Les coulisses du metal n°1 : Les organisations de concert (1/2)
mardi 27 septembre 2011U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !
Intro
Comme toute musique, la musique metal s’exprime certes sur album, mais elle s’apprécie encore plus lorsqu’elle est vécue en live. Qui n’a pas connu l’intensité d’un festival, lové dans une masse humaine de plusieurs milliers de personnes bougeant comme une seule entité ? Qui n’a jamais vécu une rencontre improbable dans la foule, d’une vieille connaissance qui a fait le déplacement pour le coup ? Qui ne s’est jamais retrouvé devant son groupe favori, totalement en transe, anticipant chaque accord, chaque parole ?
Aucuns doutes là-dessus, le metal est une musique que l’on découvre sur album, mais c’est surtout une expérience humaine à partager en concert. Seulement, au sein du public metal, combien de gens connaissent réellement la nature du travail de ceux qui œuvre dans l’ombre pour organiser ce type d’évènements ? Bien peu. Et pourtant, de Benjamin Barbaud, l’organisateur du Hellfest jusqu’à l’organisateur du concert metal dans le ridicule petit bar d’à coté de chez soi, il faut la même passion, la même énergie et la même envie.
U-zine vous propose donc une plongée dans le monde de ceux qui sont de l’autre coté du miroir, qui investissent leur temps, et parfois leur argent pour un public pas toujours au courant et pas toujours reconnaissant. En effet, et ceci sera le seul coup de gueule de ce dossier, j’entends souvent dire « Pourquoi ce groupe là ne passe pas dans ma ville ? » « Relou, c’était annoncé dans cette salle, et finalement ça a été modifié » « J’vais pas en concert, c’est trop cher ». Il est facile de critiquer, mais il est nettement plus délicat de bouger son cul et de faire bouger les choses. Ce groupe te plais, tu voudrais qu’il passe dans ta ville : alors organise le, tu verras que ce n’est pas si compliqué, c’est juste énormément de temps et d’énergie. Car derrière chaque évènement se cache des réalités parfois cruelles : la peur de voir peu de monde, la peur que certains groupes annulent, la peur de ne pas tomber dans ses frais. Car n’allez pas croire que les organisateurs de concert s’en foutent plein les poches, c’est rarement le cas.
Les acteurs
Pour rédiger ce dossier, U-zine a mené l’enquête et a été questionner 5 associations différentes, dans des régions différentes pour avoir des avis variés et des expériences différentes. Nous retrouverons donc :
- Sandrine, de l’association Battle’s Beer, sur Paris
- Klem, de l’association Femâles, sur Lyon
- Prout, de l’association Favete Linguis, sur Nantes, Angers et Lyon
- Zakaria, de l’association Maleifice Propaganda, sur Nantes et Angers
- Jesus, de l’association Les crottes de Chabichoux, et chanteur d’Offending, sur Saintes
Les questions
Afin d’avoir des avis différents sur l’organisation de concert, il fallait évidement un référentiel commun. Nous avons posé les questions suivantes à tous les acteurs précédemment présentés. Pour accéder aux réponses à ces questions, cliquez sur la question en question (c’est clair nan ?)
- Tout d'abord, pouvez-vous présenter votre structure (historique, événement particulier, quelques chiffres) ? Quel a été votre parcours pour en arriver là ? Comment vous-êtes vous lancés ?
- Avez vous une particularité notable au sein de la structure qui vous démarque des autres orga de concert (comme par exemple organiser que des concerts de death, que des mini-fest, des concepts originaux autres) ?
- Quel est votre motivation principale au sein de votre structure (passion ? envie de partager ? ...) ?
- Pourriez vous détailler à nos lecteurs les principaux axes de l'organisation d'un concert pour qu'ils puissent se rendre compte du temps et de l'énergie nécessaire ?
- Y a-t-il réellement une lourdeur administrative a endurer pour organiser ou y aller avec les tripes est suffisant ?
- Quel est le budget total moyen de vos concerts ?
- Concert en salle - concert en extérieur. Vous préférez quoi ? Pourquoi ?
- Avez-vous déjà rencontré des conflits avec d'autres orga de concert (conflits d'intérêts, batailles pour faire jouer le même groupe, problème de calendrier commun dans la même ville, ...) ou au contraire y a t'il une entraide et une communication ?
- Certaines organisations ont des partenariats avec des salles de spectacles précises, est-ce le cas avec vous ? Si oui, quelle salle et êtes vous satisfait de ce partenariat ?
- Que pensez-vous de la "mode" actuelle de programmer des tournées avec des groupes vraiment divergents musicalement, pour rassembler plus de monde ?
- Pensez-vous que c'est le téléchargement qui pousse de plus en plus de groupes sur les routes ? (rapport aux bleds improbables dans lesquels les groupes se produisent, ce qu'ils auraient refusé avant) ?
- Les groupes ne tournent-ils que pour promouvoir un album ?
- Le ou les groupes qui vous ont marqués sur scène lors de l'un de vos concerts ?
- En ce moment beaucoup d'orga se cassent la figure. Ressentez vous plus de difficulté à rentrer dans vos frais depuis quelque temps ? Si oui, quel pourrai en être selon vous la cause (crise ?)
- On sait que les orga de concert peuvent parfois être cauchemardesques. Quel est votre pire galère ?
- A l'inverse, de quel événement êtes vous le plus satisfait et pourquoi ?
- Avez-vous des anecdotes vraiment spéciales à raconter sur les exigences de certains groupes / managers ? Si oui, lesquelles ?
