Death metal et science-fiction : une oreille dans les étoiles, une autre dans les enfers.
C’est le genre de nouveauté qui restera à coup sûr dans l’ombre d’autres sorties black metal de cette année 2023. Mais pas question pour autant de jeter aux oubliettes Blight Year, deuxième album d’Anti-God Hand, projet solo de Will Ballantyne, toutefois épaulé pour l'occasion par Greg Fox (ex-Liturgy) à la batterie.
Premier constat : encore plus que le premier album du projet (Wretch, 2021), Anti-God Hand pousse au maximum le côté candide et contrasté de sa musique. Un black metal rythmé par de petites phrases acoustiques et des envolées lyriques mid-tempo ; le tout sans se vautrer dans « l’extatique » comme Agriculture (groupe qu’on mentionnait dans la dernière série noire). Will Ballantyne finit par nous proposer un black metal écorché et énervé, mais toujours ultra-mélodique, qui nous fait penser à d’autres petites pépites underground récentes, Acathexis et Grandeur en tête.
On s’attendait depuis la sortie du seul et unique single de l’album il y a quelques semaines (« Barge of Light ») à ce qu’Anti-God Hand dépasse un nouveau plafond en terme de qualité de composition, et c’est chose faite. A commencer par l’incroyable « Chaoscene Hell » : ce riff palm-mute en guise d’intro, sur lequel débarque un lick de guitare aigu couplé à un cri tourmenté, peut-être la meilleure chanson de l’album. Elle-même suivie d’« Hyperincursion of the Theocentre », où un riff de basse simplissime se pose sur une nappe de trémolos majeurs le temps de parfaire l’immersion dans cet album si riche et créatif.
Les références au black metal américain récent sont néanmoins évidentes pour qui les connaît : il y a du Panopticon et du Wolves in the Throne Room dans les passages les plus martiaux, du Krallice et du Liturgy dans les phases les plus éthérées. On ne s’étonnera pas de voir LA tête pensante de Krallice, Colin Marston, ici créditée à la production et au mastering, en plus de la présence de Greg Fox derrière les fûts.
Notons enfin que Blight Year sort chez le petit label indépendant American Dreams Records, dont le catalogue ne contient pas vraiment d’autre nom metal que celui qui nous intéresse aujourd’hui. Constat révélateur de la posture duale de l'artiste ici : d'un côté une esthétique portée sur un genre structuré par les codes et l'imitation de ses pairs, d'un autre des thèmes concrets et personnels, à savoir le regard douloureux (mais optimiste) de Will Ballantyne sur le changement climatique qui continue de détruire le Canada où il vit.
Pas certain que ce deuxième album d’Anti-God Hand sorte de l’underground d’élitistes dont il est issu, mais si vous avez 35 minutes à combler d’ici la rentrée, et surtout envie de vous plonger dans ce que le black metal fait de plus créatif aujourd’hui, cet album est peut-être bien pour vous.
Tracklist :
1. Out of the Tunnels, Into the Heavens
2. Barge of Light
3. The Horde at the End of Language
4. Endless Brightness
5. Demon Sniper
6. Warped and Opalescent Swords
7. Chaoscene Hell
8. Hyperincursion in the Theocentre
9. Held