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Quatrième album pour les historiens de Mastodon et la confirmation avérée que la musique d’Atlanta tient une nouvelle fois ses promesses en accouchant d’une montagne. Un roc plus accessible que les anciens albums du géant mais bien mieux épaissi et étoffé avec les effets du temps sur la condition du groupe. Comme une bonne bouteille de vin vieillie en fût de chêne que les années auraient soudainement assagi et bonifié. Soit un grand cru, unique en son genre et égalant les mesures de l’excellent Levathian, le chant hurlé et les secousses en moins. Ce qui n’a pas empêché au groupe de nous transmettre vibrations et martèlements sous bien d’autres mesures par l’apport caractéristique des guitares au travers d’ambiances et d’un univers que seul le quatuor semble maîtriser et dominer.
À l’épicentre de cet album se trouvent donc les guitares de Brent Hinds et Billy Kelliher transcendées pour l’occasion en machines à rêves donnant toute la mesure à un album composé de sept chansons et valorisant la qualité à la quantité. Ce n’est d’ailleurs pas la précision du couple « Oblivion » et « Divinations » qui affirmeront le contraire en fournissant des clés volubiles et planantes à ce nouvel album. Lorsque le premier impose une stature chamanique et mystique à des années lumières des précédentes formules métaphysiques de Mastodon, l’autre se joue de nous avec des sonorités orientales aux confins des paysages qu’auraient pu visiter le groupe. Et toujours l’apport indéniable de la batterie tirant le groupe vers une certaine idée de la mobilité et de la diversité. Chevauchant autant d’univers que de notes, Mastodon a changé sa vision de l’extrême, tentant des approches sludge lorsque qu’il ne s’accoquine pas avec le rock et l’ambiant. Rassurez-vous nos compagnons de garde conserve consciencieusement toujours une once d’efficacité au détour d’excellents breaks salvateurs, mais le groupe a évolué et étonnamment dans le bon sens. Aucun titre n’est à occulter sur cet opus malgré des choix artistiques volontairement poussés en faveur de l’expérimentation. Besoin de changer d’air, extrême envie de s’écarter des préceptes formatés de leurs débuts repris aujourd’hui par de nombreux groupes. Le morceau « The Czar » développé en 4 volets distincts flirte donc avec des orchestrations bien plus modernes en restant la scénette maîtresse et centrale de cet opéra baroque confectionné autour du personnage mystérieux et versatile de Rasputin. Conçu comme une véritable pièce montée, ce nouvel opus reste à ce jour le plus élaboré de la discographie du combo comme en atteste le titre éponyme montrant le groupe sous une facette intransigeante et enivrante. Complété par Scott Kelly de Neurosis, « Crack The Skye » résume à lui seul la gourmandise du combo pour les changements de plans et de positions. Une musique volontairement calme, propice au développement de nappes de clavier et aux brusques changements d’humeur de la formation. Si l’on peut reprocher à Mastodon d’avoir quelque peu sous-dosé son accélérateur, on ne regrettera pas de voir que le groupe sait surprendre à chaque coin de rue entre deux roulements de batteries (« Quintessence ») ou grâce aux accents épicés de Troy Sanders guidé par les ronflements groovy de sa basse.
Diversité semble être donc le leitmotiv de ce nouvel album, fin dans son approche et orchestrant avec intelligence chaque instrument au moment opportun. Tel un puzzle que s’efforce de construire pièce par pièce le combo, « The Last Baron » finit de parachever une œuvre cohérente de bout en bout et dressant un tableau riche en couleurs serti d’émotions et d’expérimentations.
Nouveau pas dans la discographie de Mastodon, ce nouvel album dessine de nouveaux horizons lumineux à un groupe intègre qui n’a de cesse de bonifier ses compositions avec le temps. Dépassant le seul cadre de l’étiquette métal vite léguée au groupe, « Crack The Skye » se permet de naviguer entre le sludge, le heavy avec de viles touches de rock n’roll dans un souci d’anti-conformisme certain. Certes, la formation s’éloigne un peu du bûcher incandescent qu’elle avait réussi à allumer au détour de ses premiers albums, mais celle-ci se permet d’illuminer le ciel avec un nouvel album conceptuel et extrêmement bien dirigé.
1. "Oblivion" 5:47
2. "Divinations" 3:39
3. "Quintessence" 5:27
4. "The Czar: I. Usurper - II. Escape - III. Martyr - IV. Spiral" 10:54
5. "Ghost of Karelia" 5:25
6. "Crack the Skye" 5:54
7. "The Last Baron" 13:01