Hellfest 2022 - Partie 2 - Jours 1 et 2
Open air - Clisson
Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
Comme vous le savez tous, le Hellfest Open Air 2022 a eu une saveur bien particulière, puisqu'il était composé d'une première partie de trois jours - déjà chroniquée dans nos pages - suivie d'une seconde partie de quatre jours le weekend suivant. Pour les Finisher qui ont enchainé les deux, cela a été rude pour les corps et les esprits ; mais quel plaisir de retrouver le Hellfest après deux années de disette.
Retrouvez ci-dessous nos impressions, nos tops et nos flops sur ces deux éditions du Hellfest !
Le festival étant dense, nous avons décidé de couper ce deuxième weekend de Hellfest en deux reports distincts : jeudi et vendredi dans cette première partie, samedi et dimanche dans une seconde !
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Jeudi 23 juin 2022 - Jour 1
Groupes évoqués : Worst Doubt | Crown | Dragged Under | The Ruins of Beverast | Tribulation | Insomnium | Whitesnake | Solstafir | Helloween | Heilung | Wardruna | Jerry Cantrell | Therion
Worst Doubt
Michaël : On débute ce second weekend du Hellfest 2022 avec les franciliens de Worst Doubt. En France, on ne sait pas trop trop faire du post-hardcore à la mode ; en revanche, pour faire du bon vieux hardcore des familles qui bastonne, on est pas si mal loti en Europe. Les Worst Doubt, que l'on a reçu récemment dans notre émission, évoluent plutôt très bien dans cette scène. Le public est déjà bien compact devant la Warzone quand les premières notes d'Extinction résonnent. Titre éponyme de l'unique album du groupe, très largement représenté ce soir, et très largement adulé par le public. On avait pu avoir une première impression, pour les novices du groupe, de ce que ça peut donner en live lors du Hellfest From Home et, sans grande surprise, c'est encore mieux en live. Ca slamme fort, ca bouge beaucoup sur scène ; que l'on aime ou pas le groupe et son hardcore de rue pas si oldschool que ça, on ne peut que saluer la performance. Le concert de début de journée qui te mets sur les bons rails. Mention spéciale à Imposter's Reign, qui a juste foutu un bordel incommensurable sur les pavés de la Warzone qui n'en demandait pas tant.
Crown
Varulven: Mon premier Hellfest débute donc sous la Altar en milieu d’après-midi. Les Français de CROWN ont quarante minutes pour convaincre le public clissonais. Il faut dire que certains arguments jouaient déjà en leur faveur, comme la belle surprise que fut leur album The End of All Things. On retrouve tout ce qui a fait l’intérêt de l’album sur scène, grâce à ce mélange entre Goth indus très froid et Post Metal étouffant. Les différents extraits qui en sont tirés mettent vraiment en avant cette légèreté aérienne, faite de mélodies qui font la part belle aux samples électroniques et aux arpèges où reverb et chorus se mêlent soigneusement, entre un Depeche Mode et le Paradise Lost de l'époque One Second/Host. Puis, les gros riffs sous accordés et les vocaux sludgy amènent un contraste plus lourd et noir, à l’image de ce que l’on trouve dans les groupes estampillés Post. CROWN a su émouvoir et conquérir le coeur des festivaliers, à en croire les nombreuses personnes (moi y compris) ayant ressenti quelques frissons lorsqu’elle se sentaient transportées.
Dragged Under
Michaël : C'est d'un pas décidé que je me rends sur la Warzone pour assister au concert des Américains de Dragged Under. J'ai découvert le groupe un peu par hasard et j'avais été plutôt scotché par quelques vidéos live postées en ligne. De quoi attiser ma curiosité, donc, et traîner de bon matin ma carcasse pour écouter le punk rock des natifs de Seattle. Et grand bien m'en a fait. Outre le fait que le son est bon (la basse est top!), la musique des Américains est un genre de mix entre des sonorités bien connues des années 90, à la Rise Against et The Offspring (sur le titre Chelsea, l'influence est patente !) mais avec une sévère cure d'ajeunissement. Anthony Cappocchi a une très bonne présence, quelques gimmicks assez funs (ce lancer de micro aérien est du plus bel effet), et Ryan Bruce, le lead guitariste occupe avec maestro la scène. Même si le groupe a essentiellement joué des titres de son premier album intitulé The World is In Your Way sorti en 2020, Dragged Under a pu nous offrir quelques titres de son dernier opus sorti quelques jours avant le Hellfest, intitulé Upright Animals. Weather et Suffer ont ainsi fait leur petit effet, sans toutefois atteindre le cool effect de Instability ou bien encore d'Hypocondria, venue clore le set. En bref, un excellent moment.
