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lundi 19 octobre 2015

Opeth

Le Trianon - Paris

Balin

Matthieu, 24 ans, basé à Nantes. Ancien membre d'U-Zine et de Spirit of Metal. Vous me retrouverez pour les chroniques et live reports de divers styles musicaux.

   Faisant suite à l’illustre tournée Blackwater Park de 2010, cette petite série de concerts (une quinzaine de dates) était l’occasion de célébrer les vingt-cinq ans de la carrière du groupe avec un show très spécial. En effet, le quintet suédois promettait d’assurer non pas un set, mais deux sets ! Nous aurons ainsi droit à un premier concert lors duquel le groupe joua l’intégralité de l’album Ghost Reveries, puis dans un second temps un set « best of » dont nous discuterons la composition plus en détail. Prenant place au sein de la magnifique salle du Trianon (je vous laisse le soin d’y jeter un œil sur le net), cette soirée avait tout pour être inoubliable (hormis l’énorme queue pour entrer dans la salle mais bon, on s’y habitue). Récit d’une soirée qui a tenu toutes ses promesses.

Set Ghost Reveries

   Horaire parisien oblige, le concert débute à 19h précises. Pas de première partie ce soir, Opeth ouvre pour Opeth, que demander de mieux ?! La salle affiche complet (environ mille cinq cents places) et le public est réparti entre une fosse dense mais jamais serrée et deux balcons avec des places assises qui furent très vite réquisitionnées. La scène est ornée de divers chandeliers et bougies faisant bien entendu écho à l’illustration de l’album vedette de la soirée, avec également les habituels écrans surplombant l’ensemble des instruments. N’ayant pas réussi à attendre la surprise du direct, je savais déjà que l’album serait joué dans l’ordre et c’est sur l’énorme Ghost of Perdition que Mikael Akerfeldt et sa bande investissent les planches du Trianon.

   Véritable tube de la formation jouée très souvent en live, Ghost of Perdition est un monument idéalement placé en début d’album (et donc de set), alternant passage violents et parties plus calmes. Il n’en faut pas plus pour que la foule manifeste son amour pour le groupe (nous y reviendrons), et cela se fait ressentir via un parquet pour le moins sensible aux mouvements de foule ! Premier constat, le son est très bon malgré peut-être un peu trop de basse et le jeu de lights est au top. Le fait que je me trouve dans les premiers rangs m’empêche également de profiter de toute la portée du growl de Mikael (quand sa voix claire se fait parfaitement entendre), ce que le frontman tentera d’expliquer à un fan se plaignant du sous-mixage de la voix ("Il va falloir faire le choix entre nous voir et nous entendre"). S’enchaînent ensuite sous les hurlements du public The Baying of the Hounds, excellent titre qui n’avait pas été joué depuis février 2012 et Beneath the Mire qui intégrait pour la première fois la setlist des Suédois. Certaines personnes avec qui j’ai discuté d’Opeth ici ou là m’avaient confié considérer Ghost Reveries comme le moins bon album de la formation, sentiment que je ne partage absolument pas. Outre le fait qu’il s’agisse d’un des premiers albums du groupe que j’ai découvert, il contient des titres absolument géniaux comme Atonement qui suit. Si les deux précédents titres m’avaient donné des frissons, l’interprétation d’Atonement sera un des grands moments de la soirée. Couvert par une vidéo intimiste et chaleureuse, le morceau trouve son point d’orgue sur l’énorme solo de Fredrik Akesson (qui m’impressionne encore plus à chaque date).

   Voici enfin le moment tant attendu, à savoir la première fois que j’allais entendre Reverie/Harlequin Forest, mon titre favori de Ghost Reveries, en live (et je ne dois pas être le seul vu les réactions de la foule). Et l’attente en valait la peine tant ce titre fut transcendé sur scène ! Comme à son habitude, Mikael Akerfeldt est très blagueur (il est d’ailleurs très en forme à ce niveau), mais on sent quand même que le public d’Opeth le fatigue par ses interventions puériles (« Je t’aime Mikael », « A poil » et j’en passe). On décèle ainsi une grand part d’ironie et de sarcasme dans les remarques du leader même si l’on sent qu’il est vraiment très heureux d’être ici ce soir. Mais peu importe, le groupe enchaîne avec le court et reposant Hours of Wealth qui intègre également pour la première fois la setlist du groupe, avant d’interpréter le classique The Grand Conjuration. S’il s’agit pour moi du titre le plus faible en studio, il faut avouer qu’il passe très bien en live grâce à son intensité (Martin Axenrot prouve encore une fois que c’est un batteur hors pair, très précis et bénéficiant d’une force de frappe incroyable). Le set anniversaire se clôt enfin avec Isolation Years, jouée pour la première fois lors de cette tournée (ils n’arrivaient apparemment pas à la jouer auparavant, allez comprendre pourquoi…) et il faut dire qu’elle passe très bien l’épreuve du live. Sobre et mélancolique, ce set Ghost Reveries se clôture en douceur et en émotion, sous un tonnerre d’applaudissements bien entendu.