- Délire sur les "sataniques" au HellFest, mairies réticentes : quelle est la plus grosse opposition à laquelle vous ayez du faire face ?
- Quel est la démarche à suivre pour quelqu'un qui souhaiterai devenir bénévole et s'impliquer dans votre structure ?
- Si un groupe veut être intégré à l'un de vos concerts en tant que première partie, que doit-il faire ?
- Vous avez d'une manière ou d'une autre un lien avec U-zine (partenaire, membre, lecteur etc ...). Qu’attendez-vous de ce genre de partenariat ?
- Si vous avez des détails à rajouter, des choses à dire qui ne seraient pas dans les questions, bisous à papa/maman, c'est maintenant.
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- Tout d'abord, pouvez-vous présenter votre structure (historique, événement particulier, quelques chiffres) ? Quel a été votre parcours pour en arriver là ? Comment vous-êtes vous lancés ?
Battle’s Beer : L’association Battle’S Beer existe officiellement depuis 2008 dans le but de promouvoir la scène underground metal extrême. Pour ma part je suis entrée chez BS’B quelques mois après sa création et je suis devenue présidente en 2009.
Femâles : L’association Femâles a vu le jour début 2008. Nous étions 5 et voulions nous rendre actives dans le soutien de l’underground lyonnais. Nous avons organisé une quinzaine de concerts depuis et mis en place un premier festival qui a lieu tous les ans : le H’elles On Stage, festival de metal à voix féminine. La plupart d’entre nous était déjà actives dans le milieu en tant que chroniqueuses, musiciennes ou photographes. Nous nous connaissions et avions eu l’idée ensemble d’aller plus loin dans le soutien du metal et nous sommes lancées dans l’organisation de concerts. Le tout premier a eu lieu au Lyon’s Hall, dernier bastion lyonnais pour le metal underground.
Favete Linguis : Association de loi 1901 (et j'ai aucune idée de ce que ça signifie mais je sais que ça fait bien), Favete Linguis est un groupement de personnes qui voulaient à la base faire bouger deux scènes sur la ville d'Angers : la scène goth et la scène metal. En effet, ça va faire vachement cliché ce que je vais dire, mais les filles étaient plus dans les trucs de gogoth et les gars dans le metal virile Satan. Le nom de l'asso a été trouvé en conséquence puisqu'à l'oreille il fait assez gothique justement, mais sa signification est bien plus sombre (dernières paroles du bourreau lorsqu'il demandait à l'assemblée de tenir sa langue pour une exécution). On était alors plus d'une vingtaine à l'origine du projet !
Autrement dit on aurait pu faire des trucs de fou. Mais la jalousie, l'incompréhension et le typique "mais tu m'as pas dit que tu voulais faire ça" ont fait que l'asso n'a servi à rien pendant presque 3 ans. A deux puis cinq, on s'est alors sorti les doigts du cul pour contacter absolument toutes les salles d'Angers qui nous ont absolument toutes envoyés chier. Parce-qu'on essayait de faire du metal. Lorsque le T'es Rock Coco, un café-concert a ouvert ses portes et nous a accueilli, notre activité à explosé. C'était en 2007, depuis l'asso enchaine les concerts et a fait jouer des groupes comme Vital Remains, Origin, Eluveitie ou encore Arkona. Je (Prout) gère désormais l'asso tout seul, mais j'ai toujours une excellente équipe de potes, prêts à venir m'aider sur chaque date.
Maleifice Propaganda : Zaake, je représente l'asso MALEiFICE PROPAGANDA, l'asso est inscrite dans le JO depuis mars 2008. à l'actif de l'asso à peu près 25 concerts, avec plus d'une 50aines de groupes, et 90% du metal extrême. Et ça va du petit groupe de la région jusqu'au groupe a visibilité internationale. Mon parcours reste classique, j'avais jamais pensé avant me diriger vers l'évènementiel, c'est en donnant des coups de main a des potes de temps à autre que je me suis retrouvé un jour a faire mon tout premier concert avec un budget qui dépassait à peine le 100€, pour maintenant me retrouver a gérer des soirées qui comptent des milliers d'euros.
LCDC :Les Crottes De Chabichoux (Association loi 1901). Président de l'association. Naissance de l'asso Décembre 2003. Je n'ai pas vraiment eu de parcours, dès que j'ai eu 18 ans j'étais « fourré » à nombreux concerts du côté de La Rochelle, Poitiers, Saintes, Cognac, La Roche/Yon... Étant originaire de Saintes (17), et attiré par l'orga de concert, je me suis rapproché en 2001 d'une association 1901 Musiques Actuelles (concerts de tous styles), et j'ai voulu quelques renseignements pour monter une asso, comment l'orga d'un concert se déroulait etc etc... on m'a proposé de faire parti de l'asso et ainsi mettre en place un concert avec un budget etc etc , pour organiser dans un premier temps un concert Metal. J'étais tout excité à l'idée, et motivé par ce que l'on me proposait.
Le problème, c'est que j'ai attendu 2 ans. On me reservait encore et toujours des excuses etc etc... Je me suis senti complètement bridé dans cet élan de motivation. Je me suis dit « très bien personne veut t'expliquer, t'aider etc etc. Tu es pas plus con qu'un autre, tu vas monter ton association ». Et voilà c'est parti comme ça sur un coup de tête, j'y connaissais rien, j'ai appris sur le tas, en faisant aussi des erreurs mais ces dernières permettent aussi d'avancer. Par la suite (et à la base) cette association est en fait né d'une idée de projet que nous (Moi Président, Romuald Trésorier et Thrasher Secrétaire) avions imaginé (utopiste en 2002) celle d'une affiche complètement décalée qui ferait jouer sur la même affiche : Corbier et Gronibard (le cassoulet show).
