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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Stephan Forté

The Shadows Compendium

LabelListenable Records
styleNeo-Classique Instrumental
formatAlbum
paysFrance
sortienovembre 2011
La note de
U-Zine
7.5/10


U-Zine

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Un résumé de ténèbres…décombre malsain d’un univers particulièrement porté vers l’occultisme et la noirceur que chacun porte en nous.
The Shadows Compendium…métaphore visant à englober et regrouper les arts sombres de notre culture, qu’ils soient littéraires, musicales, picturales ou cinématographiques.

Du haut de ses plus de quinze ans de carrière au bout de ses doigts virtuoses qui n’en finissent plus de dévaler les notes sur son manche, Stephan Forté, toujours autant occupé avec Adagio, a enfin pris le temps de concrétiser son projet solo, mis entre parenthèses depuis le demo Visions en 1996.
Il est donc aujourd’hui le temps de découvrir le précieux sésame de l’un des meilleurs guitaristes hexagonaux, féru de technique mais aussi de feeling, et dont l’expérience et le talent ont depuis bien longtemps explosé les barrières des frontières.

Accompagner d’invités aussi prestigieux que Jeff Loomis (ex-Nevermore), Glen Drover (ex-Megadeth) ou encore Mattias IA Eklundh (Freak Kitchen) mais aussi de musiciens plus confidentiels dont Stephan est personnellement un grand admirateur (Daniele Gottardo, Derek Taylor), The Shadows Compendium se présente comme un album ambitieux et techniquement de très haute volée.

Et en effet, le morceau éponyme et De Praestigiis Daemonum sont techniquement monstrueux, très rapides avec de multiples soli qui offrent à l’auditeur un festival de notes dans une ambiance néanmoins beaucoup plus sombre, parfois presque démoniaque, que les albums instrumentaux du genre. De Prastigiis Daemonum nage en plein océan neo-classique et se partage entre beauté et noirceur, tentation et soumission, avec un jeu rythmique qui n’est jamais laissé de côté vis-à-vis des soli. Au contraire, entre les riffs et une section rythmique basse/batterie intraitable, l’ensemble a vraiment été peaufiné à l’extrême.
The Shadows Compendium évoque quant à lui plus distinctement le culte The Glass Prison de Dream Theater, particulièrement dans son entame ambiancé, montant rapidement en puissance pour exploser sur cette production grasse, épaisse et écrasante.
Mais limité cet album à une déferlante de technique sans âme serait sous-estimé le talent de composition du génie français.

On pourra certes reprocher de tomber parfois dans une certaine démonstration, mais le fait est que Stephan a énormément peint de paysages différents, de reliefs et de climats musicaux allant de l’aride au plus sensuel, voir presque charnel. L’exceptionnelle Improvition on Sonata qui clôt le disque en est la preuve. Reprise d’une sonate de Beethoven, le morceau est une unique prise, capturée sur l’instant présent, ce qui passa par la tête et le cœur du guitariste au moment même où il le joua. Il en ressort une émotion à fleur de peau, une sensation de mise à nu, d’un musicien vidant son âme sur une composition à la fois belle et sombre, beaucoup plus mélancolique que le reste du disque, pour ne pas dire qu’elle provoque un certain sentiment de dépression pour terminer l’écoute. Elle témoigne avant tout de l’intelligence du guitariste à ne pas tourner en rond et à ne pas rechercher la perfection mais avant tout le feeling, l’esprit, l’émotion…

Spiritual Bliss arpente les même sentiers, privilégiant le fond à la forme, et pouvant se rapprocher ici du "Octavarium" de DT ou encore du feeling qui parcours le premier disque solo de Kiko Loureiro (No Gravity), c’est-à-dire mid tempo, technique mais très mélodique et servant une mélodie de base ensuite triturée sous de multiples angles. La partie de batterie du morceau est également des plus intéressantes, très tribales, jouant avec les toms, dans une ambiance shamanique certaine.

On ne peut objectivement rien reproché à ce disque, disposant des qualités d’Adagio sans les quelques défauts que l’on avait dernièrement, c’est-à-dire un vocaliste souvent en décalage et en cruel manque de personnalité (chose qui changera avec l’arrivée du génial Kelly Carpenter au micro).
Mis à part un I Think Tthere’s Someone in the Kitchen très étrange, partagé entre idées et un certain ennui, le reste du disque ne souffre véritablement d’aucunes tares.
L’introduction de Sorrowful Centruroïde, très « cow-boy », n’aura pas manqué de me faire penser à l’esprit du « Atomic Playboys » de Steve Stevens, avant qu’un mur de son redoutablement moderne ne vienne littéralement nous broyer en morceaux, avec des accélérations proche du blast. Quant à l’ambiance beaucoup plus sombre et ritualiste de Prophecy of Loki XXI, elle est un peu la suite du R’lyeh the Dead et Codex Oscura, avec une influence gothique très marquée, des soli redoutablement rapides et sublimes de poésie, un piano nocturne et glauque à souhait et une atmosphère horrifique et fantastique digne de Lovecraft. On tient probablement ici l’un des grands sommets de l’album, d’un point de vue musical et technique.

Stephan Forté s’est donc complètement lâché avec cet album, se livrant comme il en avait envie, sans faire de concession ni réagir vis-à-vis de ce que les gens pourraient dire de la démarche. Il s’agit d’un album fait par lui et pour lui et cela s’entend, particulièrement sur ce dernier morceau unique et courageux, qui ne sera pas forcément toujours compris mais qui montre combien Stephan est un homme passionné. On regrettera peut-être un manque plus important de prise de risque et, à l’heure où cela redevient une « habitude » de réaliser des albums solo, il est probable que ce The Shadows Compendium peine à complétement d’extirper de la masse actuelle des albums de guitares. Il y manque ce petit quelque chose qui aurait rendu cet album instrumental unique dans le genre, comme l’avait réalisé Kiko Loureiro (Angra) justement avec son premier disque. Néanmoins, il sera idiot de ne pas boire abondamment les notes qui coulent à travers ce disque…les fans s’y retrouveront sans aucun soucis…les autres apprécieront, mais y verront plus une curiosité luxueuse en attendant le véritable prochain plat de consistance…prévu pour l’année prochaine.

1. The Shadows Compendium
2. De Praestigiis Daemonum
3. Spiritual Bliss
4. Duat
5. Sorrowful Centruroides
6. Prophecies of Loki XXI
7. I Think There’s Someone in the Kitchen
8. Improvisation on Sonata