Punkach' renégat hellénophile.
Des groupes qui abordent la Guerre de Trente Ans (1618-1648 pour les cancres au fond), il n'y en a pas des masses : le seul qui me serait venu à l'esprit c'est Sabaton, avec son album Carolus Rex. Et dans son genre c'est un bon album, mais quand même, on parle d'un conflit qui a ruiné et ravagé l'Europe durant une génération, dépeuplant certaines régions de plus de la moitié de leurs habitants. J'aurais espéré quelque chose d'un peu plus extrême.
Et c'est chose faite avec Hâl, one-man band allemand – forcément, la mémoire de ces événements étant plus vivace outre-Rhin – porté par un certain Vandergrift qui nous offre ici son second album, Drei Dezennien. Et dès les premières notes, j'y retrouve la solennité, le fatalisme froid, que j'attendais pour évoquer la grande catastrophe d'un siècle de fer : les cloches de Prague résonnent, froides comme le glas, pour accompagner la chute des Allemands et l'arrivée de la mort. Cette caisse claire absolument glaçante sur « Die Glocke schlug zu Prag » me marque d'autant plus que je connais la ville ; je la vois d'autant plus aisément en flammes. Suivent les fameuses – et terribles - gravures de Jacques Calot, Les Grandes Misères de la guerre, avec « Von Schanz' zu Schanz' » pour rythmer ces visions d'horreur.
Le style est plutôt typique d'un black metal germanique ; on apprécie ou non. Les lignes de batterie sont un peu spéciales, très répétitives et sèches, et c'est apparemment un programme plutôt qu'un vrai instrument, mais fichtre hein. Le chant en allemand apporte quant à lui une touche supplémentaire à ces compositions qui nous content comment toute une génération – dans une époque pourtant déjà éprouvée – a été traumatisée par le long règne des Quatre Cavaliers de l'Apocalypse sur l'Europe centrale. La guerre bien sûr, mais aussi la peste et la mort qui suivent dans le sillage des reîtres ; pas d'héroïsme avec « Die Saat aus Pest und Tod », juste le déchaînement de toutes les violences et de toutes les plaies qui peuvent frapper une population.
Malgré son sujet, Drei Dezennien évite de sombrer dans la rage la plus basique et les coups de clairon. Cet album est sombre et lourd de bout en bout, c'est un joug sur les épaules des pions qu'alignent les princes, l'empereur et le pape sur un échiquier poisseux de boue et de sang. Il n'y a rien à célébrer, pas même la paix à Westphalie sur le quasiment mélodique « Wund das Land und Firmanent ». L'Europe goûte trop la cendre et la rouille pour rire avant longtemps. Elle se promet que c'était la der des ders. Un air connu.
Setlist
1. Die Glocke schlug zu Prag
2. Von Schanz' zu Schanz'
3. Des Zimmermannes Klag'
4. Knecht und Magd
5. Des alten Neiders Freud'
6. Die Saat aus Pest und Tod
7. Wund das Land und Firmanent