Cette asso est principalement née de cette idée pour réaliser ce projet de dingue. On a commencé avec 0 Euro en poche, des couilles, de la motivation et du bougeage de cul. Aucune subventions, ni aides. Les Crottes De Chabichoux et L'Express Café se sont associés pour proposé des concerts rock/metal/hardcore (favorisant surtout les groupes locaux) et ainsi ré-investir les ptit pécules mis de coté pour commencer à mettre en place le Cassoulet Show 1 (Corbier + Gronibard – Avril 2004). Il y a eut 4 éditions du Cassoulet Show...
- Avez vous une particularité notable au sein de la structure qui vous démarque des autres orga de concert (comme par exemple organiser que des concerts de death, que des mini-fest, des concepts originaux autres) ?
Battle’s Beer : Le concept que nous suivons actuellement pourrait se résumer en deux mots : Beer and Metal. C’est en quelque sorte notre devise, qui dénote une convivialité envers le public et les groupes que nous accueillons. Nous nous concentrons exclusivement sur l’organisation de concerts de Black Metal et Folk Metal, ainsi que leurs variantes Viking, Pagan Metal (avec instruments traditionnels ou non). Ce choix a été dicté non pas par une quelconque mode mais simplement par nos goûts personnels.
Femâles : Oui en effet, rien qu’au niveau de notre structure, nous ne sommes que des filles responsables de la programmation et de l’organisation ! D’où le nom « Femâles ». Côté programmation justement nous aimons les soirées un peu conceptuelles, nous avons organisé deux concerts sous forme de mini battle metal et hardcore.
Nous avons mis en place le H’elles On Stage destiné aux voix féminines depuis 3 ans et lançons cette année un nouveau festival : le Sounds Like Hell, destiné à présenter certaines des meilleures formations françaises montantes de metal moderne. Sinon nous organisons aussi le passage sur Lyon de plus gros groupes ou tournées (Evergrey, Repugnance Tour avec Defeated Sanity, Threat Over Europe Tour avec Threat Signal…). Nous sommes ouvertes à tous les styles, du black au goth indus en passant par le dark et le grind !
Favete Linguis : J'essaye au maximum de m'orienter uniquement sur des dates de metal extreme (Black / Death / Grind), ce qui m'intéresse avant tout c'est le Blast ! Mais une fois dans le circuit un peu plus pro, tu commences à arranger les gens comme les potes ou les autres organisateurs / tourneurs et il m'arrive de toucher à des trucs qui sont un peu moins mon style mais carrément plus gros que les groupes que je visais à l'origine (comme Eluveitie ou Arkona par exemple).
Mais j'aime avant tout les soirées décalées, bordéliques, où tu sens Satan partout et où lorsqu'une personne "normale" entre, elle hallucine. Après libre à elle de rentrer dans la fête, car on est loin d'être cons et fermés, ou libre de garder son balais dans le cul et de se tirer. Il m'est arrivé plein de fois de rembourser des places aux curieux en mal de sensations fortes.
Maleifice Propaganda : J'ai pas de concept dans l'asso, c'est déjà assez compliqué l'orga de concerts (promo, programmation, la paperasse, la technique, … ), et vu que je suis seul à gérer mes orgas, je ne peux pas me permettre à l'heure actuel de conceptualiser l'asso, et je ne pense pas que ça se ferait à l'avenir. Cependant avec le temps, je me dirige vers le booking: Première expérience avec les Whispering Tears, plutôt fructueuse, qui m'encourage a me diriger de plus en plus vers cette branche du spectacle.
LCDC : Non pas vraiment si ce n'est le concept du Cassoulet Show avec comme parrain François CORBIER. (qui a vu passé à l'époque Gronibard, Didier Super, Ultra Vomit...). Après c'est sûr que l'on préfère organiser des concerts se rapprochant du Metal et toutes ses branches ... Ou tout simplement des choses qui nous tiennent à cœur et que l'on a envie de défendre car on sait que humainement on prendra notre pied. Je pense que le côté humain et nos valeurs, nous pousse à organiser telle ou telle manifestation.
-Quel est votre motivation principale au sein de votre structure (passion ? envie de partager ? ...) ?
Battle’s Beer : Ma première motivation c’est de permettre à des groupes underground de venir sur la capitale, de se faire connaître et de passer un bon moment parmi nous. Je me suis rendue compte que le fait d’organiser des concerts contribuait (modestement, mais tout de même) à accroitre la motivation des groupes. Certains se sont même recomposés pour nos dates, comme Taliesin pour citer un exemple parmi d’autres, et continuent aujourd’hui.
Femâles : LA PASSION ! Nous sommes toutes passionnées par la musique metal, chacune aimant un style différent et nous voulons agir pour sa sauvegarde et son développement. Nous avons envie de faire découvrir des groupes qui nous ont séduites, de fédérer du monde autour d’artistes prometteurs. Nous investissons temps et argent pour ce milieu par pur plaisir de présenter des plateaux intéressants, de faire venir des groupes sur Lyon qui n’en ont pas encore eu l’occasion, de faire bouger un peu cette ville et ses metalleux avec un seul mot d’ordre : la qualité.
