L'autre belge de la rédac'. Passé par Spirit of Metal et Shoot Me Again.
J'ai déjà pu écrire mon amour pour Saor dans les colonnes de Horns Up, que ce soit via ma chronique de Forgotten Paths ou divers live reports. Selon moi, Andy Marshall (et son groupe, car Saor n'est plus vraiment un one-man band) avait retrouvé un bel allant sur ce dernier album, après un Guardians que j'avais trouvé un peu boursouflé. Pourtant, et malgré la belle popularité acquise par les Écossais, on avait comme l'impression que peu à peu, tout serait bientôt dit. La formule de Marshall n'est pas forcément étirable à l'envi, de par le peu de variété de son chant, de ses structures, de ses thèmes. Non pas que Forgotten Paths était mauvais (au contraire), mais il était déjà particulièrement bref avec trois « vrais » morceaux à peine, même s'ils s'étendaient sur plus de 10 minutes chacun.
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Visiblement, Andy Marshall partageait ce constat, ce besoin d'autre chose, de renouvellement. Peut-être est-ce ce qui l'a poussé à ressortir des cartons son projet plus « classique » Fuath, qui sortait son second album en 2021. De quoi prendre un peu de recul, et revenir à Saor avec des idées fraîches. En ce sens, Fuath paraît déteindre un peu sur le groupe principal de Marshall : jamais le groupe n'a sonné aussi « traditionnel » - dans le sens black metal et pas folkorique du terme – que sur Origins. Ce n'est pas évident dès « Call of the Carnyx » et ses choeurs solennels accompagnés de mélodies plutôt classiques pour du Saor. Le tout est cependant beaucoup plus compact, et le chant de Marshall ne débarque qu'après 4 minutes. Et là, c'est quitte ou double : finie, la voix gutturale et aboyée des précédents albums. Andy opte cette voix pour un chant black metal bien plus passe-partout, celui déjà employé sur Fuath. L'occasion pour moi de changer d'avis. Après Forgotten Paths, j'avais estimé que Marshall était de moins en moins bon vocaliste au fil des albums, et que son chant si particulier restait le point faible du groupe. Mais en un sens, il vaut peut-être mieux un chant très personnel, mais perfectible, que quelque chose d'aussi générique. Marshall maîtrise certainement mieux le chant écorché présent sur Origins, et nul doute que ce sera bien plus simple pour lui de préserver sa voix en live de cette façon. Mais le résultat est...déstabilisant.
Car en plus de ce « nouveau » chant, c'est vraiment à un Saor différent auquel on a droit ici. « Fallen » et ses riffs saccadés ont un côté plus moderne, quasi-post black. Finies, les longues pièces de 10 minutes aux envolées de flûte et de violon pleines d'émotion comme Aura et Roots en regorgeaient. Paradoxalement, les morceaux n'en sont pas moins...majoritairement instrumentaux. Andy ne distille son chant qu'avec parcimonie, souvent soutenu par une voix féminine ou des choeurs. Après plusieurs écoutes, difficile de s'y faire, et l'impression d'écouter un autre groupe que Saor se fait persistante. Heureusement, la magie est toujours là, au détour d'une mélodie. « Aurora » s'impose ainsi comme la pièce maîtresse de l'album, du genre qu'on sifflote après une écoute. Mieux, le solo de guitare assez inhabituel qui surgit pour reprendre l'air principal est une belle réussite.
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Saor tente beaucoup de choses sur Origins et c'est tout à l'honneur de son maître à penser. Certaines touchent leur cible. D'autres, comme ce « Beyond the Walls » aux orchestrations un peu plastiques, passent un peu à côté. Le morceau passe en effet des cornemuses « typiques » à quelque chose d'un peu plus chargé, grandiloquent mais aussi un poil forcé. Le final, qui était également le premier single révélé, « Origins », nous remet un peu plus en terrain connu avec cette cornemuse sur un final qui se veut aérien, mais reste bien plus chargé de guitares qu'à l'accoutumée. L'émotion manque, encore. De manière générale, Origins manque de moments forts, mémorables, sans qu'on passe un mauvais moment. Mais chaque album de Saor (allez, sauf Guardians) était pour moi un grand moment, pas un moment sympa. Chacune de leurs sorties accompagnait mon année, mes rêveries. Ce ne sera pas le cas cette fois. Reste à voir ce que donne l'album en live...
Tracklist :
1. Call of the Carnyx (06:59)
2. Fallen (05:04)
3. The Ancient Ones (07:54)
4. Aurora (08:24)
5. Beyond the Wall (06:13)
6. Origins (06:44)