The Ruins of Beverast
Varulven: Place à présent à l’un des groupes les plus atypiques de la scène extrême actuelle. Mélangeant Black atmosphérique et Doom Metal, The Ruins of Beverast se démarque par un équilibre et une cohérence de propos rarement atteinte par un groupe ayant fusionné ces deux styles de Metal extrêmes et sombres. Une singularité que le groupe n’arrive malheureusement pas à retranscrire sur scène, la faute à une qualité sonore souvent trop médiocre pour discerner les différentes composantes du projet d’Alexander Von Meinwald. Je me souviens même d’une date parisienne où les problèmes de son eurent raison du set des Allemands, qui le stoppèrent définitivement. Nous sommes aujourd’hui relativement chanceux. Car si l’ensemble demeure parfois trop brouillon, il ne nous empêche pas d’être plongé dans l’univers des morceaux, entre lenteur écrasante du Doom et volonté cérémonielle du Black, le tout affiné par des boucles d’arpèges aux couleurs psychédéliques peu communes pour ce genre de Metal. Une bonne immersion, mais qui n'égale pas encore la vraie sensation de cheminement intérieur que peut véhiculer le projet sur disque.
Tribulation
Varulven : Retour sous la Altar pour l’une de mes grosses attentes du festival, Tribulation. Leur album When Gloom Becomes Sound s’est très vite hissé dans le haut du panier de mes albums préférés en 2021, en constituant la forme la plus aboutie et marquante de leur style actuel. Entre la noirceur occulte de Dissection aux allures de théâtre horrifique et l’écrin velouté du Gothic Rock à la Fields of The Nephilim, les Suédois enchaînent les morceaux de leurs trois derniers efforts avec une maîtrise et une efficacité impeccable. Refrains déclamés et leads guitares très typés Heavy Metal 80’s font véritablement mouche, et cette faculté du groupe à retranscrire des influences très identifiables et à les synthétiser en une identité musicale unique reste sa grande force. Classe et charisme furent les maîtres mots de cette prestation. A revoir en salle, et au plus vite.
Insomnium
Michaël : Que dire qui n’a pas déjà été dit sur les Finlandais d’Insomnium ? Fers-de-lance d’un Death metal mélodique confinant au Doom, ils font leur bonhomme de chemin en alternant de bons albums avec d'excellents albums (je pense notamment à Winter’s Gate, dont je ne me lasse vraiment pas, et le grand classique Across the Dark). Mon « problème » avec le groupe vient essentiellement des prestations live, qui sont parfois chiantes comme la pluie. C’est immobile, c’est un peu toujours la même chose, des mimiques au placement des membres du groupe. Markus Vanhala, le guitariste lead, est bien moins dynamique que lorsqu’il s’offre plus de liberté avec Omnium Gatherum ; Jani Liimatainen a perdu toute mobilité depuis qu’il a quitté Sonata Arctica, il y a des plombes, désormais ; et Niilo Sevänen fait du Niilo Sevänen. Au final, on est toujours aussi heureux de voir le groupe car cela veut dire écouter quelques pépites (même si le groupe a clairement axé sa setlist du jour sur son dernier album), mais l’étincelle n’est plus vraiment présente. De mon côté, en tous cas.
Whitesnake
Michaël : Après avoir légèrement écourté le show d’Insomnium pour les raisons précitées, je me retrouve à assister aux dernières minutes du show de Whitesnake. Il s’agissait d’une tournée d’adieu donc, autant aller y jeter un œil et une oreille. Surtout que les Britanniques ont quand même sorti un grand nombre de tubes qui devraient sonner doucement à ceux qui ont grandi dans les années 80 ou qui ont, pour quelque raison que ce soit, une certaine nostalgie de ces années-là. Et, même si David Coverdale n’est plus dans la forme de sa vie – il est quand même bien conservé, pour ses 70 balais -, quel plaisir de se faire le combo Here I Go Again et Still of the Night (en compagnie de Steve Vaï). Un petit plaisir coupable (un de plus) !