Favete Linguis : C'est avant tout une passion bien entendu. Et je suis prêt à parier que toutes les structures qui répondront à ce questionnaire auront la même réponse que moi. A la base, les gens de l'asso étaient d'accord, on voulait faire bouger la ville, pour plus avoir à se taper 10 heures de routes pour aller à un concert, en profiter à domicile en partageant en plus des moments particuliers avec les groupes.
Aujourd'hui, j'ai juste envie de passer des putains de bons moments en proposant au public, des groupes violents mais intéressants, connus ou moins connus, mais dont les tourneurs "grand public" boudent les prestations. C'est quand même ouf que pour une poignée d'euros, j'ai été le seul à faire une date pour Vital Remains en France en 2009. Alors que la date était à Nantes et un mercredi de semaine normale, des gens sont venus de partout (jusque Lille !) pour la date.
Maleifice Propaganda : avant tout c'est la passion, sans la passion on ne fera rien. Et aussi on fait souvent la fête...
LCDC : Je dirai l'envie de défendre une musique, une culture mais aussi un état d'esprit et la mise en place de choses surprenantes ou qui changent ... Des valeurs également. Notre côté humain (enfin la traduction que nous en avons). On peut dire que c'est une passion, car ce n'est point notre travail, l'asso ne vit pas à 300 km/h toute l'année, et programme donc des concerts de façons aléatoires mais évolue à son rythme et en ce qu'elle croit. Ca fait également partie comme tu le dis d'un partage aussi avec le public et de proposer de nouvelles choses dans notre coin du département. Enfin du moins, c'est ce que l'on tente de faire.
- Pourriez-vous détailler à nos lecteurs les principaux axes de l'organisation d'un concert pour qu'ils puissent se rendre compte du temps et de l'énergie nécessaire ?
Battle’s Beer : La première chose c’est d’avoir une salle. Sur Paris (et même ailleurs j’imagine) c’est le principal problème. Il faut trouver une salle qui ne soit pas à un prix exorbitant, pour ne pas s’engouffrer financièrement et qui veuille bien accueillir du metal. Après que nous ayons contacté près de 250 salles je peux vous dire que ce n’est pas une chose aisée. Une fois la salle trouvée, il faut composer l’affiche, tout en prévoyant un budget. Pour être à l’aise, le mieux est de s’y prévoir 3 mois à l’avance. Nous ajoutons des groupes que nous aimons mais aussi des groupes qui nous ont contactés. Beaucoup de demandes nous parviennent et nous ne pouvons pas toujours malheureusement faire jouer tout le monde.
Environ 2 mois avant le jour J, nous commençons la promo. C’est une bonne marge, mais un mois peut être suffisant. Je dirais que c’est cette phase là qui est la plus longue et qui demande le plus de travail car il faut diffuser ça à un maximum de personnes, que ce soit par internet ou en face à face. Il faut constamment se demander « Quelles personnes pourraient être intéressées par mon concert et comment puis-je contacter ces personnes ? ».
A côté de cela, il y a bien entendu la préparation de toute l’organisation, à savoir : trouver le matériel nécessaire, préparer les balances, se coordonner avec les ingésons, prévoir le catering, la gestion du temps, prévoir une personne pour chaque rôle important, prévoir un fond de caisse, etc… C’est sur que si on veut faire les choses correctement, cela demande énormément de temps et d’énergie. A tout moment il peut surgir un imprévu et il faut savoir agir en conséquence.
D’ailleurs, pour moi on ne se lance pas dans l’organisation de concerts sans avoir un minimum de sérieux et de maturité. Il faut être capable d’assumer pleins de problèmes à la fois, capable de satisfaire tout le monde, que ce soit le public, les groupes et tout ce qui va autour.
Femâles : Ok mais on n’est pas couchés !
Je vais prendre l’exemple où l’organisateur est 100% à l’origine du concert, c'est-à-dire qu’il a choisi tous les groupes lui-même. Certains concerts sont des propositions de plateaux pour une date donnée : tous les groupes sont choisis, la date aussi, ils arrivent tous en même temps souvent, suffit de trouver le lieu et d’assurer le sur place.
Donc dans le cas du H’elles On Stage ou Sounds Like Hell voilà ce par quoi on passe :
L’affiche : déjà il faut l’idée du concert : qui je fais jouer ? où ? pourquoi ? quand ? avec qui ? Il faut créer l’affiche du concert : penser aux groupes, faire des écoutes, regarder des vidéos, lire chroniques, live reports, actus,… imaginer la cohérence, l’enchaînement, prévoir plus de groupes que l’affiche ne peut en recevoir en cas d’indisponibilité… On envoie des paquets de mails, on se réunit pour écouter, comparer, on trie les candidatures… On réserve la salle dès que la date est fixée avec tout le monde.
Le budget : Etablir un budget, le maîtriser, estimer les entrées, les dépenses totales dans tous les domaines et fixer une fourchette de prix pour le concert. On fait des demandes de subventions….
La communication : on réfléchit au visuel du fest, à l’image qu’on veut lui donner, on se concerte avec notre graphiste, on envoie un premier cahier des charges, on suit la production, on fait des modifs, rien pour le logo du HOS, il y a eu plus de 12 versions finales ! Ensuite on crée le flyer on passe les commandes pour l’impression on organise la distribution aux concerts et dans les magasins. On organise la diffusion sur internet (forums/webzines/profils/réseaux sociaux/sites spécialisés/annonces…). On envoie l’info à la presse.
Pour les festivals que nous faisons au CCO nous faisons des trailers et autres vidéos, il faut les concevoir, se concerter avec notre réalisateur… récupérer le contenu auprès des groupes, suivre la réalisation.
