Why not ?
La première chose qui explose aux yeux quand on voit le nouvel album des Canadiens de Beyond Creation, c’est l’orthographe du titre : Algorhythm. Quand on connait un peu la formation, on anticipe tout de suite sur le contenu et le postulat de base du groupe. Sans verser dans l’approche scientifique de la musique, on sait que le groupe verse dans le Death technique et affectionne particulièrement de torturer les méninges de ses auditeurs. On anticipe donc un moment d'exigence et de rythmiques tordues.
En deux albums, la formation a su se forger un petit nom dans la communauté death metal et grâce à son rapprochement avec Season of Mist, ils ont même visité le vieux continent, poussant ainsi leur renommée un peu plus proche de nous. Un changement de bassiste plus tard, ils nous reviennent donc avec dix titres et presque une heure de musique. Quand on sait à quel point la basse est primordiale dans Beyond Creation, le fait de savoir que la recrue vient de Brought by Pain, une autre pépite du Canada, on est rassuré.
On ne va pas se mentir, Algorhythm est un album à part dans la discographie du groupe. On sent une transition qui s'opère avec les changements de membres et une certaine maturité. Deux titres courts, comme des morceaux d'introduction, ça attire l'attention. Je tenterais presque la comparaison avec un groupe qui a connu une mutation majeure : Morbid Angel. On sent ici un désir d’épaissir encore plus leur caractère avec des percussions aux effluves tribales, à l’instar de leurs aînés, ou des instru un peu planantes. D’ailleurs, l’artwork du disque, graphisme presque Stargate-ien , dans cette brume inquiétante, appuie ce voyage interstellaire. Rassurez-vous, le trip ésotérique est encore loin mais l’on sent quand même que les Canadiens sont arrivés à un point où ils savent ce qu’ils veulent et ont les billes pour le faire sans avoir de craintes quant au retour du public, dont ils ont la confiance.
Pour étayer ce propos, on peut dire que ce seront surtout certaines chansons avec des passages expérimentaux, voire très progressifs qui vont titiller l'oreille du fan. Le groupe prend des risques et se dévoile un peu plus. Alors on perd en spontanéité et en brutalité mais on y gagne en potentiel de réécoute et de durée de vie. Il faut du temps pour appréhender un Surface's Echoes, titre somptueux tant il danse entre deux eaux, s’étire à l’infini avec des blasts puissants, des soli super heavy et surtout cette machine de guerre qui avance d’un bloc, dans un quasi-crescendo après un début très progressif jusqu’au terme plus brutal du titre. Binomial Structures prend aussi un essor particulier : mid-tempo, ultra heavy, presque piste de décollage pour les shredders. Il vaut mieux être prévenu tant on n’est pas habitué à ce genre de moment à part.
Les fondamentaux de Beyond Creation ne sont pour autant pas laissés de côté : cette basse, toujours omniprésente, tordue à souhait, c’est l’instrument essentiel de leur identité et qui donne un relief encore plus montagneux à Ethereal Kingdom, qui porte très bien son nom (éthéré signifiant “céleste, proche du ciel”). On trouve aussi l’alternance de blasts avec des moments plus “travaillés”, plus prog, plus techniques comme sur The Inversion où l’on saute de l’un à l’autre pendant une bonne partie du titre avant que l’on ne décolle encore une fois vers une ambiance presque jazzy.
En terminant l’écoute de The Algorhythm, on a la sensation d’avoir vu les lignes de Beyond Creation bouger. Le titre de conclusion en est un bon résumé : The Afterlife est terriblement heavy, utilise des cordes, mais sonne death technique. On ne peut que s’intéresser à cette évolution tant elle ne constitue en rien une trahison de ce qu’ont toujours mis en avant les Canadiens : une musique ancrée dans du Death technique riche avec un son rond, chaud et gras comme le genre le demande. Plus ça va, plus vos neurones sont mis à contribution et je ne serais pas surpris de les voir se diriger dans une direction encore plus surprenante en étant toujours capable de montrer les muscles au bon moment. En attendant, ce serait dommage de passer à côté.
Tracklist :
1. Disenthrall (1:43)
2. Entre Suffrage Et Mirage (4:20)
3. Surface’s Echoes (6:53)
4. Ethereal Kingdom (5:19)
5. Algorythm (7:39)
6. À Travers Le Temps Et L’Oubli (1:47)
7. In Adversity (3:18)
8. The Inversion (7:26)
9. Binomial Structures (6:31)
10. The Afterlife (5:37)