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Parfois il y a des coups de cœurs qui s’expliquent par la plus affreuse banalité.
ADDU m’a tout d’abord franchement interpellé par son identité graphique, un peu comme l’achat motivé par l’esthétique d’une couverture qui te parle, qui t’attire, sans trop que tu saches pourquoi. Non pas qu’ici nous nous trouvions face à un chef-d’œuvre artistique, simplement, l’harmonie du logo en contraste avec la brumeuse pochette m’a immédiatement affûté la rétine, et l’écoute devait aller plus avant. Les couleurs me plaisent, le contenant laisse présager le contenu.
Et je ne m’y suis pas trompé.
Pour l’état-civil, ADDU, c’est un projet basé dans l’hexagone, développé par ses deux têtes pensantes, Detox, en charge du mix des grattes et des voix, et Pins s’occupant des beats et des synthés, pour la musique, et de l’artwork, pour le visuel. A lire ce paragraphe vous l’aurez compris, ADDU officie un minimum dans l’électronique, reste à savoir de quel metal le gaillard est forgé.
Bizarrerie, en dehors des étiquettes, ADDU est un casse tête de chroniqueur. Car s’il évolue au delà d’un style immédiatement identifiable, il reprend les codes d’un panel très varié d’influences, ne se les réapproprie pas, sait faire preuve de créativité, bref, c’est comme si vous vous trouviez face à un groupe bouffi d’influences, mais qui jouit d’une identité propre.
Soyons pragmatiques et attachons-nous à du concret voulez-vous ? ADDU mise nettement sur une musique synthétique, en des terres où les guitares doivent s’adapter aux sons sursaturés, aux sonorités étouffantes, qui abordent le shoegaze sans pour autant le tutoyer. En somme, la mélodie, les accords se trouvent noyés dans une sorte de magma sonore que seule l’oreille attentive parviendra à appréhender. Tout cela paraît obscur et pourtant, ADDU, une fois son hermétisme enjambé, parvient à happer l’auditeur.
Tandis que le profane n’y verra qu’une sorte de courant bruitiste et peu intelligible, l’oreille amatrice entendra un beau mix d’influences, ces dernières au service d’une cohésion parée à toute critique. Les sons sont distordus à outrance, les claviers s’expriment sans en faire trop, renforcent l’hypnotisme de la musique du duo.
En substance, ADDU officie dans un registre aux frontières d’un electro ténébreux qui rappelle les premières heures atmosphériques d’un Ulver, avec ce qu’il faut de voix lointaines, de guitares distantes et d’ambiances sombres. Autour de cela s’articule une rythmique fouillée mais pas indigeste qui cadence agréablement les morceaux, les berce presque, le tout dans un format relativement court pour le style, qui évite ainsi l’écueil de l’overdose. Une vraie unité se dégage de cet album éponyme, qui navigue entre lumière et obscurité, entre énergies organiques et vibrations urbaines, très metal parfois, quasiment martial (Tornado), plus atmosphérique, souvent (Raiser of Storm, son début dans une lignée directement (trop ?) 'Townsendienne' et ses grincement finaux qui rappellent le frisson d’un Procession of the Dead Clown de Blut Aus Nord).
La grande force d’ADDU est donc cette propension à proposer une musique dans le fond très variée, tout en restant unitaire dans la forme, qui préserve la cohésion et évacue la lassitude, aborde des accents shoegaze, des structures que n’aurait pas renié Ulver (particulièrement frappant sur Christ, qui est secondée par l’intervention vocale de Vagina Vangi a.k.a. VGNV), un traitement de son qui rappelle ponctuellement ce que propose Devin Townsend, bref les influences avouées et palpables sont flatteuses, leur modelage réussi.
Pour conclure, ADDU signe un premier album particulièrement élégant, qui témoigne d’un professionnalisme bluffant pour un groupe si jeune. Un gros travail a été effectué sur l’ensemble du produit, que ce soit dans son visuel ou dans la multitudes de détails qui jalonnent les titres de cet éponyme, qui font de cet EP une franche réussite, tout juste ne restera-t-il, mais ça c’est vraiment chipoter, à se libérer davantage encore des maîtres à penser afin d’exister pleinement sans souffrir d’inévitables comparaisons.
1. Shelter
2. Tornado
3. Eye
4. Thunderstorm
5. Cloud Wall
6. Raiser of Storms
7. Christ (ft. VGNV)