La logistique : Il faut se pencher sur les contraintes techniques des groupes, mettre en place le backline, réserver les hôtels, prévoir le catering, faire les plannings, la feuille de route…
L’administration : et puis il y a toutes les démarches administratives et contrats à établir…
C’est simple, le HOS III a nécessité 8 mois de travail, le Sounds Like Hell pour décembre est prévu depuis mars et le HOS IV est déjà en cours… C’est effectivement difficile de se rendre compte de tout le travail que cela nécessite pour que le rendu soit de qualité…et encore, là j’ai simplifié !
Favete Linguis : Tout le monde vous répondra la même chose, la chose primordiale quand tu veux organiser c'est d'avoir la salle. Une fois celle-ci bookée tout le reste coule de source. Et en France, avec du metal, qui plus est extreme, c'est pas une mince affaire. Lorsque que tu commences à être connu et que tu tournes en routine les choses s'inversent. Aujourd'hui j'ai de nombreuses salles sous la main, j'ai juste à envoyer un mail et si elle est dispo c'est bon. Donc l'affiche devient primordiale, selon la grandeur du bordel, tu choisis une salle en conséquence. J'organiserais pas Dragon Force au Ferrailleur (Nantes - 300 personnes) mais plus au Chabada (Angers - 900 personnes - rentabilisable vers 400), alors que pour Benighted je ferais l'inverse.
On en arrive donc au troisième axe qui est alors celui du budget. En effet, selon le prix du groupe et son potentiel d'entrées, on prend une salle qui a un certain coût qu'il faut aussi rentabiliser. Tu calcules les frais annexes (bouffe, dodo, promo etc.) et tu vois si tu fais la date ou pas.
Après tu t'occupes du matos : être sûr que chaque groupe aura ce dont il a besoin. Quand tu es néophyte comme je l'étais au début de l'asso, tu galères pas mal mais une fois dans le mouvement ça se fait tout seul. Depuis j'ai aussi de nombreux contacts d'ingé son, d'ingé lumière qui participent également à offrir une bonne soirée aux groupes comme au public et qui s'avèrent primordiaux dans certains cas.
La promo est l'axe le plus fatigant mais le plus important lorsque tu veux réussir ta soirée. Perso, je me déplace un mois avant à tous les concerts du coin, des flys à la main à l'entrée ou la sortie du concert. Je colle moi-même des affiches partout en ville à partir de deux mois avant la date et je reviens toutes les deux semaines pour en remettre une couche sauf vers la fin ou je me bouge tous les trois jours. Idem pour tous les magasins touchant de prêt ou de loin à la scène (magasin de fringues décalés, d'instruments de musique, de vente de skeud, de jeux de rôles etc.). Y'a pas de secret, plus tu te bouges, moins tu te plantes.
Sur place ensuite, si tu suis bien ton rider (demande des groupes) et que t'es pas trop con, tu t'éclates. Tu fais gaffe aux entrées, à l'accès aux loges, tu fais la bouffe, tu cours partout parce-que t'auras toujours un soucis ou une demande à la con mais rien de bien exceptionnel. Le seul piège, c'est de se laisser aller. Il faut savoir rebondir même raide à chier. Ceux qui en branlent pas une, qui picolent et qui se la racontent pendant un concert se vautrent toujours littéralement en orga au moindre soucis. Il faut savoir gérer le public comme les groupes et les gestionnaires de la salle.
Le plus dur, je trouve, c'est de gérer le timing. Pour les groupes, y'a jamais assez de temps, pour la salle, on fini toujours trop tard, pour le public tu commences toujours trop tard, ça dure pas assez longtemps mais ça fini quand même trop tard. Bref, t'es pas un Dieu, alors tu fais ce que tu peux et ça fonctionne assez bien si tu fais des efforts.
Un concert, ça demande beaucoup de temps, parfois du stress et ça peut être fatigant lorsque t'habites loin de la ville ou des villes du concert. Il m'est arrivé de me laisser avoir par des bons plans aux mêmes moments et me taper quatre concerts en une semaine à Lyon, Saint Etienne, Toulouse et Rennes, à ce moment là tu fais moins le malin.
Maleifice Propaganda : Pour faire simple:
Bloquer les groupes ? Bloquer la Salle et la date ? gerer les details Technique (pour ne pas perdre du temps de changement de Set) ? Promo Physique (Flyers, affiches, radio...) Internet (Forum, Myspace, Reseau Sociaux) ? Stress ? jour J (veiller a être dans les temps et pas de problème de dernière minute) ? comptabilité (compter les sous et payer les gens) ? et se la coller severe
LCDC : Je pense qu'il faudrait poser ce genre de questions à des pros de l'orga ! Mais dans les grands grands axes, trouver une salle (je vous passe le côté administratif de demande, sachant qu'il faut réserver très longtemps à l'avance.... dernière exemple nous organisons sur Saintes un ptit festoch fin Octobre, j'ai dû poser mon créneau salle depuis la fin Janvier). Assurance de la salle, location sono et light. Si besoin trouver des sponsors, pressage et réalisation flyers et affiches (promo collage et distribution pour faire la pub du concert.... ainsi que sur le net). Ensuite gérer la dispo de chaque groupe, leur matos (technique & backline), l'ordre et heure de passage et les balances (tout un planning) alimentation et conditions, l'accueil, horaire, planning des balances, location bar, demande debit de boisson, sécurité etc etc
Lorsque l'on fait ça par passion, lorsque l'on est pratiquement seul, je ne parle pas sur le terrain le jour J du concert, mais toute l'orga et la mise en place en amont (exemple le Cassoulet Show 2 avec Corbier, Didier Super, Gronibard, et Ultra Vomit) et que l'on tente de faire ça comme des pros pour que tout se passe bien, faut envoyer la sauce et c'est pas si facile surtout pour un début. C'est énormément de temps et d'énergie, et une grosse organisation à mettre en place longtemps à l'avance. Je le vois pour moi entre le taf, mes groupes et projets perso etc etc Après ça depend du nombre de personnes qui s'activent et remplissent leurs tâches avec sérieux et rigueur. Il faut énormément s'investir et trouver du temps à consacrer concrètement.
