Punkach' renégat hellénophile.
Varathron n'a pas obtenu la renommée d'un Rotting Christ, mais fait tout autant partie de la flopée de groupes qui a forgé, au tournant des années 90, le black metal dans son interprétation hellénique. Une sonorité reconnaissable entre mille, faite de riffs secs et saccadés et de grognements ; une manière de composer contemporaine de la grande flambée norvégienne, mais qui a su s'en démarquer pour, au final, bien mieux vieillir. Varathron nous a offert de vrais morceaux de bravoure dans cette époque lointaine où l'internet tout public tenait du concept abstrait. Comme un His Majesty at the Swamp qui vaut encore tous les Dark Medieval Times. Le groupe grec se perdra un peu dans les kitscheries au tournant des années 2000, mais ce fut pour mieux nous surprendre avec un splendide Patriarchs of Evil en 2018. Restait à renouveler l'expérience avec The Crimson Temple, pour lequel mes attentes étaient logiquement au plus haut.
Cela démarre d'emblée fort bien avec une intro laissant une belle place aux instruments traditionnels – on réalise rarement à quel point la cornemuse est à sa place en Méditerranée. Varathron continue de professer un black metal immédiatement identifiable comme hellénique, enrichi de nappes de clavier qui lui donnent des sonorités de film d'horreur rétro pour cinéphile enragé, façon Hammer Film Productions sur « Crypts in the Mist » et son solo distordu final. Juste le temps de changer la pellicule et de refaire le plein d’hémoglobine et on enchaîne sur « Cimmerian Priesthood », dominé par un Necroabyssious qui éructe comme une liche dont le mausolée aurait subi une infestation fongique.
The Crimson Temple est un album au charme bien particulier, rétro dans ses compositions, sans pour autant virer dans un tableau oldschool trop forcé, et qui risquerait donc de virer au gimmick. Au contraire même, ses racines qui puisent dans le très ancien black metal lui permettent de surprendre d'une piste à l'autre, comme une perle oubliée du cinéma de genre qui arriverait à nous prendre à la gorge, précisément car elle n'appliquerait aucune des tropes éculés des blockbusters contemporains. Et pourtant l'ensemble est superbement soigné, sans rien laisser au hasard. Des claviers discrets mais omniprésents, à la guitare hyperactive sur « Immortalis Regnum Diaboli », en passant sur les cloches de « To the Gods of Yore » ; tout est très exactement à sa place. Jusqu'à un morceau final aux faux airs de Bathory des rives de la mer Ionienne. Trente ans après son premier opus, Varathron prouve sans se forcer que son feu brûle toujours.
Tracklist :
Ascension
Hegemony of Chaos
Crypts in the Mist
Cimmerian Priesthood
Sinners of the Crimson Temple
Immortalis Regnum Diaboli
To the Gods of Yore
Shrouds of the Miasmic Winds
Swamp King
Constellation of the Archons