Chronique Retour

Album

18 septembre 2019 - Rodolphe

Cold

The Things We Can't Stop

LabelNapalm Records
styleMetal Alternatif
formatAlbum
paysEtats-Unis
sortieseptembre 2019
La note de
Rodolphe
8/10


Rodolphe

La caution grunge du webzine.

"Even if you cannot hear my voice / I'll be right beside you dear" (Run, Snow Patrol). Après que le premier single de l'album (Shine) a fuité quelques semaines avant sa sortie officielle, des voix "dissidentes" se sont élevées bien assez tôt parmi la Cold Army afin de critiquer l'évolution du chant de son leader. Ce à quoi Scooter Ward, seul membre d'origine restant avec Sam McCandless - notamment artisan du logo de l'araignée et batteur du groupe - s'est empressé de répondre. Dans un court message adressé à ses détracteurs sur les réseaux sociaux, il expliquait avoir accordé peu d'importance à sa santé vocale, allant jusqu'à fumer trois paquets de cigarette par jour. En dehors de son aspect "machine à vendre" souvent regretté et pointé du doigt, le label Napalm Records a constitué un fabuleux tremplin pour des artistes tels que Cold et Scott Stapp, tiraillés entre la musique et leurs addictions. Malgré cela, le processus de composition de l'album a été semé d'embûches. Il fallut huit ans au groupe afin qu'il nous offre une suite à Superfiction, qui fut accueilli en demi-teinte par les fans et la critique à cause de son manque de personnalité flagrant, exacerbé par ce style de Rock Alternatif soft voire sirupeux. Au rang des complications, les Américains durent se frotter à une panne d'inspiration ainsi qu'à de multiples changements de line-up survenus depuis 2014 (dont le départ des piliers Marshall et Balsamo). Et le moins que l'on puisse dire, c'est que cette longue pause a largement profité à leur créativité. 

Au moment de survoler le livret de l'album, un détail retient notre attention. Outre la quantité d'instruments qu'il a eu à partager avec son nouveau collaborateur Nick Coyle (Lifer), il ne nous aura pas échappé que Ward est crédité au "throat" (relatif à la gorge) en lieu et place de l'étiquette de chanteur. Plus que de faire écho à son aveu d'humilité où il confessait ne pas s'en sentir l'âme, cette requalification est intéréssante car elle plante le décor de ce qui constitue à ce jour leur opus le plus sombre jamais produit, depuis la sortie de 13 Ways to Bleed on Stage en l'an 2000. En effet, sa voix gagne en gravité tandis que le groupe renoue partiellement avec ses racines Néo-Metal (Without You, The Devil We Know). Sur un texte au moins tout aussi politique que Systems Fail et Better Human ("Sat with the devil time to settle the score / Traded all our religion for American lore"), le groupe redéveloppe l'ambiance anxiogène voire étouffante de ses débuts (n.d.a : période s'étalant de 1998 à 2001). Il y parvient grâce aux performances vocales du frontman, marquées par l'alternance d'un chant Grunge éraillé exécuté dans l'urgence et d'un autre à la limite du murmure. Contrairement à de nombreuses figures du Post-Grunge, le groupe n'étale pas sa technique guitaristique. Les soli ont une durée mineure. Ils sont traités avec beaucoup d'égards et d'habileté, à l'exemple de ceux qui se trouvent sur Shine - l'hymne anti-harcèlement scolaire - et Snowblind. Si les auditeurs auront parfois l'étrange sensation que Cold s'excuse d'en faire, c'est parce que cet opus possède une couleur qui ne permet pas toujours d'intégrer de tels éléments. Nul doute que les fans apprécieront Without You. Ce tube à la Just Got Wicked impressionne, tant par ses signatures de guitares atypiques que ce son de batterie familier, rappelant le style McCandless. Précisons qu'à défaut d'avoir participé à l'enregistrement de The Things We Can't Stop, le musicien aux teintures extravagantes, particulièrement actif ces derniers temps (The Cocky Bitches, Kiss Of The Spiders), signe deux compositions : le morceau sus-cité, écrit durant A Different Kind of Pain (2005) ainsi que Snowblind, qui date de la fin des sessions de Superfiction (2011), mais que les Américains intégraient déjà à leurs précédentes setlists. La formation originaire de Jacksonville représente la femme sous tous ses aspects. Par excès de nostalgie, les uns déploreront peut-être l'absence de Sierra Swan qui marqua de son charisme le Cold du début des années 2000. Mais avant d'évoquer brièvement les nouveaux guests, il convient de s'attarder sur l'artwork. Il nous offre un superbe modèle féminin en la personne de Britney Lee Betterman. Au fil de la tracklist, l'album révèle un côté cinématographique, - celui-là même pressenti à la découverte de cette oeuvre très gothique dans l'esprit, ainsi que du teaser-vidéo publié en juin, dévoilant l'intégralité de l'Intro. Les atmosphères dépressives accaparent le disque. Ces passages "scénarisés" apportent à leur façon de la vie et du dynamisme, à l'image d'une fillette (Charlotte) qui entonne le refrain de Better Human avec un sourire dans la voix. Enfin, l'omniprésence du piano et de morceaux plus émotionnels tels que Beautiful Life et ses guitares aériennes vaguement Country renvoient tout bonnement au projet solo de Scooter Ward, The Killer And The Star. Cependant, il faut de temps à autre reconnaître à Cold un effort de travail collectif ; citons à titre d'exemple Better Human (au niveau de l'écriture) et We All Love (au niveau du partage du micro - Coyle assurant un chant lead aux sonorités Emo et Ward étant relégué aux choeurs).

À ce stade, les araignées ne se sont pas assagies. Elles ont su peaufiner leurs arrangements et leur identité, avec en toile de fond des membres expérimentés, venus stabiliser le line-up. Les Américains ont fait table rase des mélodies linéaires de Superfiction pour verser dans une musique mélancolique et finalement très caverneuse, à la frontière du Rock et du Metal.

Tracklist :

  1. Intro (0:54)
  2. Shine (4:40)
  3. Snowblind (5:12)
  4. The Devil We Know (2:59)
  5. Run (Snow Patrol Cover) (4:21)
  6. Better Human (4:22)
  7. Without You (3:17)
  8. Quiet Now (4:15)
  9. The One That Got Away (3:13)
  10. Systems Fail (4:25)
  11. Beautiful Life (4:43)
  12. We All Love (3:36)