- Y a-t-il réellement une lourdeur administrative a endurer pour organiser ou y aller avec les tripes est suffisant ?
Battle’s Beer : Je ne trouve pas qu’il y ai une réelle lourdeur administrative. Les moments où elle intervient sont à la création de l’association et au moment de la gestion de la trésorerie. Il ne faut donc pas s’arrêter à ça. Le reste est bien plus difficile à mon sens. En revanche si on veut s’atteler à faire des demandes de subvention ou demander l’aide de l’Etat par exemple, là oui, la lourdeur administrative se fera sentir.
Femâles : Les tripes sont obligatoires. On ne peut pas faire tout cela sans volonté. Après au niveau des déclarations, tout dépend ce que l’on cherche à faire. Il faut une personne morale responsable de la soirée dans tous les cas, donc la création d’une association avec déclarations à la préfecture et rédaction des statuts est souhaitable. Cela se fait assez rapidement, il y a des modèles sur internet (qu’il faut adapter bien sûr). Il faut souscrire à une assurance, ouvrir un compte en banque.
Si on veut tout faire dans les règles de l’art il faut déclarer Guso, Sacem, CNV à chaque concert, qui prélèvent un pourcentage sur le CA et qui nécessitent de la paperasse avant et après le concert… Quand il faut déclarer des musiciens c’est pareil, c’est assez lourd. Après, si l’asso tient le bar il faut une autorisation de la mairie. Il faut envoyer les fichiers pour avoir une billetterie à la fnac ou autre… Oui il y a des contraintes administratives. Il faut tenir sa trésorerie et sa comptabilité également. Sinon le statut d’association est assez libre et globalement peu contraignant.
Favete Linguis : Je dirais qu'il suffit d'avoir une grosse paire de couilles. Ca dépend de la ville, de la taille du groupe, de la salle, de ce que tu demandes (subventions et cie). Mais en général, il suffit de savoir parler français (ou anglais), de mettre "cordialement" à la fin de tes mails et de garder la tête sur les épaules. Le reste vient avec l'expérience, le vrai piège, c'est de voir trop gros trop vite.
Maleifice Propaganda : Tout dépend de l'échelle a laquelle on fait ça, un concert dans un petit rad avec des petits groupes, il n y a pas grand chose à gérer niveau administratif. Mais par contre, dès qu'on commence à se professionnaliser, il y a de plus en plus de choses à faire si l'on veut être dans les règles et être efficace : les formulaires préventes, les autorisations, les subventions s'il y a besoin, la Sacem, la CNV, … etc mais tout cela avec le temps et la connaissance, ça deviens simple... il faut surtout prendre le temps de bien faire les choses.
LCDC : Ca dépend ce que l'on appelle « lourdeur administrative »
C'est plus ou moins lourd suivant l'ampleur du concert ainsi que le lieu et ville où ça se déroule. Enfin il me semble.
- Quel est le budget total moyen de vos concerts ?
Battle’s Beer : Le budget moyen est de 600 euros. On est monté jusqu’à 15000 euros pour le Crosne Médiéval Fest.
Femâles : Cela ne serait pas très utile de vous donner une moyenne parce qu’entre un concert au Lyon’s Hall et un fest de 6 groupes au CCO, il y a une grande différence. Globalement le budget d’un concert varie entre 400 et plusieurs milliers d’euros.
Favete Linguis : Impossible à dire. J'ai organisé des dates à 30€ comme d'autres à plus de 4 000€. Ca dépend du groupe, de la salle, de la ville. En ce moment, je tourne aux dates à 2 000€, mais ça veut juste rien dire, c'est le marché du moment.
Maleifice Propaganda : Comme dit plus haut, ça peut aller de un 0 à plusieurs 0.
LCDC : Cela va dépendre de l'importance du concert, le lieu, de la tête d'affiche, sponsors ou pas... c'est assez aléatoire. Par exemple pour octobre, on va arriver à du 2500 € environs pour les 3 concerts (et il n'y a pas vraiment de grosses têtes d'affiche...!)
- Concert en salle - concert en extérieur. Vous préférez quoi ? Pourquoi ?
Battle’s Beer : Je n’ai personnellement jamais testé l’organisation de concert en extérieur.
Femâles : Nous n’avons pas encore tenté l’extérieur mais cela pourrait venir par la suite. Il faut arriver à gérer la question du lieu, du matos, du style de groupes qui supporte le mieux l’extérieur et la météo ! Sinon en salle pour le moment, ça nous va très bien et logistiquement parlant c’est beaucoup moins contraignant.
Favete Linguis : En salle !! T'as très souvent déjà tout le matos, tu risques rien si y'a des intempéries (à part les gens qui viennent pas), au niveau juridique t'es plus que couvert et franchement, le son est meilleur.