Set « best of »

   Le groupe réinvestit les planches (débarassés de tous les chandeliers décor spécial Ghost Reveries) après vingt minutes d’entracte durant lesquelles certains purent aller aux toilettes ou prendre un peu d’air, mais la majorité préfère garder sa place durement acquise en début de soirée. Ayant vu la setlist auparavant, je suis d’ores et déjà déçu qu’il n’y ait aucun titre de l’époque pré-Blackwater Park mais on ne va pas faire les fines bouches, un concert d’Opeth dans un cadre si unique ne mérite pas d’être entaché par de simples frustrations de fan. C’est ainsi que les suédois ouvrent ce second show de façon on ne peut plus classique puisqu’ils interprètent deux extraits du dernier album joués lors de chaque concert lors de la dernière tournée, à savoir Eternal Rains Will Come (et son break de batterie affolant dès les premières secondes) et Cusp of Eternity (avec son solo magistral en fin de piste). Je sais que beaucoup de gens boudent ces opus mais je les trouve vraiment géniaux personnellement, et encore plus en live ! La violence et l’intensité reprend ensuite le dessus sur la nostalgie et le psychédélisme puisque c’est The Leper Affinty qui arrive. Première fois qu’il m’est donné d’entendre cet énorme titre sur scène, je dois dire que je m’en souviendrais longtemps tant cette pièce fut marquante (le public fait d’ailleurs ressentir son amour infaillible pour cet album à de multiples reprises).

   Grande première pour votre serviteur, To Rid the Disease, unique extrait de Damnation, instaure un silence quasi-religieux dans la salle (il y aura toujours des crétins pour gueuler des conneries, aucun souci là-dessus mais bon…) et les paroles sont reprises en cœur par un public totalement dévoué à la cause de Mikael et des siens. Certains chantent d’ailleurs bien trop fort (et faux), mais bon on ne va pas leur reprocher non plus… Le son de basse est incroyable et Martin Méndez, plus vieux comparse du leader depuis 1997 prouve encore une fois qu’il est un monstre de technique et de feeling. Mikael Akerfeldt, maudit démon et éternel blagueur devant l’infini va ensuite se délecter de notre malheur en jouant des extraits de The Face of Melinda repris en cœur par le public mais brusquement coupé (« Oh sorry, I forgot »), de Hope Leaves et de The Drapery Falls dans une ivresse mais surtout une frustration la plus totale !

   On poursuit ensuite dans le registre calme et serein puisque le groupe choisit de jouer I Feel the Dark, seul représentant d’Heritage ce soir. J’adore ce titre en studio mais j’étais un peu sceptique concernant son impact en live. Que nenni, les mélodies de six cordes se mêlent à la voix claire de Mikael pour envoûter le Trianon durant un peu plus de cinq minutes avant que ne résonnent les premières notes de Voice of Treason, troisième et dernier titre de Pale Communion de la soirée. Je n’avais encore jamais entendu ce morceau en live et je dois dire que le début est un peu longuet. Cependant le final très jazzy et grimpant en intensité balaya rapidement ce sentiment et l’on est forcé de reconnaitre qu’encore une fois, Opeth impressionne en live par tant de maîtrise et de groove.

   Cependant le final de la soirée sera bien plus violent. Master’s Apprentice retrouve en effet le chemin du live après plus de quatre ans d’absence, et c’est tant mieux ! Certainement mon morceau favori ou presque de Deliverance, j’ai souvent considéré ce morceau comme un des grands moments d’un show d’Opeth vers les années 2008-2009. Un bref rappel laisse enfin la place à Mikael Akerfeldt présentant chacun de ses musiciens (ainsi que lui-même : « I’m just a poor man with a guitar ») qui s’attèlent chacun leur tour à un petit solo (bien vu le riff de Smoke on the Water Joakim Svalberg) avant de clore le set sur le traditionnel The Lotus Eater. Meilleur titre de Watershed et pièce parfaite pour finir le set, The Lotus Eater se voit coupé en plein milieu par le groupe qui incorpore comme toujours un break très funky de plus bel effet, avant de quitter la salle définitivement, sous les applaudissements d’un public ne lui ayant de toute façon jamais fait défaut.

Setlist :

1. Ghost of Perdition   
2. The Baying of the Hounds  
3. Beneath the Mire 
4. Atonement 
5. Reverie/Harlequin Forest
6. Hours of Wealth
7. The Grand Conjuration  
8. Isolation Years 

9. Eternal Rain Will Come
10. Cusp of Eternity
11. The Leper Affinity 
12. To Rid the Disease (suivi par des extraits de The Face of Melinda, Hope Leaves et The Drapery Falls)
13. I Feel the Dark
14. Voice of Treason
15. Master's Apprentice

16. The Lotus Eater

Merci à Garmonbozia pour la soirée et pour l’accréditation.