car si les intentions sont là, la concurrence aussi. On pourra aussi faire remarquer qu'ils appartiennent au collectif Discordance, auquel appartient des pointures du prog français comme Spheric Universe Experience ou encore Anthropia. Là encore un label de qualité qui doit vous encourager à poser une oreille sur Cathar5y5.
1. Mirror {of Terror}
2. Amnesia (Featuring : Clement MARSE /Continuum)
3. Synthetic Affective Disorder
4. Psychotic Depression (Featuring : Julien LEON / Darkenhöld)
5. Cathar5y5
6. Aphasic Agony
7. Nocturnal Phobia