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Tout faire tout seul n'est pas chose aisée et un pari risqué. Mais parfois un esprit, un compositeur, une vision sans compromis permet d'obtenir un produit proche de la vision de son auteur. Et lorsque l'on est pétri de talent, le résultat est un album bluffant. Demians est donc le bébé de Nicolas Chapel qui l'a fait surgir de son esprit musical et visuel. Building An Empire est une représentation de sa vision de la musique et de ce qui l'entoure : il s'est occupé de l'artwork. Le digipack est sobre et pourtant plein de sens : des couleurs sables et une illustration minimale, un homme sur une pile de chaises en équilibre. On ne peine pas à trouver le lien entre le titre de l'album et ce visuel d'une finesse aboutie. La sobriété se retrouve à tous les étages sur l'album : pas de production pharaonique, ou d'invités-cautions super prestigieux. Non, juste des guitares, une batterie et un chant.
Le son, fait à la maison, est posé, travaillé pour soutenir les ambiances et en rock progressif, il est bon de trouver le réglages pour bien enfoncer le clou tant les variations sont présentes et pleines de sens. Globalement Building An Empire, album dont je dois l'avouer le concept m'échappe un peu, est un monument pour les fans de progressif plutôt calme. Ici c'est l'acoustique et ce sont les arpèges qui prennent le pas sur les explosions électriques pourtant bien présentes. Et quand on écoute Sapphire, on comprend bien que les plus excités peuvent passer leur chemin tant l'énergie est contenue pour mieux être maîtrisée.
Certains iront même jusqu'à trouver certains couplet cheesy à souhait comme celui de Naive, mais on peut leur répondre qu'ainsi va le progressif mâtiné de rock. En écoutant l'album, vous vous rendrez compte qu'il n'y pas de d'unité en ce qui concerne la longueur les morceaux, et il est donc presque impossible de savoir ce qui vous attend après. L'art de la surprise est maintenu, de plus on peut trouver une certaine continuité entre les pistes, à base de sons électro entre Temple et Empire par exemple, ou imitant des cordes comme entre Shine et Sapphire. Empire est d'ailleurs un titre qui sort du lot puisqu'il repose sur une rythmique électronique et la voix de Nicolas Chapel et des canons et ne cède que peu de place aux instruments classiques. Amusant d'imaginer d'ailleurs un homme tout seul assurer son propre doublage. Et nous voilà devant une chanson pesante et remplie d'émotion, basée sur l'ambiance et pourtant prenante. Elle est surtout reposante avant la dernière pièce de choix : Sand et ses seize minutes. Il fallait bien sûr s'attendre à un de ce que les connaisseurs appellent une morceau épique.
Le crescendo est tout en retenue, puis la vague redescend. L'homme-orchestre a la mainmise sur le tempo et n'agresse jamais son auditeur avec des dissonances ou des sons sortis d'on se saurait où. Le timbre de sa voix est doux et ne monte presque jamais, Chapel chante bien mais ne fait pas de grandes prouesses vocales. Et c'est là où l'on sent qu'être seul à composer est un avantage, on est sûr de ses capacités. Certes on ne les transcende pas mais on les met à profit, on les exploite comme bon nous semble. Et il a déjà beaucoup de travail avec ses instruments.
De son propre aveu, il n'a pas de ligne directrice en terme de musique, il n'a aucune frontière. Tant que ça lui plaît, il y va. Alors ce sont jazz, prog, rock, pop, métal qui se croisent ici, toujours en bonne entente. Souvent la technique relève le tout, mais c'est le feeling qui domine, afin que tout passe comme une lettre à la poste. Demians n'est pas un groupe pour en mettre plein la vue mais plutôt pour captiver et traverser les émotions. On passe d'une tristesse mélancolique avec Unspoken, balade plutôt sombre, à une plénitude presque spatiale avec Sapphire en passant par une joie enfantine en écoutant le bonus du digipack : Earth.
Building An Empire est un album époustouflant. En choisissant de travailler seul, Nicolas Chapel a optimisé son talent en se sortant des contingences de la communauté, mais il sait partager puisqu'en live il est accompagné de musiciens qui savent retranscrire sa pensée. Cet album au tempo assez lent est parfois méditatif et fait parfois appel à nos émotions enfouies. En tous cas, il a remué assez de choses pour que Steven Wilson de Porcupine Tree en dise le plus grand bien. Et ce n'est pas donné à n'importe qui.
01. The Perfect Symmetry - 09:19
02. Shine - 03:17
03. Sapphire - 07:17
04. Naive - 04:54
05. Unspoken - 05:59
06. Temple - 03:04
07. Empire - 06:32
08. Sand - 16:09
09. Earth (ltd edition bonus track) - 08:49