Maleifice Propaganda : En salle bien sûr, même si ça n'a pas forcement le charme d'un concert open-air ou sous chapiteau, les infrastructures sont déjà là et aussi le matos son et lumières pour certaines salles. On ne galère pas à tout louer, pour le monter et ensuite le démonter... tout ça à un coup et surtout ça prends beaucoup de temps
LCDC : Toujours fait en salle... mais en extérieur pourquoi pas, par contre il faut faire quelque chose de plus gros et de plus important du style un festival... d'ailleurs je me demande s'il ne faut pas une licence spéciale ? (entrepreneur de spectacles)
- Avez-vous déjà rencontré des conflits avec d'autres orga de concert (conflits d'intérêts, batailles pour faire jouer le même groupe, problème de calendrier commun dans la même ville, ...) ou au contraire y a t'il une entraide et une communication ?
Battle’s Beer : Oui cela est déjà arrivé, mais ce n’est jamais allé bien loin. Nous avons déjà eu, en effet, un souci de calendrier commun et ce fut bien dommage car entre association il ne doit pas y avoir de vrai conflit d’intérêt mais plutôt un besoin d’entraide. Aujourd’hui nous vérifions minutieusement qu’il n’y ai pas d’autre date similaire le même jour dans la capitale pour éviter de se marcher sur les pieds, ce qui nuirait finalement à tout le monde.
Femâles : Il y a deux types d’organisateurs officiels de concerts : les entreprises et les assos. Ces deux types de structures n’ont pas du tout la même approche ni le même fonctionnement. Quand l’un va chercher la rentabilité et le gros sous, l’autre joue la carte passion et coup de cœur. Je ne dis pas que les gros organisateurs n’aiment pas les groupes qu’ils font jouer mais à partir du moment où ton salaire dépend du succès de tes concerts, le goût personnel ne doit pas primer sur la rentabilité. En tout cas, pas sur tous les concerts.
Nous avons de très bons contacts et nous nous soutenons avec certaines autres assos de Lyon mais nous n’avons aucune relation avec les grosses structures qui se moquent bien de notre existence : on ne leur fera jamais concurrence et on ne se battra pas pour faire jouer les mêmes groupes ; nous ne jouons pas dans la même cour et ce n’est pas notre but non plus.
Après, nous faisons attention à leur programmation pour ne pas faire de concerts aux mêmes dates.
Favete Linguis : Je trouve qu'il y a une entraide qui s'arrête à celle qui se voit. Si quelqu'un peut en niquer un autre il le fera, faut juste pas que ça se voit. Bien sûr que je me suis déjà fait piner des idées par quelqu'un de plus grands ou plus rapide. Bien sûr que j'ai déjà dit non à des putains de dates parce qu'il y en avait une autre similaire à même pas 100 km ou alors parce que la salle idéale était déjà prise par une autre pauvre soirée qui rapportera 10 fois moins que la mienne.
A ces moments là tu t'arranges comme tu peux pour faire changer les différents acteurs d'avis, tu t'arranges avec les autres orgas etc. Mais au final tu fais ça juste pour ta gueule. C'est humain et ça me pose pas de problème, ça fait parti du jeu. T'inquiètes qu'on est tous de la jet set à se connaitre entre organisateurs et à se sucer la teub quand on peut. Si tu veux continuer dans une scène aussi bancale que la notre, vaut mieux savoir caresser tout le monde dans le sens du poil d'autant plus que la plupart du temps, on est tous potes.
Maleifice Propaganda : Entre associations, à ma connaissance, il n y a pas de trop de soucis, c'est plutôt de l'entraide. On a tous signé pour la même galère. Le seul problème que j'ai pu rencontrer sont liés au calendrier par exemple. Quand des concerts se marchent dessus. Et l'idéal est d'annoncer ces dates bien à l'avance.
LCDC : Non pas vraiment. C'est sûr que les problèmes de calendrier c'est une réalité. Nous on est un peu en dehors de ce système. On est assez underground, et on ne programme pas tous les mois alors c'est vrai que niveau communication entre asso du coin, on est un peu à la masse, et j'avoue que c'est un défaut de notre part. En tout cas on n'est pas fermé à l'entraide ! On fait aussi circuler les infos des assos des alentours comme on peut car on n’a pas de gros moyens.
- Certaines organisations ont des partenariats avec des salles de spectacles précises, est-ce le cas avec vous ? Si oui, quelle salle et êtes vous satisfait de ce partenariat ?
Battle’s Beer : Non nous n’en avons pas et nous le regrettons. En effet, il est de plus en plus difficile d’avoir un tel partenariat car les salles sur Paris sont très recherchées et demandées. Peu de salles sont donc intéressées par un partenariat, qui peut impliquer une exclusivité ou une facilité d’organisation ou de promotion.
Femâles : Oui, les organisations qui ont de quoi faire 10 dates dans la même salle au cours de l’année peuvent obtenir un accord et les grosses maisons de prod qui organisent toujours au même endroit doivent avoir un contrat spécial avec réduction tarifaire mais nous ne pouvons pas en bénéficier, nous n’organisons pas assez de grosses dates
Favete Linguis : Bah. J'aurais pu en avoir. Le soucis c'est que je sais toujours quand une date va marcher ou pas. Si c'est pour que la salle paye tout pour une soirée plantage et que je la pine ça m'intéresse pas. C'est mignon pour le CV mais c'est vraiment un truc de bâtard. Et si je sais que ça va bien marcher, je préfère la gérer tout seul, j'aurais plus à y gagner. Le seul partenariat que je cultive, c'est les habitudes amicales. La salle me fait confiance, je passe en priorité, et je lui rends bien. Des liens se nouent, par exemple aujourd'hui quand je vais au Ferrailleur ou au T'es Rock Coco, je vais avant tout chez des potes.