Solstafir
Michaël : J’ai toujours intimement apprécié la musique des Islandais, tout en convenant d’un constat difficile à nier : il n’est pas toujours aisé de rentrer dans leurs prestations live. Que vous soyez un aficionado ou pas, il faut une certaine continuité entre votre mood et celui qui découle des titres du groupe, sauf à vous perdre un peu. Idem s'agissant des personnes autour de vous dans le concert ; il est aisé de décrocher quand les conditions ne sont pas optimales. Aujourd’hui était clairement un jour avec. Bien porté par un son correct et des lights parfaites pour un groupe comme celui-ci (pas pour les photographes, en revanche), Solstafir a déroulé une setlist somme toute assez classique, aux allures de best-of, faisant la part belle aux titres lents et intenses (Fjara ; Otta ; Ljos i Stormi ; etc.). Tout au long du set, l'ami Aðalbjörn est resté dans la simplicité qu'on lui connait, mais rudement efficace, pour communiquer avec le public. Goddess of the Ages, venue clore le set, est toujours aussi délicieuse. Clairement un des moments forts de ce début de festival.
Helloween
Varulven: Après mon premier concert de Helloween en avril 2016, j’avais dit « c’était un bon moment, mais bon, je n’irai plus les voir. Je sais à quoi m’attendre avec ce genre de show, et je me désintéresse de plus en plus du Power mélo , donc de toute façon...». Je croyais que j’allais pouvoir me tenir à ce que j’avais dit. Mais l’annonce de la tournée Pumpkins United, qui réunissait l’intégralité du line up historique, dont le chanteur emblématique Michael Kiske et le guitariste Kai Hansen me fit changer d’avis. Et un deuxième concert d’Helloween. Puis, mon quota satisfaction déjà bien rempli, il était cette fois-ci inutile pour moi de renouveler l’expérience. Mais l’annonce d’un nouvel album, réunissant toutes les époques musicales des Citrouilles autour du groupe actuel et des membres historiques, me fit capituler. La chair étant désormais faible, je me retrouve donc devant la Mainstage pour mon troisième concert de Andi Deris & cie. Aucune surprise donc, mais toujours la satisfaction de voir un groupe de nouveau uni, heureux de jouer ensemble sur scène, loin des égos et des disputes d’autrefois. Pendant presque une heure, ce fut un déferlement de tubes faits pour le live, interprétés par des musiciens tous souriants et communicatifs (excepté Michael Weikath, ça ça ne change pas). On alternait les morceaux fédérateurs à la « Eagle Fly Free », « I Want Out » ou « Dr Stein » avec les ballades larmoyantes (« Forever and One », « A Tale That Wasn’t Right »), tout en oubliant pas les saillies plus Speed Metal agressives d’un Walls of Jericho. Car il est de bon ton de se rappeler que Helloween, ce n’est pas que du light et du fun « Happy Metal », c’est avant tout du riffing speed et heavy à la Maiden/Judas Priest enrichi par des mélodies fraîches et lumineuses. Tout le contraire d'une bonne partie de la scène Speed mélo actuelle, qui n’a de Speed et de Metal que le nom. On a de plus le plaisir de retrouver Kai Hansen en forme, de même que Kiske, qui semble beaucoup plus à l’aise et en voix que dans mon souvenir. Deris, en revanche, semblait beaucoup plus effacé que d’ordinaire, et ce, malgré une performance toujours qualitative. Mais peu importe, au final, car Helloween nous a offert tout ce que l’on peut attendre d’un concert de tête d’affiche dans un gros festival. Rendez-vous le 30 août pour le 4ème round à l’Olympia donc ?
Heilung
Michaël : On pourrait utiliser beaucoup de superlatifs pour ce concert de Heilung. Enivrant, puissant, propre, carré. Il est assez aisé de se faire porter par la musique du groupe, qui prend toute sa dimension dans des conditions plus intimistes, que la grandeur et la froideur de la Temple n’a toutedois pas sacrifié. C’était ma première fois en live avec ce groupe, et j’ai été agréablement surpris à trois titres : une présence scénique indéniable, une setlist qui ne prend pas les airs d’un genre de best of mais qui garde une grosse cohérence (j’aurais aimé écouter leur dernier titre, Anoana, toutefois) et, enfin, pas trop de moments un peu bizarres qui peuvent vous faire sortir de la prestation. A l’exception de cette chenille de l’espace que le mariage de votre cousin Jean-Marc ne renierait pas, tout est resté hyper immersif. À revoir en petite salle, avec un plaisir non dissimulé.
