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Au détour de pérégrinations virtuelles, je suis tombé là-dessus. Un peu en mal de découverte peut-être, je lance le morceau en ligne et ça m’interpelle. Je me renseigne, je me rends compte que c’est français, et que bordel ça existe quand même depuis 6 piges. J’achète.
Smohalla, c’est un trio basé en PACA, une démo, un EP et un split jusqu’à ce premier full-length pondu en 2011. Résilience, c’est aussi 8 titres et trois-quarts d’heure de musique intense, dense et foisonnante d’idées, directement inscrite dans l’avant-garde black metal, aux influences assez prononcées, mais qui sait s’affubler d’une identité propre.
On perçoit l’aura de Smohalla dès son morceau d’ouverture sans pour autant savoir immédiatement vers quoi nous emmènera Résilience, et cet aspect ne se démentira pas d’un bout à l’autre de la livraison intéressante à bien des égards. Smohalla, c’est un peu un pêle-mêle de ce qui ce fait de mieux dans ce que l’on qualifie de Black Metal d’avant-garde. Les sonorités du trio caressent le shoegaze, épousent les formes d’un Ulver période Blood Inside, rendent franchement hommage à un Arcturus au meilleur de sa forme, sans pour autant négliger un solide background Black Metal plus traditionnel, dans sa conception symphonique, et old-school s’entend. On navigue à l'aveugle, on croise de l'orchestral grandiloquent, l'arpège intimiste, la rage contenue.
Assez étonnant et gavé de relief, Résilience est le témoin d’une musique protéiforme, particulièrement chargée en atmosphères, qui rappelle là encore les meilleures heures du shoegaze, qui passe de l’explosion décomplexée à la musique d’ambiance avec aisance et style, sur fond de production quasi-monocorde ce qui dessert l’objet autant qu’il le hisse vers le haut.
Là encore, et comme souvent dès lors qu’il ‘agit de musique avant-gardiste, votre ressenti sera le seul juge pertinent face à Résilience, qui est un peu trop noyé sous des choix sonores peut-être trop monolithiques pour en distinguer toutes les nuances. L’inconvénient d’une qualité, ou la qualité d’un défaut, c’est selon. Car la musique est ici acrobatique, les courbes sont irrégulières, les rythmes, libérés.
Le magma sonore est explosif mais presque sursaturé, les claviers et les guitares se fondent, la basse se développe seule et loin, les cris succèdent aux murmures nimbés d'une reverb caverneuse, on sait que chaque structure est pesée, on sait que l’on a en main une richesse savante de composition, mais l’oreille inattentive sera happée et distraite par cette décharge de sons pas assez tranchés pour rendre justice à l’intelligence profonde qui anime Smohalla sur Résilience.
Pour autant, et pour peu que vous ne soyez pas rebutés par la production qui définitivement divisera ici, sachez que vous trouverez en cet opus un album rare et noble, qui redonne sa lettre capitale au terme de Création, tant ici tout n’est que nuance, délicatesse, virulence et émotion. Enigmatique mix de black metal qui rappelle par certains riffs les grandes heures du Prometheus d’Emperor, de shoegaze et de progressif, Smohalla pâtira d’un certain hermétisme uniquement dû à son orientation sonore, que je trouve aussi pertinente que gâchée. Pertinente en ce qu’elle me séduit complètement, et gâchée en ce qu’elle ternira le plaisir de certains d’entre nous, qui lâcheront l’objet sitôt balancé dans les feuilles, faute d’une production plus touffue.
Ce serait dommage de vous en arrêter à cela, et je vous invite mille fois à forcer l’écoute, briser l’écorce et vous plonger dans l’univers obscur, émotionnel à t’en tirer les larmes parfois, souvent violent à t’en faire bouffer la terre entière et toujours atypique, de Smohalla et de son Résilience, qui prouve qu’il a encore beaucoup à dire, précurseur d'un carrière que l'on espère longue.
1. Quasar
2. Au sol des toges vides
3. Le repos du lézard
4. Oracle rouge
5. Marche silencieuse
6. L'homme et la brume
7. Aux milles Dieux
8. Nos sages divisent