"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Cela ne fait que neuf ans que Periphery a sorti son premier album éponyme. Ce n’est vraiment pas long, pourtant on a l’impression que ça fait une éternité tant la carrière de Periphery est riche. Le groupe américain sort donc ici son 5ème album en neuf ans, malgré l’appellation « Periphery IV » n’oublions pas Juggernaut sorti en 2015, qui en sus était un double album. Periphery IV : Hail Stan est donc presque à considérer comme le 6ème full-length de Periphery, montrant encore la créativité folle de Misha « Bulb » Mansoor et ses camarades de jeu. Le groupe peut aussi se targuer d’être finalement un des derniers représentants du Djent « pur et dur » encore en activité constante et signé sur de gros labels, avec Monuments et dans une moindre mesure TesseracT qui eux se sont un peu éloignés du Djent originel, baignant dans un versant moins complexe et plus atmosphérique. Mine de rien, cela ne fait donc qu’à peine dix ans que le genre Djent a explosé et au final, il n’en reste déjà plus grand-chose de notable, exception faite de certaines formations plus orientées Deathcore qui sont à cheval sur les deux tableaux où ont récemment accentué leur côté Djent (Veil Of Maya en tête). Periphery, pour sa « longévité » toute relative, mérite ainsi le respect. D’autant que sa discographie est un quasi-sans faute, le groupe ayant fini par trouver un savant équilibre entre son Djent foufou et ses envies de Metal mainstream. Un bon pont entre le Djent complexe mais aéré de Periphery (2010) et celui déjà plus lumineux de Periphery II : This Time It’s Personal (2012), entre les deux parties de Juggernaut, du plus accessible Alpha au plus travaillé Omega. Et il y a 3 ans, Periphery III : Select Difficulty était déjà arrivé à cette mixture parfaite, même si l’album n’était pas lui-même parfait. D’ailleurs il est jusque-là difficile pour moi de choisir le « meilleur » album de Periphery ou même mon « préféré », tant chacun a ses particularités et tant je préfère retenir certains tubes. Le pionnier du Djent vient donc cette année apporter une nouvelle pierre à l’édifice avec Periphery IV : Hail Stan. Un titre bien évidemment alimenté par cet humour décalé et découlant de la culture du meme dont Periphery est friand, car bien évidemment Periphery ne va pas virer Black-Metal, ni même foncièrement assombrir sa musique. Sous l’égide du grand STAN, Periphery va surtout continuer à tracer sa route, avec son talent qui n’est plus à démontrer.
Et pour marquer le coup, il fallait frapper fort d’emblée, et c’est ce que Periphery va faire avec l’opener "Reptile". Comme Periphery IV : Hail Stan sera un album Stanique, on retourne les croix et on fait tout à l’envers. Si en son temps Periphery se terminait par le fleuve "Racecar" de 15 minutes, c’est cette fois-ci "Reptile" qui ouvre l’album avec plus de 16 minutes au compteur. Eh bien, c’est fat. Osé surtout, mais Periphery n’a déjà plus rien à prouver à personne. D’autant que ce morceau d’ouverture long comme le bras est d’ores et déjà mené de main de maître. Après une intro épique, on retrouve un Periphery très inspiré qui nous montre ce qu’il sait faire à chaque instant. Il n’y a pas de surprise, mais le groupe est en grande forme et relève avec brio le défi de commencer son album par une pièce hyper progressive. Passant par toutes les humeurs et les couleurs, entre lourdeur et mélodie (et avec un Spencer Sotelo qui ne cesse de s’améliorer disque après disque), Periphery résume déjà son art, et annonce un album qui sera à nouveau très complet. Et comme il s’agit tout de même d’un album avec un emballage d4rk malgré le second degré de la démarche, Periphery va en profiter pour envoyer un peu de gras, même s’il ne s’en était pas privé sur ses albums passés à l’image d’un "Motormouth" sur le précédent opus par exemple. "Blood Eagle" balance donc directement du Djent hyper abrasif et percutant, nous remettant violemment sur terre après avoir voyagé parmi les progressions de "Reptile". Contrebalancé malgré tout par des lignes vocales claires plus lumineuses, "Blood Eagle" frappe là où ça fait mal et montre un Periphery en réussite dans toutes ses composantes, replaçant même un passionnant solo déstructuré Thordendalien comme au bon vieux temps. "Chvrch Bvrner", avec son nom bien trve, poursuit cet effort de lourdeur et de complexité Djent flirtant avec le Néo bien sale, et ça fonctionne toujours. Mine de rien, cet album « noir » propose quand même déjà pas mal de « noirceur » mais à la manière de Periphery, en témoigne encore le bien pesant "Follow Your Ghost", reflirtant même avec du Meshuggah et celui, plus lourd, de Koloss et The Violent Sleep Of Reason. Ce qui pourra faire jaser mais Periphery reste Periphery avec ses chants clairs, même s’il s’amuse ici à redonner dans le Djent le plus méchant, montrant encore plus l’étendue de son spectre. Mais de toute façon, et à l’image du final plus doux de ce morceau, Periphery IV : Hail Stan présente encore une fois toute la palette du groupe américain, étalée sur une grosse heure.
