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Porte-drapeaux du metalcore à la sortie du lumineux Bitterness The Star, 36 Crazyfists n’a jamais cessé de parfaire un style enfanté dans les plaines enneigés de l’Alaska. Toujours postés en précurseur de la mélodie abrasive saupoudrée d’une savante dose de férocité, nombreux étaient ceux qui avaient laissé de côté le groupe, après un Rest Inside The Flames efficace, mais quelque peu sur le banc de touche. Énième rencontre d’anciens combattants ou réactivation du métronome du grand froid pour ce cinquième opus ? Les doutes ne cessaient de s’amonceler à l’aube de ce nouvel album étrangement baptisé The Tide And Its Takers, censé tirer la couverture aux nombreux fans impatients, voir de faire un joli pied de nez à tous les usurpateurs ayant pris l’hibernation du combo pour argent comptant.
Et même si l’artwork ne renferme aucun cœur piégé dans la glace (en référence à leurs précédents opus), 36 Crazyfists met le sien à l’ouvrage et opte pour une pochette foncièrement plus guerrière et revendicative, fermement décidé à ranimer la flamme de ses débuts. Voir à nous faire embarquer au sein d’un brise-glace définitivement bien huilé et toujours en état de marche, avec la première présentation du single « We gave It Hell ».
Notre Captain’ Igloo de l’Alaska n’est de toute façon pas manchot et n’a rien perdu de sa crédibilité, ni même de son coup de main s’employant dès le début à fixer sa voile dans des territoires crus et orientés mélodiquement. Barre placée en hauteur dès les premiers titres avec le démarrage en trombe de « The All Night Lights », assené par un déferlement de saccades. Le passage du rire aux larmes, d’une joie prononcée à un courroux répressif comme sur trépidant « Only A Year Or So ... ». Le jour et la nuit appartiennent à ces Américains et ils savent parfaitement se jouer d’une ribambelle de sentiments en démontrant une diversité à toute épreuve. Premier point fort de l’album, sa richesse de structure, sa diversité d’arrangements et d’univers au cours de onze chansons capables d’illustrer le cours d’une vie. De « The Back Harlow Road » au mélo-dramatique « Waiting On A War » en passant par « Vast and Vage » – l’hymne teenage du groupe orchestré en compagnie de la chanteuse Candace de Walls Of Jericho – l’auditeur enchaîne assauts sonores et piolets mélodiques amenés bruyamment par Brock Lindow et son coffre fort. Mais également brillamment par Mick Whitney et sa descente de manche chimérique. Le bassiste s’employant à donner vie et rebonds à l’ensemble des morceaux. Le valsant « When Distance Is The Closest Reminder » étant l’exemple le plus frappant.
Gros bémol toutefois sur cette nouvelle approche artistique. Oui, depuis ses débuts, 36 Crazyfists ne cesse de jouer la carte de la diversité et de la mouvance. Oui, cet album dépasse en chœur son petit frère et ses mélodies poussives, mais ce dernier reste une nouvelle fois dans sa grande lignée, n’admettant pas de changement de ligne conductrice. Le groupe allant même jusqu’à se rapprocher d’une facilité musicale en partageant riffs et dates de concerts avec Bullet For My Valentine (en référence à la date annulée à l’Olympia). Bien loin de les blâmer, la sonnette est tirée sur les titres de fin d’album voguant sur des empreintes musicales faciles et répétitives (« Northern November »). Rien de bien méchant comparé au tonitruant « Absent Are The Saints » où les anges retrouvent la terre ferme en prodiguant la fin du monde avec des palm-mute à faire frémir votre palier. Une énergie retrouvée et une dynamique de composition matérialisée pour ces navigateurs d’une autre ère et d’une terre fertile. Celle de la mélodie reconquise au service de riffs impeccables comme en témoigne la césure « The Black Harlow Road ».
Avec un The Tide And Its Takers tout feu tout flamme, 36 Crazyfists ne s’enflamment jamais, en retrouvant bien au contraire la sincérité et l’efficacité de composition la caractérisant depuis ses débuts. La formation allant parfois même jusqu’à reprendre les chemins acoustiques et caractéristiques de The Reste Inside The Flames. Reste que ce nouvel album est une nouvelle fois la preuve parfaite de l’habileté de composition et de la maestria métal que s’emploient à organiser ces nordistes pas comme les autres.
1. The All Night Lights
2. We Gave It Hell
3. The Back Harlow Road
4. Clear The Coast
5. Waiting On A War
6. Only A Year Or So...
7. Absent Are The Saints
8. Vast And Vague
9. When Distance Is The Closest Reminder
10. Northern November
11. The Tide And Its Takers