hell god baby damn no!
On l'attendait, le nouveau Misþyrming. On savait qu'il était sûrement en préparation depuis un moment, quelque part dans un studio de Reykjavik, et pourtant on ne l'a pas vu venir. Une petite annonce quelques semaines plus tôt, et la galette arrive tout entière sans single ni quelconque autre teasing en mi-décembre chez Norma Evangelium Diaboli. Il faut dire que le groupe n'a pas pour habitude de se faire annoncer en grande pompe – en 2019, Algleymi était aussi sorti de nulle part sans annonce préalable, alors que le premier album des Islandais leur avait déjà conféré une bonne hype dans la scène black metal. Et quel claque aura été cet album, diamant noir aux riffs mélodiques et épiques qui s'approchaient fortement de la perfection. C'est donc une dure tâche qui revient à ce Með hamri : comment faire suite à un tel album, qui s'est si vite fait une place dans le cœur des fans ? La réponse est, encore une fois semble t-il, en faisant quelque chose de différent.
Différent est ici tout de même assez relatif. Il y a tout un monde entre le premier et le deuxième album : l'un nous emmenait dans un monde souterrain et chaotique, avec un sens de la mélodie déjà fort aiguisé mais aussi très dissonant, une musique opaque qui se rapprochait plus à l'époque d'un Svartidaudi. L'autre, lui, troquait tout cela pour un black metal puissant, clairement plus accessible sans perdre en travail de composition ni en ambiances mais permettant aussi au nom de Misthyrming de se démarquer de ses frères islandais. Cette troisième offrande elle, semble naviguer quelque part entre les deux. La première partie de l'album est un enchaînement exceptionnel sans temps mort d'un black metal de haute facture où l'on retrouve les mélodies victorieuses d'Algleymi, mais également des morceaux beaucoup plus rentre dedans, axés sur l'efficacité. Le premier titre, morceau éponyme, est à cet égard un parfait exemple, cavalcade effrénée, blast beats, breaks, solos chaotiques et cris primitifs, un shot d'une nervosité surprenante mais bienvenue.
On retrouve par la suite la sensibilité plus mélodique des Islandais ainsi que leur amour pour les lourds effets sur la voix, mais aussi une nouvelle attraction pour les samples ambiants servant de transition entre les morceaux, jusqu'à une deuxième moitié d'album plus atmosphérique et bruitiste. « Engin Vorkunn » emprunte d'ailleurs des synthés rappelant facilement un certain morceau d'un certain projet solo norvégien culte de black metal / dungeon synth. Plus sinistre, pesante par ses mid tempo et la construction répétitive, hypnotique de ses morceaux, cette seconde moitié détonne avec le reste. Si sur papier, cette longue et lente évolution peut paraître intéressante, on perd véritablement en substance et en inspiration pour des morceaux qui tirent sur la longueur. Si on devine l'intention du groupe, on a du mal à vraiment s'imerger dans cette ambiance rampante, écrasante et inhospitalière dans laquelle on semble vouloir nous mettre. Le dernier morceau, « Aftaka », offre tout de même quelques fulgurances et quelques moments plus lents et chaotiques intéressants, une bonne conclusion pour un album bipolaire.
Il est dur de succéder à un album aussi marquant qu'Algleymi. Með Hamri n'est peut être pas aussi impactant, plus hétérogène et souffrant de quelques longueurs, mais il reste tout de même, en soi, un album de très bonne facture. Quelques morceaux de haute volée, une volonté claire d'affirmer leur identité musicale tout en continuant à explorer... Les Islandais nous prouvent qu'ils ont encore de quoi surprendre, ainsi que quelques nouveautées qui promettent d'être bien efficaces en live. Pourrait-on maintenant espérer un nouveau Sinmara pour 2023 ?
Tracklist :
1. Með hamri
2. Með harmi
3. Engin miskunn
4. Engin vorkunn
5. Blóðhefnd
6. Aftaka
