Non.
Otolithe : Anatomie. Concrétion minérale de l'oreille interne, qui sert à l'équilibration.
Tout(e) amateur(ice) de musiques doom et scènes affiliées aura forcément entendu parler de SubRosa au cours des années 2010. D'un point de vue personnel, l'album More Constant than the Gods aura été une immense révélation, qui a nourri mon amour des musiques lourdes et rêveuses autant qu'il a contribué à me forger une approche nouvelle de la musique. Peut-être bien que le groupe pourrait rentrer dans la catégorie de ceux qui ont changé ma vie. Plusieurs chants féminins auxquels s'ajoute parfois un growl puissant, deux violons qui ne cessent de se tourner autour, un doom aussi obsédant que poétique : voilà ce qu'était SubRosa... avant que le groupe ne se sépare en 2019, pour le malheur de beaucoup de fans qui avaient été séduits par la formule insolite du groupe de Salt Lake City.
Si Rebecca Vernon, frontwoman talentueuse, avait mis les voiles avec son projet The Keening, plusieurs des membres de SubRosa avaient annoncé qu'ils bossaient sur un nouveau projet. Aux mêmes postes, on retrouve donc Sarah et Kim (violon/chant pour toutes les deux) ainsi qu'Andy à la batterie, Levi passant ici de la basse à la guitare. C'est donc Sarah Pendleton qui reprend ici le chant lead, alors qu'elle assurait déjà les chœurs les plus prégnants dans le projet précédent. En 2020, la compilation Women of Doom laissait entrevoir ce que le groupe allait devenir avec le superbe titre « Bone Dust », qui a ensuite été retravaillé pour l'album. Le groupe apparaît par ailleurs, sur la compilation, aux côtés d'un single de The Keening, dont on reste depuis sans nouvelles...
Chassez le naturel et il revient au galop : il y a fort à parier que tous les titres vous fassent penser au moins une fois à SubRosa. Il n'y a rien de mal à cela, car cela laisse la porte ouverte vers un style qui n'existerait pas sans ces musiciens. Des boucles de guitare lancinantes enrobées de la rondeur de la basse. Des violons en question réponse, bourrés d'effets et de pédales, parfois en pizzicato pour créer des ambiances hypnotiques à souhait. Des chants maîtrisés dont il manque encore parfois quelques élans pour créer des lignes qui sonnent véritablement « lead ». Cela dit, cette retenue teintée de simplicité fonctionne à merveille... Côté compo, on lorgne parfois d'un côté plus abrupt qui peut rappeler Cult of Luna dans les constructions (« Andromeda's Wing »), parfois vers des sphères plus éthérées qui font un bien fou à cette scène. On remarque par ailleurs que le son de Folium Limina est quand même très proche de ce que pouvait proposer SubRosa à l'époque, en jouant sur les mêmes équilibres. C'est ce son si particulier qui donne l'impression de s'enfoncer dans un cocon aussi anxiogène que doux. C'est ce son qui m'a fait venir et me fera revenir vers The Otolith.
On retrouve également un clin-d’œil à la fiction, notamment satirique, comme SubRosa l'avait proposé par le passé. Pour le coup, The Otolith a choisi d'utiliser le fameux discours de The Great Dictator (de Charlie Chaplin) pour clore « Bone Dust ». Sans doute bien des projets musicaux ont déjà utilisé ces paroles poignantes dans leur musique, mais j'en connaissais surtout la version de Nordic Giants sur « Mechanical Minds », qui m'avait retournée. Ainsi, il est vraiment étonnant de retrouver ce discours accompagné d'une toute autre bande-son, bien plus désespérée et pesante chez The Otolith. Toujours est-il qu'on ne peut pas leur reprocher d'utiliser ce sample lourd de sens. Difficile, pourtant, d'y voir clair dans les thématiques abordées sur Folium Limina. Le titre indique une approche de la conscience, de la nature et de l'univers qui nous entoure, et les morceaux semblent également aborder des thèmes comme le deuil, la paranoïa et les rêves, mais cela reste bien flou.
J'ai finalement pour espoir de voir The Otolith gagner un peu plus en cohérence et en singularité, car le groupe est porté par des musiciens extrêmement talentueux. Passée la joie d'écouter 6 titres qui me rappellent l'un de mes projets musicaux favoris, je leur souhaite de trouver une voie encore plus inspirée et affirmée. Ainsi qu'une tournée européenne, ne mentons pas.
Tracklist :
1. Sing No Coda
2. Andromeda's Wings
3. Ekpyrotic
4. Hubris
5. Bone Dust
6. Dispirit