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Album

15 octobre 2023 - ZSK

Vorna

Aamunkoi

LabelLifeforce Records
styleMetal 100% finlandais
formatAlbum
paysFinlande
sortieavril 2023
La note de
ZSK
8/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

Il y a quatre ans avec Sateet Palata Saavat, nous avions découvert en Vorna le plus finlandais des groupes finlandais. Avec le quatrième album du groupe, il n’y a pas de raison que ça change, bien au contraire. Parti d’un doom/pagan-black sur ses deux premiers albums, le combo de Tampere a ensuite bien vite embrassé la voie d’un metal plus mélodique typique de toutes ces formations scandinaves très mélancoliques, au son aéré et glacial, tel le lever du soleil éclairant un paysage enneigé. Finlandais par tous les pores, le metal pratiqué par Vorna et consorts est presque difficilement exportable tant il est typique des contrées nordiques bardées de lacs, peu facile à aborder si l’on est pas finnophone. Mais vous savez, le metalleux moyen aime bien se mettre dans la peau des vikings du Grand Nord… même si ici, il se met plutôt dans la peau du finlandais moyen un brin dépressif, mais qu’importe. Du moment qu’on se laisse porter, qu’on a un peu d’imagination à défaut de pouvoir se payer des vacances en Finlande, l’art de Vorna fonctionne. Aamunkoi (pour… « aurore », le lever du soleil sur la neige, que je disais) va donc faire de nouveau office d’Office du Tourisme de la République de Finlande. Et même encore plus que pour Sateet Palata Saavat, même si les équilibrages vont encore un brin évoluer telles les quatre saisons.

Inutile de préciser alors qu’il va falloir à nouveau un peu rouler sa bosse en finnois, utiliser un traducteur à défaut d’avoir envie de se faire une session sur Duolingo. C’est sûr qu’il faut avoir de la bouteille pour comprendre ce que veut bien signifier un morceau comme « Harva Päättää Hyvästeistään », qu’on ne risquera pas à prononcer par ailleurs (ça veut dire « Rares sont ceux qui décident de dire au revoir » - et oui, je sais me servir d’un logiciel de traduction). Donc Aamunkoi est, sans surprise, un album interprété à 100% en finnois. Mais même si tout le monde n’adhèrera pas, la langue rend toujours bien pour ce genre de metal. D’autant que l’on remarquera bien vite une particularité de Aamunkoi, c’est que le chant clair de Vesa Salovaara prend une grande importance par rapport aux albums précédents, et gagne même en qualité, portant alors pas mal de refrains ou d’envolées émotionnelles ou accrocheuses. Le chant black n’est jamais loin de toute façon, et demeure convaincant, reléguant encore bien loin les râles lassants de Ei Valo Minua Seuraa. Vorna aère donc encore sensiblement son propos, proposant encore plus de passages assez « sympho » et même des incursions à tendance folk – toutefois seuls des synthés sont crédités. On pencherait un peu vers du Amorphis, grossièrement parce que Vorna demeure assez inclassable (la toile dit que c'est « folk » mais on dira plutôt que c'est parce que c'est du « folklore » finlandais d'une certaine manière) et même assez difficile à étiqueter (doom ? black ? mélodeath ? sympho-goth ? tout et rien à la fois), avec toujours un côté Moonsorrow en (beaucoup) plus direct. C’est du metal épico-mélodique finlandais, tout simplement, à l’instar de leurs compatriotes de Kaunis Kuolematon et de tout le line-up local du festival SaariHelvetti.

Le résultat, c’est un album dans la lignée de Sateet Palata Saavat, en encore mieux produit – à contrepied de pas mal de groupes scandinaves qui reviennent parfois à quelque chose de plus organique – et encore plus enlevé, et même plus… tubesque. C’est bien simple, hormis les deux morceaux de milieu d’album très atmosphériques que sont « Kallioilla » et le bien épique « Muualle », tous les morceaux de Aamunkoi sont autant de tubes potentiels. Quitte à ce que l’album soit très homogène et qu’il en est difficile de déterminer un véritable hit. Cela reste donc à l’appréciation de chacun, mais le départ sur « Hiljaisuus ei Kestä » est déjà plus que formidable ; « Raja » tire également pour ma part son épingle du jeu, même si certaines sonorités héritées de Sateet Palata Saavat (style les « cloches de Noël » d’un « Maa Martona Makaa ») demeurent un brin kitsch. Mais entre le côté plus « folk » à la Amorphis d’un « Valo » et les accroches latentes de morceaux comme « Harva Päättää Hyvästeistään », « Aika Pakenee » ou « Meri », on en a pour ses Euros frappés du lion héraldique, des cygnes et des fleurs de lakka. Les compos, même si ce ne sont pas vraiment les riffs qui retiennent l’attention, sont inspirées ; et comme je le disais la partition vocale de Vesa Salovaara est maitrisée et entraînante tout du long, chant extrême comme clair, même si le karaoké potentiel se fera au niveau expert. Finlandais jusqu’au bout des ongles, Vorna évolue dans un quasi microcosme musical auquel il faudra adhérer, jusqu’au final-titre flamboyant de cet album tout de même très enivrant. On aimera ou pas la démarche, qui n’est presque pas faite pour l’international. Parfois too much dans certaines élucubrations symphoniques et épiques finno-finlandaises, avec des synthés parfois dégoulinants au mix agressif, Aamunkoi montre aussi que Vorna doit encore un peu se tempérer (même s’il vient de Tampere, lolilol) car la frontière du kitsch et de la surabondance de clichés n’est pas très loin. Mais même si Sateet Palata Saavat avait pour lui de meilleurs hits, Aamunkoi est un album très rafraîchissant et surtout très beau, à l’apparat 200% finlandais assumé finalement très convaincant. De quoi se retrouver à se baigner à moitié nu dans un lac à 4°C sans avoir compris comment on est arrivé là.

 

Tracklist de Aamunkoi :

1. Hiljaisuus ei Kestä (5:07)
2. Harva Päättää Hyvästeistään (3:49)
3. Valo (4:12)
4. Aika Pakenee (6:07)
5. Kallioilla (3:56)
6. Muualle (5:10)
7. Raja (4:34)
8. Meri (5:20)
9. Aamunkoi (5:47)

 

 

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