Wardruna
Michaël : Partagé. Très, très partagé. D’un côté, quel plaisir de voir le groupe se retrouver en tête d’affiche sur la Mainstage 2. Amplement mérité pour les Norvégiens qui nous enchantent album après album. D’un autre côté, les voir si tardivement sur scène, pas sous les tentes, cela a manifestement impacté grandement le ressenti des festivaliers encore présents. Cela reste un style musical qui implique une certaine communion avec le public, et les voir de si loin, malgré un son correct, a plutôt cassé la dynamique d’un concert pourtant maîtrisé. Le public s’est égrené tout au long du concert, pour au final laisser un noyau dur – toujours dense, malgré tout – qui se dandinera de manière lancinante sur les très belles Rotlaust tre fell et Helvegen, desserts du jour. Je préfère voir le verre à moitié plein en me disant que c’est un accomplissement pour un groupe comme celui-ci de se retrouver sur la Mainstage 2, mais je ne suis pas convaincu par ce placement de scène et de timing. A revoir dans de meilleures conditions, donc.
Jerry Cantrell
Di Sab : Ne connaissant pas la carrière solo de Jerry Cantrell avant son annonce au Hellfest, cela fait 6 mois que je ne décroche pas de Brighten et de Psychotic Break. Prolongement logique de sa carrière avec Alice in Chains, Cantrell offre un art toujours à vif mais diablement accrocheur. Ne m’étant pas spoilé les shows, je pensais que nous aurions droit à un balayage quasi intégral de sa carrière solo. Nada ! 16 titres, 10 reprises d’Alice in Chains. Accompagné de Greg Puciato (Dillinger Escape Plan) dont les lunettes de cycliste rappellent irrémédiablement Layne Staley, Cantrell captive la Valley comme peu l’ont fait lors des 2 éditions. Je ne sais pas ce à quoi s’attendait le public, mais les tubes d’Alice in Chains sont accueillis triomphalement. Forcément, avec uniquement 10 reprises, il en manque quelques uns qu’on aurait adoré avoir : Bleed the Freak, Damn that River, Rain When I Die pour ne citer qu’eux, mais les essentiels sont là. Vous les connaissez, je les connais, le public aussi, pas besoin de les citer. Puciato n’a peut-être pas la puissance vocale de William Duvall, en revanche je le trouve plus émotif que le frontman actuel d’Alice in Chains, et ça marche totalement de mon côté. On pourrait simplement regretter que la place que prennent les titres du groupe légendaire empêche Jerry Cantrell de trop présenter sa discographie qui est totalement digne d’intérêt mais soyons honnête, peu seraient restés plus d’une heure trente sans se mettre le moindre Rooster sous la dent. Grand concert par grand monsieur.
Therion
Varulven: Pour mon dernier concert de cette première journée, c’est Therion, grand maître du Metal Symphonique, qui se présente sur la scène de la Altar. Seul groupe du genre à trouver grâce à mes oreilles (et encore, depuis Sithra Ahra… ), la bande à Christofer Johnsson a ce soir misé sur la sécurité, en axant exclusivement leur setlist sur les classiques de Vovin, Theli ou Secrets of The Runes. C’est donc sur « The Rise of Sodom and Gomorah » que le set des Suédois débute, avant d’enchaîner les tubes tirés de la période dorée du groupe. Celle qui offrait un subtil mélange entre Heavy Metal mélodique et choeurs et arrangements orchestraux, duquel se dégage une vraie chaleur cérémonielle et une atmosphère ésotérique, trait renforcé par leurs tenues typéee XIXe, mais tout en restant sobre, bien loin de leurs extravagances passées et des clichés de princesses Disney que l’on accole souvent à ce type de groupes « à chanteuse ». Un duo de chanteuses qui, au même titre que Thomas Vikstrom et les musiciens, savent occuper l’espace scénique, au point de réussir le pari de retranscrire sur scène la densité de leurs morceaux studio. Alors même que le personnel qui joue ce soir est beaucoup moins pléthorique que ce que l’on entend sur album. Même les morceaux du petit dernier Leviathan sonnent bien moins plats et forcés que sur galette, et se fondent parfaitement avec le reste des chansons.
