Punkach' renégat hellénophile.
Alors que je commençais à peine à m'intéresser assidûment au Black Metal, c'est via Mgłaque j'ai découvert Deus Mortem durant une tournée commune passée par Bruxelles, en 2016. A l'époque, le groupe n'avait qu'un premier album à son actif, l'excellent Emanations of the Black Light, une œuvre dérangeante au possible, à la fois représentative du très particulier style polonais et habitée d'une identité propre identifiable dès les premiers accords, que j'écoute toujours avec un plaisir renouvelé. J'ai longtemps craint qu'Emanations of the Black Light ne soit qu'une oeuvre isolée ; une parenthèse dans la carrière de musiciens déjà bien trop occupés avec leurs projets musicaux respectifs. L'année 2019 éloigne donc mes craintes avec ce Kosmocide tant espéré.
Dès la chasse furieuse de "Remorseless Beast", ligne droite rendue encore plus implacable par les "No remorse !" scandés par Necrosodom, on sent un certain changement de ton, plus rapide et plus direct que sur l'album précédent. Deus Mortem semble bien avoir opté sans tergiverser pour une attaque frontale, que vient à peine tempérer le changement de rythme incantatoire de la seconde moitié de "The Soul of the Worlds".
Les compositions de Kosmocide se rapprochent un peu plus de celles de l'album précédent à partir de "Sinister Lava" : le tempo ralenti sur un riff désincarné et une base rythmique plus en retrait, tandis que Necrosodom fait entendre à nouveau ses impressionnants effets de voix d'outre-tombe. L'album continue peu ou prou dans cette veine ponctuée des courts soli de guitare de Sinister, inattendus mais plutôt réussis. Ce retour aux sources culmine sur la longue marche désolée de "The Seeker", et plus encore sur un "Ceremony of Reversion p.2" entêtant, légèrement orientalisant même, et qui succède efficacement au premier mouvement de l'œuvre originelle. Dernière surprise, mais non des moindres, Kosmocide se conclut sur un "The Destroyer" quasiment mélodique dans ses riffs simples et son rythme mid tempo, ce qui rend ce morceau, pourtant basique dans sa construction musicale, aussi obsédant que réussi.
Kosmocide est un très bon album de Black Metal, mais il ne m'a pas entièrement convaincu. Je trouve qu'il lui manque la pincée de folie qui faisait le sel de Emanations of the Black Light : la plupart des morceaux s'enchaînent sans me faire ressentir que "quelque chose d'autre" est là, tapi dans l'ombre, et certainement pas doué de bonnes intentions. Bien sûr, je reste influencé par mon opinion ô combien positive du premier album, mais je trouve son successeur plus lisse. Peut-être car, entretemps, Deus Mortem est passé d'une production quasiment indépendante sur Strych Promotions, qui n'a d'ailleurs apparemment rien sorti depuis, au label norvégien Terratur Possessions. Non pas que celui-ci ait fait du mauvais boulot, mais le résultat final me semble quand même un brin moins personnel. Une autre explication possible est que Deus Mortem n'est plus composé seulement du duo originel, Inferno à la batterie et Necrosodom en charge de tout le reste, mais d'une équipe complète, et non plus seulement de musiciens additionnels convoqués pour les performances scéniques: Stormblast et Vomitor sont maintenant eux aussi crédités sur l'album. Je ne veux surtout pas préjuger de leur apport, mais le résultat final semble quand même n'être plus l'œuvre d'un seul et unique maestro. A plus long terme, ce n'est pas focément une mauvaise chose.
Si je ne suis personnellement pas autant charmé que je l'espérais, Kosmocide reste une découverte intéressante, sans doute plus d'ailleurs que beaucoup de sorties récentes de la branche la plus traditionnaliste du Black Metal. Du reste, je crois que cet album permettra à Deus Mortem de disposer d'un panel plus large et plus varié de morceaux en live, et j'espère pouvoir le constater très bientôt.
TRACKLIST
1. Remorseless Beast (5:24)
2. The Soul of the Worlds (5:45)
3. Sinister Lava (5:31)
4. Through the Crown It Departs (4:17)
5. The Seeker (6:34)
6. Ceremony of Reversion p.2 (8:39)
7. The Destroyer (6:37)