Death metal et science-fiction : une oreille dans les étoiles, une autre dans les enfers.
C’est la claque à laquelle on était en droit de s’attendre. Ripped to Shreds, groupe californien qui fait dans le death metal old-school et sans frioritures, confirme avec son deuxième album 劇變 (Jubian), sorti ce vendredi chez Relapse, qu’il mérite sa place de premier choix dans la scène death metal revival. Et d’ailleurs il était grand temps qu’un de leurs albums soit chroniqué sur Horns Up.
Repulsion, Death Strike, Morbid Angel et surtout Death (période Leprosy) : clairement Andrew Lee a été biberonné au début des années 90 («Ripped to Shreds» au départ c’est une chanson de Terrorizer, et le groupe du même nom cite régulièrement les vétérans californiens comme influence). L’album est un florilège de riffs bondissants, un exercice d’équilibriste de 35 minutes, entre la lourdeur pataude du grindcore old-school et la nervosité du death metal à la scie sauteuse.
Cette recette death old-school sert parfaitement les thèmes épiques chers au groupe : la mythologie et l’histoire militaire chinoise. La démarche de Ripped to Shreds vaut d’ailleurs la peine qu’on s’y attarde, notamment sur ce deuxième album où le curseur de l’explicitement graphique est poussé au maximum, comme sur les précédentes sorties.
Les paroles font parfois référence à l’histoire chinoise («Violent Compulsion for Conquest»), parfois pas, et dans les deux cas Ripped to Shreds livre sa version gore et tourmentée d’une histoire pas forcément facile à porter d’un point de vue mémoriel, celle d’une bande d’américains aux origines chinoises, pour qui certaines plaies ouvertes au siècle passé ne sont pas encore cicatrisées. L’imaginaire de du groupe navigue entre la Mandchourie des années 30, les guerres des deux Corées («Reek of Burning Freedom») et les ères médiévales de l’Empire du Milieu («Split Apart by Five Chariots»). Avec au milieu de tout ça une critique de la religion organisée («Harmonious Impiety»), habituelle pour le genre, avec des références à des symboles du bouddhisme.
La déférence aux années 90 est impeccable, l’hommage à nos classiques irréprochable, et avec un discours qui donne de la raison d’être au gore et aux effusions de sang, Ripped to Shreds consolide avec 劇變 (Jubian) son statut de tête de gondole du death metal conscient de ce qu’il est et de ce qu’il peut faire de plus noble (citons une fois de plus Necrot et Mortal, son chef d'oeuvre de 2020). Hâte de suivre une carrière qui on l’espère sera longue et riche en classiques de cette trempe.
Tracklist
1. «Violent Compulsion for Conquest» 04:32
2. «Split Apart by Five Chariots» 04:18
3. «獨孤九劍 日月神教第三節 (In Solitude - Sun Moon Holy Cult Pt 3)» 10:32
4. «Harmonious Impiety» 02:29
5. «漢奸 (Race Traitor)» 04:48
6. «Reek of Burning Freedom» 04:14
7. «Peregrination to the Unborn Eternal Mother» 04:13
8. «Scripture Containing the Supreme Internal Energy Arts That Render the Practitioner Invincible Throughout the Martial Realm» 00:49
35:55