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Album

14 juillet 2024 - S.A.D.E

Insect Ark

Raw Singing Blood

LabelDebemur Morti Productions
styleDoom / Drone / Avant-garde
formatAlbum
paysAllemagne
sortiejuin 2024
La note de
S.A.D.E
8/10


S.A.D.E

Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse

Fondé en 2011 par Dana Schechter, Insect Ark construit patiemment son œuvre. D'abord projet solo, puis duo avec le passage de plusieurs pointures au poste de batteur (aujourd'hui occupé par Tim Wyskida de Khanate), Insect Ark tisse une musique à la fois intime et puissante. Plusieurs labels prestigieux ne s'y sont pas trompés, le groupe étant passé par Profond Lore et Consouling Sounds, et finalement sur Debemur Morti pour ce nouvel album, le quatrième.

Si l'on tente de circonscrire la musique d'Insect Ark, il faudra nécessairement faire usage des termes doom, drone et avant-garde. Celui d'expérimental n'est pas non plus de trop. Et, avant la sortie de ce Raw Blood Singing, il aurait également fallu accoler l'adjectif instrumental. Ce qui n'est plus le cas désormais, puisque Dana Schechter fait entendre sa voix chaude et profonde, à la fois envoutante et menaçante. Raw Blood Singing propose donc la matrice générale dans laquelle évolue le groupe depuis ses débuts, agrémentée d'un chant qui ajoute une couche de cet étrange désespoir optimiste propre à sa musique. Depuis que je l'ai découvert avec l'album Marrow Hymns, je n'ai jamais pu me défaire de cet oxymore de désespoir optimiste lorsque j'écoute cette musique : on évolue au sein de nappes noires et épaisses, parfois enchevêtrées, et pourtant il y a toujours la sensation d'une issue, d'une échappatoire vers quelque chose de plus lumineux. Cet étrange paradoxe tient au son de la lap steel guitare utilisée par Schechter qui, combinée à une basse tout en volume, écrase autant qu'elle élève.

Si, en lisant jusqu'ici ces lignes, vous avez la sensation qu'il peut être difficile d'entrer dans l'univers d'Insect Ark (les termes avant-garde et expérimental peuvent rebuter), sachez qu'il n'en est rien. Le duo déploie ses compositions à tiroirs sans effets démonstratifs, mais plutôt avec une sorte d'évidence sinueuse, comme si le parcours ondoyant que l'on suit n'est en réalité que le seul qui existe. Les parties de batterie de Tim Wyskida, à la fois structurantes et dans une forme d'attente, nous guident au travers du paysage étrange que proposent guitares et synthétiseurs. Il y a quelque chose du psychédélisme flottant du Earth récent dans la musique d'Insect Ark mais dans une version noire et grondante. Disons que l'on a parfois l'impression du dépouillement de Earth, alors qu'à d'autres moments, c'est presque une surcharge à laquelle on fait face. Et cette dualité peut tout aussi bien être distillée sur la longueur d'un morceau qu'en une fraction de seconde.

Les sorties précédentes d'Insect Ark avaient déjà toute mon attention. Ce nouvel album confirme et renforce mon intérêt pour le groupe : l'ajout du chant est à la fois maitrisé et pertinent, la construction instrumentale est toujours aussi originale et réussie. Raw Blood Singing est peut-être même plus facile à suivre et à intégrer que les albums antérieurs du fait précisément de la présence de la voix, qui nous permet de nous raccrocher à une présence humaine dans un territoire en partie désolé.

Tracklist de Raw Blood Singing :
01.Birth of a Black Diamond
02.The Frozen Lake
03.Youth Body Swayed
04.Cleaven Hearted
05.The Hands
06.Psychological Jackal
07.Inverted Whirlpool
08.Ascension