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Vendredi 24 juin 2022 - Jour 2
Groupes évoqués : The Baboon Show | Fractal Universe | Youth Code | Blues Pills | Pogo Car Crash Control | Skeletal Remains | Dragonforce | Killing Joke | Kreator | Moonspell | Earth | Godflesh | Alice Cooper | Marduk | Enslaved | The Bloody Beetroots
The Baboon Show
Michaël : La primatologie, ça me connaît, après 14 ans de Hellfest et encore plus dans le "monde" du metal. Du coup, quoi de mieux pour commencer la journée que d'aller se frotter au groupe suédois de rock The Baboon Show. Il est difficile de décrire la musique du groupe (punk rock ?) et encore moins d'expliquer la différence d'énergie et de ressenti qu'il y a entre la musique du groupe sur CD - qui me laisse globalement pantois - et la prestation sur scène, hyper dynamique et bien léchée. Cela s'explique certainement par un groupe pas tout jeune (2003) et par une Cecilia Boström tout aussi fantasque que fédératrice sur scène. Ca bouge dans tous les sens, les riffs sont pas aussi génériques qu'on pourrait le craindre et, d'une manière générale, c'est une excellente prestation de début de journée. L'indicateur d'un bon concert étant la quantité de badauds se rapprochant de la scène petit à petit, ce qui a été largement le cas. À approfondir, donc.
Fractal Universe
Michaël : Dans un double weekend du Hellfest particulièrement light niveau Death metal mélodique, j'ai plus ou moins traîné sur toutes les scènes où jouaient des groupes s'apparentant à ce genre qui m'est cher - et qui me vaut les pires railleries de notre cher Raton. Fractal Universe évolue davantage dans des sphères du Death metal progressif voire technique, mais la frontière avec le Death mélodique est souvent très fine, tant les leads et soli sont légion dans la musique du groupe. L'impression en live est la même que sur CD. C'est propre, c'est carré, les partitions de guitare sont excellentes et le jeu de batterie très dynamique ; mais la voix - growl ou claire - me coupe complètement de la musique. C'est naturellement une affaire de goût, car les Nancéiens ont manifestement ravi un public de fans et de curieux venu les voir. A Clockwork Expectation est toujours aussi chouette, néanmoins, et ce n'est pas sans plaisir que j'ai assisté à ce concert. Juste pas complètement ma came.
Youth Code
Michaël : Dans une journée placée sous le signe du Metal Indus', on avait nécessairement envie de s'interesser de près à Youth Code, en ce début de journée. Le duo américain produit une musique hyper electro sur laquelle se posent les cris de Sara Taylor. Une recette assez simple, en somme. À vrai dire, les titres s'enchaînent assez vite et malgré le fait qu'ils ne soient que deux pour couvrir toute la Mainstage 1, on ne s'ennuie pas visuellement. Les rythmiques électroniques sont plutot convaincantes ; le groupe nous emmenant très facilement dans son atmosphère et malgré les averses et les nuages menaçants, le public est assez nombreux et bouge volontiers. Là encore, le "problème" vient de la voix très - très - monocorde de Sara Taylor qui finit par lasser. Aucune nuance, aucune variation ; ce qui vient vite rendre fastidieuse la prestation. Dans un tel contexte, 40 minutes c'est long. On se contentera d'écouter le groupe sur CD.
Blues Pills
Michaël : J'ai toujours eu une immense sympathie pour ce groupe. Le groupe de rock suédois, mené par le charismatique Elin Larsson est toujours délicieux à voir en live, surtout quand il nous pond une setlist comme celle-ci, qui sort (un peu) des sentiers battus (Proud Woman ; Kiss My Past Goodbye ; Black Smoke). Le son est excellent, l'esthétique est toujours aussi soignée avec le fond de scène et le rappel de couleur rouge sur tous les musiciens. C'est propre ; c'est un petit bonbon à déguster sans modération. Certes, je n'ignore pas qu'Elin a ses détracteurs, qui trouvent qu'elle constitue une very poor man's Janis Joplin. Il y a parfois mimique ou, en tous cas, l'impression de mimique, on ne va pas se le cacher. Mais sa voix est vraiment très agréable et donne une coloration singulière à la musique du groupe. C'est sur Devil's man que le groupe quitte la scène de la Mainstage 2 et ils ont certainement gagné des fans ce jour là.
Pogo Car Crash Control
Michaël : Et en voilà un autre vent de fraîcheur sur cette Warzone ! Vent de fraîcheur que l'on a d'ailleurs vu sur France 3, Brut et un peu partout. Grosse mise en avant pour le groupe qui, espérons-le, saura en profiter. Le quator francilien produit un rock dynamique, frais, dans la langue de Molière (ce qui est suffisamment rare pour être mentionné !). Le mouvement sur scène est permanent et le mouvement sur les pavés de la Warzone l'est tout autant. Alors certes, il faut aimer ce genre musical, c'est une évidence ; et ce n'est pas du tout mon cas. Mais l'énergie est incontestable, de même que cette vibe de groupe de potes de lycée qui fait plaisir à voir.
