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La rigidité. La froideur. L’impartialité. Le tranchant. L’indus…
Les automatismes de pensées nous tournera évidemment vers Rammstein mais ce n’est pas eux qui nous intéresseront aujourd’hui…mais un groupe qui a longtemps été étiqueté, à plus ou moins tort ou raison, comme un parfait clone underground : Eisbrecher.
Eisbrecher est froid, chante en allemand, utilise peu de guitare et se veut d’une rigidité glaciale dans le placement de ces vocaux, tout en catapultant des refrains géniaux dont on les fans peuvent sans problème se repaitre en live. C’était particulièrement le cas d’"Antikörper", sorti en 2006, qui enchainait les tubes et les tueries en puissances comme des perles (ce "Phosphor" à s’en décrocher la tête) et se montrait en sérieux outsider du genre tout en s’éloignant quelques peu de Rammstein, avec notamment un second degré absent et surtout une volonté de mettre en avant les samples pour effacer au maximum les guitares.
Cette donnée n’a pas changé pour leur aujourd’hui quatrième album "Eiszeit", les guitares sont plus que jamais effacées…mais l’indus aussi. Eisbrecher a établi une mutation qui ne plaira probablement pas à tout le monde, en élaborant une facette beaucoup plus pop et électronique de sa personnalité, allant du sublime au vulgaire, du passionnant au franchement chiant, et se retrouvant inéluctablement le cul entre deux chaises.
Soyons clair, avec "Eiszeit", Eisbrecher ne joue plus dans la cour de l’indus martial, froid et militariste mais plutôt d’une pop sautillante très froide pour le genre, syncopée mais qui a réellement du mal à convaincre sur les pourtant trente-six petites minutes du disque.
Le timbre rugueux d’Alexx Wesselsky évoque toujours celui de Till mais il prend souvent des intonations plus chantées, et se veut fréquemment secondé par une voix féminine purement pop et fragile. Le changement n’est pourtant pas flagrant sur le génial "Böse Mädchen" ouvrant le disque. Un riff épais (une production au top, rien à redire, puissante et carrée), des arrangements industriels très vivants et un refrain très mélodique qui se retient dès la première écoute. On remarque néanmoins que l’aspect scandé d’antan à disparu au profit d’une accessibilité réussie. Il n’y a pas à douter sur le potentiel live d’un tel titre qui fera probablement danser pas mal de monde…oui…plus danser que headbanger il faut être honnête et l’avouer, notamment sur ce break éthéré quasi gothique des plus mélodiques. Et finalement, si tout avait été aussi réussi, on ne s’en plaindrait pas…mais voilà, malgré la (trop ?) courte durée du disque, Eisbrecher peine à créer une dynamique à son album qui a réellement du mal à décoller, et flirtant parfois dangereusement avec le mauvais gout.
Ainsi, "Bombe" se transforme en horreur insipide sur un refrain complètement raté aux claviers spatiaux des plus ridicules et à côté de la plaque. "Segne Deinen Schmerz" est une pure composition pop exaspérante sur laquelle des vocaux féminins transparents et écœurants débitent des « hanhanhan » à se cogner la tête contre le mur…quand ce n’est pas "Dein Weg" qui évoque directement un Evanescence allemand industriel, mièvre et sans âme (flagrant sur le refrain), qui nous font nous demander réellement où est passé le Eisbrecher que nous avons connu lors de leurs vertes années.
Il est là, en filigranes, peu présent mais tentant encore vainement de respirer dans cet océan d’electro pop, notamment sur un morceau éponyme certes bancal (encore une fois, ça ne décolle jamais réellement) mais qui renoue avec la froideur du groupe et ces riffs hachés, martiaux et omniprésents, bien qu’un refrain beaucoup trop mélodique gâche un peu le tableau. "Gothkiller", quand à elle, réussie là où les autres compositions échoue en étant plus pop que jamais (ce beat électro typiquement dancefloor) en mettant sur orbite un refrain très réussie se partageant avec une chanteuse pas forcément lumineuse mais dont la voix truffée d’effets passe relativement bien avec le reste.
"Der Hauch des Lebens" termine ce qui sera un calvaire pour certains en renouant définitivement avec le passé du groupe. Batterie électronique mélancolique, riff mélodique, chant brut mais lent et une mélodie centrale qui se cale dans votre tête pour ne plus en ressortir…mais il est malheureusement déjà trop tard, le naufrage était déjà annoncé.
"Eiszeit" trouvera peut-être son public mais il sera clairement bien loin des premiers fans du groupe et se voudra probablement plus proche de la frange émo/rock de ces dernières années, ce qui pourrait couter le peu de crédibilité musicale que pouvait avoir un groupe qui se cachait bien trop souvent derrière l’ombre du géant Rammstein. Tout est lisse, plus aucune émotion ne transparait. La carrière de Eisbrecher n’a jamais décollée, et il y a peu de chance que cela commence ici…il reste quelques bons moments, ce n’est pas réellement mal fait…il faut juste avouer que la recette livrée ici a réellement du mal à passer, et que l’on a simplement aucune envie de s’en resservir une seconde fois…
1. Böse Mädchen
2. Eiszeit
3. Bombe
4. Gothkiller (Eisbrecher vs. Roberto Vitacca)
5. Die Engel
6. Segne deinen Schmerz
7. Amok8. Dein Weg
9. Supermodel
10. Der Hauch des Lebens