Maleifice Propaganda : Non, je n'ai pas de partenariat particulier avec des salles, j'ai mes habitudes dans certaines salles bien-sûr, a force d'organiser toujours dans la même salle, ça devient presque une seconde maison. Pour ma part c'est au Ferrailleur à Nantes que je trouve mon bonheur, et on a vraiment de la chance d'avoir une salle pareille dans notre région.
LCDC : Aucun partenariat, peut-être parce que l'on est trop petit et qu'on ne fait pas de concerts à la pelle ou à caractère « à la mode » ou du genre « on est sûr que ça fonctionne »... car nous n'avons aucune aide, aucune subvention. C'est un choix et nous programmons des choses vraiment différentes des autres, et à leur regard ça paraît plutôt underground. C'est épuisant et ça demande encore plus de taf, mais on a le mérite de se dire qu'on a fait tous ça avec nos putains de tripes ! De plus notre ville ne possède pas de moyen comme Poitiers, Cognac, Angoulême... enfin je veux dire une salle digne de ce nom !
- Que pensez-vous de la "mode" actuelle de programmer des tournées avec des groupes vraiment divergents musicalement, pour rassembler plus de monde ?
Battle’s Beer : Je ne suis pas personnellement enthousiasmée par ce genre de dates et je dirais même que je les évite au maximum. Mais au fond je peux comprendre que ce genre de date existe tout de même. Ainsi, en s’assurant de faire venir un public plus large, les organisateurs (ou labels ou autres) ont plus de possibilité de se payer des salles plus spacieuses, plus grandes et avoir un plus gros budget. Donc pour moi tant que ça reste dans cet esprit là, je trouve cela plutôt sain. Mais il ne faut pas que ça devienne une « pompe à fric ». Et là ca devient autre chose…
Femâles : Tout dépend des groupes… mélanger un peu les styles pour toucher plus de monde ce n’est pas idiot mais il faut rester un minimum cohérent sinon l’attrait de l’affiche et l’ambiance du concert risquent d’en pâtir. Et il y a des mélanges qu’il ne faut pas faire !
Favete Linguis : Pour l'organisateur, c'est parfois nécessaire. Y'a aucun intérêt à faire ça pour une salle de 900 personnes mais pour un Hellfest qui regroupe plus de 20 000 personnes par jour, c'est obligatoire. Tu ne peux pas faire un truc de malade si t'es trop fermé. J'y ai pourtant cru moi-même au départ, crachant sur l'éclectisme comme un juif cracherait sur la Mecque, mais faut pas se leurrer. On n’a pas les moyens dans notre scène, pour faire le malin.
Par contre en salle, si c'est juste pour faire de la maille, ouai c'est lamentable mais c'est le business, c'est au public de choisir de pas se faire piner, pas à moi en tant qu'orga. Quand j'ai fait jouer Vital Remains, y'avait un groupe d'ouverture qui faisait du Doom ("Sludge"). Les gars étaient adorables, la musique bien pêchue, mais ça n'avait rien à voir. Le plateau était proposé comme ça et je n’allais pas cracher dessus. Parfois t'as juste pas le choix et ça vient d'en haut. Pour te répondre simplement, oui ça m'emmerde royale sauf si c'est pour une connerie genre Dance / Grind.
Maleifice Propaganda : Dans mes gouts, j'ai toujours été éclectique. Une soirée avec 4/5 groupes que Black Metal ou Indus ou autre c'est un peu lourd à force même si les groupes sont de bonnes qualités. Mais ce que je préfère c'est un bon groupe suivi d'un groupe de merde, ainsi de suite, comme ça j'ai le temps d'aller me faire payer des verres!
LCDC : Je trouve ça plutôt bien. Les temps sont durs et c'est pas facile de faire bouger les gens qui préfèrent regarder les conneries sur TF1 le vendredi et samedi soir. Et si je dis ça c'est une réalité ! À en causer avec diverses asso. Après cela dépend aussi de la politique de la soirée ou du festival. Pour ma part, j'aime autant une soirée thématique dans les styles se rapprochant ou au contraire pas du tout !! Je pense par exemple au cassoulet show qui brasse 2 mondes différents si je puis dire, et ça en 2004 c'était loin d'être à la mode ! Je dirai plutôt casse gueule à souhait ! Sauf que nous on n’a pas attendu que ça devienne une putain de mode à la con et penser faire des thunes dessus. La question n'était même pas là.Du décalé, de l'artistique et de l'humain.
Maintenant, tu peux voir (en prenant un exemple) du côté de chez nous (cet été), au Free Music Festival, la programmation des groupes Ultra Vomit et Gojira dans ce Festoch qui n'a jamais programmé de Metal auparavant. Ou encore le Gomorah à Bordeaux avec des trucs à la con (une chanteuse qui chante papillon lumière je ne sais pas quoi, passe partout de fort boyard) et des groupes de Metal réputé dans leur style respectif : Destinity, Nightmare et Inhumate. Ca par contre je trouve ça bien limite... je n’ai pas vraiment compris l'essence du festival...
Après je ne sais pas si c'est vraiment une mode, mais d'un côté ça permet aussi d'ouvrir les portes de certains styles et de changer les mentalités. Le fait de découvrir ce que l'on ne connait pas, ou bien même anéantir certains préjugés que l'on peut avoir au départ sur tels ou tels groupes et style.