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Nouveau volet au demeurant esthétisant avec un artwork évocateur et méticuleusement raccordé à l’esprit de ce Travels, Defeater lève enfin le voile sur ce qui pourrait bien être le plus habile hold-up de la saison, chatouillant de près les très en rogne Have Heart et autre Carpathian . Photographes de vies désorientées et d’existences fortuites, Defeater n’a jamais eu pour habitude de calmer la danse et encore moins de danser sur un pied avec ce nouvel opus renfrogné et revendicatif. Avec dans son viseur de quoi secouer les dernières productions en matière de hardcore mélodique et tous les dérivés restés sagement aux crochets des cadors de la discipline (Comeback Kid, Shai Hulud …), le groupe nous aborde sans prétention avec onze chansons taillés dans le granit et laissant derrière lui une bonne couche de calcaire.
Compositeurs réalistes et hautement attachés à la société environnante, c’est avec grand talent que la formation nous enrôle dans un hardcore débridé et formalisé par onze brûlots comme autant de scenettes de la vie courante. Car il faut dire que le groupe dépeint admirablement bien l’avalanche de sentiments pouvant découler des petits tracas quotidiens ou tout simplement des très gros bonheurs alimentés par le savant mélange des mélodies et de la hargne disséminé tout au long de ce nouvel opus. « Blessed Burden » ouvre le bal sur un morceau court qui en dit long. Rythmique heurtée, ping-pong viscéral entre les quatre murs d’une pièce exiguë renfermant le groupe et Defeater abat des cloisons entre la hargne de Paint It Black et les mélopées du bientôt dissous Have Heart.
« Nameless Streets » vient à chasser « Forgiver Forgetter » et la formation continue sur sa lancée en imposant un style rencontré autour des groupes précités, les émotions et la véracité en plus. Ce Travels, malgré une appellation tout juste bonne pour les chemins de croix, semble davantage une thérapie - d’ailleurs plutôt étrange pour un premier album. Sur « Prophet in Plain Clothes », le groupe y laisse d’ailleurs sa peau en empruntant les chemins initialement tracés par Carpathian et ses confrères jusqu’à la déraison et une certaine folie furieuse sur le très persuasif « Moon Shine ». Un titre plus enlevé que ses prédécesseurs et notamment la ballade mélo-acoustico-déchaîné « Carrying Weight » qui surfe sur les délires Punk hardcore ayant probablement accompagné la formation à ses débuts. Un pur délire démontrant que Defeater s’est aussi se jouer de son auditoire par le jeu habile de la surprise et de l’innovation, même si on lui préférera largement sa version rageuse et à la limite de l’agonie. Derek Archamcault, gouaille en avant et chanteur de son état, s’employant par conséquent à sortir de ses gonds au déballage d’un tapis rouge tissé par des guitaristes plus qu’imaginatifs. (« The Blues » ou encore « Everything Went Quiet »)
Rappelant pour le coup la voix belliqueuse et très particulière de Frank Carter des petits prodiges Gallows, c’est le mariage des guitares et de cette voix si engagée et débridée qui fait tout le charme d’un album sans fautes de frappes et sans ménagement.
Defeater pour son tout premier album réussit le parfait tour de passe-passe que toute jeune formation rêverait de façonner en un rien de temps. Celui de nous délivrer un album sincère, faisant corps avec l’auditeur dans ses derniers retranchements. Le projet de proposer une palette fournie et homogène de sentiments arrivés à temps alors que les chefs de file du mouvement peine à retrouver une dynamique ou s’éteigne tout simplement au gré des tournées. Coup de cœur autant stylistique que musical, Defeater s’empare du hardcore en prenant soin de ne le relâcher qu’après une longue séance de bienfaisance et d’un accompagnement hautement humanisant.
1. Blessed Burden
2. Everything Went Quiet
3. Nameless Streets
4. Forgiver Forgetter
5. City By Dawn, The
6. Prophet In Plain Clothes
7. Carrying Weight
8. Moon Shine
9. Blues, The
10. Debts
11. Cowardice