Skeletal Remains
Varulven : Nouveau concert sous la Altar. C’est à croire que la tente typée Death Metal va devenir ma deuxième maison, à moi, le blackeux devant l’éternel. C’est donc pour voir Skeletal Remains, un des représentants US du revival Death Metal, que je suis ici. Loin des ersatz Putrid Death à la Incantation et des clones de Entombed et Dismember qui pullulent depuis dix ans, les Américains nous servent pourtant eux aussi un Death old school et très typé, mais qui a le mérite de marquer par sa violence et son impeccable clarté. Entre la lourdeur lovecraftienne de Morbid Angel et le rouleau compresseur d’un Cannibal Corpse, le quatuor déroule son set avec intensité et nervosité, tout en gardant cette précision et cette qualité de son pour nous matraquer la gueule. Un bon concert donc, malgré une certaine lassitude sur la fin, propre malheureusement à beaucoup de groupes qui jouent dans le même style.
Dragonforce
Michaël : C'est amusant de voir la foule se masser devant la Mainstage à la seconde même où le backdrop et les décors de scène de Dragonforce apparaissent. C'est vraiment un groupe qui attire en festival. Et on peut comprendre, à dire vrai : ça bouge dans tous les sens, y'a plus de notes jouées en 40 minutes que sur toute la carrière de Coldplay (et les metalleux, ils aiment la technique !) et c'est quand même un Power Metal "feel good", comme on dit. Herman Li et Sam Totman font toujours le show, comme lors de cette entrée sur scène sur des jeux d'arcade géants. J'ai toujours préféré la voix de ZP Theart, aujourd'hui chez Skid Row, mais le show n'en pâtit pas trop. Surtout lorsque le groupe sort sa setlist presque classique de festival avec tous les tubes habituels (Valley of the Damned, Through the Fire and Flames) et en piochant un peu partout dans leur discographie. Bon, ils auraient pu se passer de jouer la reprise un peu cheap de My Heart Will Go On qui n'est franchement pas une réussite, mais c'était clairement un show fun, largement suivi par le public clissonais.
Killing Joke
Di Sab : Après avoir clôturé la Valley de la première édition, Jaz Coleman et les siens reviennent bien plus tôt dans la journée mais sur une scène bien plus grande. J’ai retrouvé Killing Joke là où je les avais laissé la dernière fois, il y a 8 ans : Jaz Coleman est à la croisée des chemins : entre Christopher Lee, une grand-mère et un pantin désarticulé pendant que Geordie Walker transpire l’assurance et le charisme avec son petit béret, sa guitare immense et son regard vicieux de type sûr de ses riffs. Il y a totalement de quoi. En un peu moins d’une heure, Killing Joke passe en revue façon inspection martiale sa discographie blindée de morceaux d’anthologie. Une doublette Love Like Blood / Wardance pour se mettre l’auditoire dans la poche puis une démonstration jusqu’à la fin du set. Au-delà d’un focus sur le premier album, les Anglais tapent dans la quasi intégralité de leur discographie, preuve de l’homogénéité qualitative de celle-ci. L’excellent Pylon est représenté par la toute aussi excellente (et actuelle) I am the Virus. Le rendu est hyper pro et c’est avec le sentiment que le groupe peut tenir ce rythme encore 15 ans que nous nous dirigeons, tranquillement, vers Earth.
Kreator
Michaël : La déception. Il y a une chose constante avec Kreator (que j'aime beaucoup, au demeurant) : leur inconstance. Depuis de nombreuses années désormais (surtout les deux derniers), les albums sont très hétérogènes et les prestations live le sont tout autant. Y a des jours où c'est assez dynamique, où la communication avec le public est bonne, où le choix des titres et leur séquencement est excellent ; et il y a des jours comme ce samedi où le son est tout au plus correct, où les échanges avec le public sont très très poussifs (les quelques averses n'aidant pas, il est vrai) et où on a la pleine confirmation que certains titres récents du groupe (Hate Uber Alles et surtout Strongest of the Strong, jouée pour la première fois en live) ne sont pas du plus bel effet. Heureusement, on peut toujours se délecter des classiques du groupe que sont Enemy of God, People of the Lie, Pleasure to Kill, Flag of Hate ou bien encore Phobia, mais on en attend tellement plus des vétérans allemands !