Et l’on va donc bien vite trouver de nouveaux tubes, même si un "Blood Eagle" l’était déjà pour son registre. C’est surtout "Garden in the Bones" qui va tirer son épingle du jeu, un pur hit Peripherien des familles, mélodique mais rythmé, avec un Spencer Sotelo en grande forme qui nous gratifie d’un refrain splendide et irrésistible. Moins "It’s Only Smiles" qui est un peu la caution purement mainstream de cet album, un morceau coolos format single Pop assez dispensable car un peu niaiseux tout de même, quand bien même Periphery a déjà pu pondre des morceaux de ce genre par le passé. Se rapprochant surtout d’un Juggernaut : Omega dans la structure et dans l’envie de faire quelques morceaux différents et plus travaillés, Periphery IV : Hail Stan est relativement moins tubesque qu’un Juggernaut : Alpha et même qu’un Periphery III : Select Difficulty, mais il fait montre d’une certaine cohérence et réserve encore quelques surprises. Notamment avec "Crush", un quasi-tube mais où la structure est majoritairement électronique plutôt que Djent/Metal, et cela fonctionne parfaitement, amenant un peu de fraîcheur. "Sentient Glow" lui pencherait presque vers de la Pop-Punk à roulettes, mais version Djent bien évidemment, ce qui est assez déroutant et nous donne un morceau très mélodique mais véloce assez efficace. De toute façon, c’est toujours du pur Periphery malgré quelques aspérités bienvenues, et le tout va se terminer en fanfare grâce à l’excellent "Satellites", bouclant la boucle avec "Reptile" pour une nouvelle pièce très progressive, démarrant de manière très atmosphérique pour amener à un grand final assez fantastique avec un Spencer Sotelo au top de son niveau. Et nous avons au bout ce qui est assurément l’album le plus complet et le plus varié de Periphery. Peut-être même trop, sachant que ceux qui aiment le Periphery le plus aérien n’apprécieront peut-être pas les passages les plus lourds, et inversement. L’équilibre est bien là, il est peut-être difficile à maintenir mais Periphery IV : Hail Stan est un album tout à fait cohérent, du moment que l’on connaît toutes les particularités de Periphery. C’est même leur album le plus riche finalement, avec 2-3 petites originalités qui font la différence, en plus du retour d’un Djent plus cossu par moments et de la présence toujours obligatoire et remarquable de passages tubesques, qui continuent à faire briller l’ensemble et le rendre accrocheur. Periphery IV : Hail Stan confirme donc les dispositions de Periphery III : Select Difficulty et amène le groupe à confirmer encore plus sa progression, étant désormais largement mature pour faire ce qu’il veut et passer d’une composante du Djent à l’autre. Pas encore un chef d’œuvre absolu sachant que les surprises demeurent discrètes, que Periphery fait davantage toujours ce qu’il sait bien faire et que quelques passages ou morceaux sont encore discutables ; mais du fait qu’il valide toute la carrière du groupe jusque-là et qu’il est un album passionnant et complet, Periphery IV : Hail Stan peut aisément être considéré comme le meilleur album de Periphery à ce jour. Alors comme toujours : « Periphery : Love That Shit ! ». Et gloire à STAN \m/
Tracklist de Periphery IV : Hail Stan :
1. Reptile (16:43)
2. Blood Eagle (5:58)
3. Chvrch Bvrner (3:40)
4. Garden in the Bones (5:56)
5. It's Only Smiles (5:33)
6. Follow Your Ghost (5:24)
7. Crush (6:49)
8. Sentient Glow (4:27)
9. Satellites (9:25)