Moonspell
Varulven : Troisième fois que je vois les Portugais de Moonspell. Assurément un groupe qui occupe une place de choix dans mon coeur. Grâce à mon ascendance d’une part, mais surtout grâce à la place d’atypique du Metal Gothique que s’est forgé le groupe au fil du temps. Celle d’un groupe qui, à chaque album, a su proposer une pluralité de styles, tout en conservant une personnalité bien marquée. Ce soir, Fernando Ribeiro et ses compagnons proposent pourtant un show comme à leur habitude. Leur investissement est toujours au maximum, la communion avec le public reste un élément de premier plan, et les titres piochés figurent parmi les albums majeurs des Loups. La brutalité de « Night Eternal » côtoie les refrains catchy des morceaux tirés de l’album Extinct, tandis que la tortueuse "Abysmo" nous renvoie aux heures les plus expérimentales du groupe. Pour terminer enfin sur un hommage au passé avec l’hymnique « Alma Mater » et l’hypnotisante « Full Moon Madness ». Une fois encore, Moonspell fut fidèle à sa réputation de groupe de scène. Sans chichis ni fioritures. Simple, mais efficace.
Earth
Di Sab: Earth est ma deuxième plus grande attente du festival derrière Mercyful Fate. Ayant vu il y a quelques années Dylan Carlson retourner le Cirque Electrique en solo avant d’achever le public par un sublime Old Black, je comptais les jours avant d’être confronté à ma première rencontre avec le groupe. Raybans vissés sur les yeux, favoris fournis et voix nasillarde, Carlson nous salue, indique brièvement avoir composé Cats on Briar au Hellfest avant de se lancer dans son interprétation.
Même si le groupe interprète les titres de la deuxième partie de sa carrière et laisse totalement de côté le drone pur, il y aura toujours des gens pour qui l’immersion dans Earth est pénible. Ca boucle à mort, 3 notes, un riff, une chanson, 8 minutes. Mais Earth a le son le plus beau du monde et leur capacité à dessiner des paysages sonores avec si peu me laisse, comme sur album, totalement pantois. The Bees Made Honey in Lion’s Skull, Engine of Ruin et surtout ce Torn by the Fox of the Crescent Moon aux allures de fin du monde sont les très grands moments du set. Il ne se passe rien sur scène mais personne n’en a rien à foutre. Ils recréent devant nous ce son si exceptionnel et cela suffit. L’heure s’achève sur une version raccourcie d’Ouroboros is Broken, je ne suis pas loin d’être à terre (sans mauvais jeu de mots). Merci de tout cœur.
Godflesh
Di Sab: L’indus n’est pas cantonné à la MS1 cette année et c’est curieux que je m’apprête à voir pour la première fois les pionniers de Godflesh. En duo, face à face, il est extrêmement difficile de rentrer dans le set. Tout est austère et c’est voulu. Les riffs sont colossaux, la voix de Broadrick est vindicative comme jamais mais la fatigue m’empêche de profiter. Un set qui semble néanmoins contenter les fans qui étaient pourtant présents en nombre.
Alice Cooper
Di Sab: Que l’on aime ou pas la musique d’Alice Cooper, difficile de lui résister en live tant sa théâtralité kitch et sa brochette de tubes ne permettent pas la moindre retenue. Après son tour de force en 2015, je n’avais pas recroisé la route de Vincent Furnier, son side project Hollywood Vampires m’intéressant à peu près autant que le stand de sandwich à la raclette.
D’un point de vue théâtral, le concert a tenu ses promesses : entre les passages rodés que je connaissais déjà :la guillotine sur I Love the Dead, la démonstration d’escrime sur School’s Out, le Frankenstein géant sur Feed my Frankenstein qui a ouvert le set et des nouveautés hyper drôles (ce bébé géant sur Dead Babies me fait encore rire quand j’y repense), Cooper continue de régaler visuellement. La scénographie est hyper drôle aussi (des remparts de château avec un gouvernail pour la caution Pirates des Caraïbes) et difficile d’émettre la moindre critique quant à cet aspect. Cependant, deux éléments ont rendu ce set moins anthologique que les précédents auxquels j’ai eu la chance d’assister : Premièrement, le vent et la pluie ont considérablement affaibli l’impact sonore de la prestation. Deuxièmement, cette fois ci, le Coop n’a pas fait le choix de la facilité au niveau de la setlist. C’est hyper bénéfique d’un côté : nous avons eu le droit à quelques raretés (Dead Babies, Bed of Nails) mais certains titres mineurs ont pris la place de titres qu’on aurait aimé avoir (Be my Lover et Under my Wheel en première place). Enfin, en une heure, difficile d’être pleinement satisfait tant le set passe vite. Le temps passe et nous savons que les fois où nous aurons l’occasion de revoir ce monstre sacré sont comptées. C’est pour cela qu’il est difficile de ne pas être heureux en sortant de ce set d’Alice Cooper malgré ces apparentes imperfections.
Marduk
Varulven : Pour rester dans la simplicité, mais beaucoup plus bas du front cette fois, c’est Marduk qui monte sur les planches de la Temple, pour tenter de nous asséner le coup fatal. Leur Brutal Black tout en agressivité ne manque clairement pas d’arguments, entre la violence des compos, le mur sonore bien compact des guitares et la voix torturée de Mortuus. Tant de choses que l’on ressent bel et bien sur scène. Oui, sauf que tous ces éléments de satisfaction habituelle ne prennent pas. Tous les morceaux se suivent et se ressemblent, pas une pause, pas un temps mort, rendant la prestation difficilement intéressante au bout d’un quart d’heure-vingt minutes. Cela plus un son assez brouillon durant tout le concert (et comme 1 fois sur 2 sous la Temple) et il devient difficile de conserver un intérêt pour les Suédois, même lorsqu’ils vous balancent à la gueule un « Panzer Division Marduk » encore plus brutal et dévastateur que sa version studio. Quel dommage.
Enslaved
Varulven : Vient enfin le moment de clore ce deuxième jour. Et ce sont les Norvégiens d’Enslaved qui sont chargés de s’acquitter de cette tâche. Si j’ai grand plaisir de les revoir pour me plonger dans les digressions progressives et psychédéliques que nous propose le groupe ce soir, comme ils le font depuis plus de vingt ans, je reste toutefois quelque peu déçu qu’ils n’aient pas plus axé leur set sur des morceaux plus immersifs et poignants. Aucun titre de Riitiir ne fut d’ailleurs joué, et c’est fort dommage. Car au lieu d’un « The Crossing » hypnotique mais quelque peu longuet, j’aurai préféré un « Death in The Eyes of Dawn » ou un « Root of The Mountain », beaucoup plus évocateurs à mon sens. Malgré tout, le concert eu tout de même son lot de bangers, le morceaux d’ouverture « Isa », avec son riff très Blackn’roll et son refrain scandé, « Havenless » et ses choeurs nordiques imposants, vestiges du passé qui ressurgissent. Mais aussi et surtout les deux titres extraits de Hordanes Land, le guerrier « Allfadr Odinn » et le fleuve « Slaget i Skogen Bottenfor », condensé entre rage primaire et épopée ancestrale. Je demanderai donc la même chose pour la prochaine fois, avec quelques morceaux d’ Axioma Ethica Odiini ou Vertebrae en plus. Mais bon, on ne peut pas gagner à tous les coups.
The Bloody Beetroots
Di Sab : La défection en urgence d’Altari Teenage Riot a poussé le Hellfest a faire un choix audacicieux en programmant les Bloody Beetroots en DJ set. Les succès des lives de Carpenter Brut / Perturbator ont dû être indicatifss quant à la capacité du public à transformer l'espace en dancefloor. Et quel succès ce fut ! Une Valley blindée avec un public qui semblait venir ici pour la première fois de l’édition, un ligthshow hyper travaillé et une ambiance vraiment stylée. Rien de très subtil dans l’approche musicale de l’Italien, on cherche le break, on le trouve, on retourne la fosse, on recommence. Forcément Wrap 1.9 et son « one two whoop whoop » a été le point culminant de la prestation. En sortant du concert, la fatigue est oubliée et l’on se retrouve face à un dilemme. Alors qu’une partie de la musique électronique (notamment la techno qui lorgne vers l’indus) est compatible avec le festival, avons-nous envie de diluer encore les tentes et de nous retrouver avec des JK Flesh, Ancient Methods ou Vatican Shadow en clôture de Valley ? Il y a manifestement un créneau, mais faut-il le prendre ? Encore aujourd’hui je ne saurais répondre.
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Nos remerciements au Hellfest et notamment à Roger pour l'accréditation et les conditions d'accueil.
Retrouvez par ailleurs toutes les photos de Michaël par ici.