Non.
Wolvennest, c'est une tornade parfois douce, parfois destructrice, un trou noir qui aspire chaque âme en détresse qui tente de venir boire de son nectar aussi épais que liquoreux. Des compositions qui s'étendent en nuées vrombissantes à trois guitares, en roulements de batterie, en incantations préoccupantes, en cassures qui donnent le vertige.
Leur premier album VOID (2016) avait permis de les lancer sur la piste, avec un ancrage entre black psychédélique, doom sorcier et dark rock au bord du gouffre. Lignée confirmée avec l'EP Vortex (2019) sorti ensuite et Ván Records continue cette année de porter le flambeau suintant avec Temple. A la première écoute, on comprend que l'album porte bien son nom car il propose huit titres qui portent une aura mystique et un style plus introspectif. Peut-être que ce n'est qu'une impression, mais on croit sentir que celui-ci est plus lent, qu'il prend son temps. Toutefois, à la comparaison, VOID durait déjà plus d'une heure, mais on atteint ici un total de 1h17, ce qui en fait clairement un album long dans le tableau des musiques actuelles.
C'est étrange car il est difficile de ne pas qualifier le groupe de « psychédélique » alors qu'il ne propose pas vraiment de composition de ce genre-là. Pourtant, entre les couplets et les élans hystériques de la guitare, unis dans des rondeurs semblables à des vagues, difficile de ne pas imaginer des formes abstraites qui défilent. Pourtant, le groupe puise bien plus son inspiration du côté de la fiction horrifique (« Alecto » provenant du film Malpertuis), d'une réalité spirituelle (l'album s'intitulant Temple ouvert par le titre « Mantra » avec une pochette aussi évocatrice) ou encore ésotérique, qu'on sait chère à certains membres dans leurs influences (Bobby Beausoleil parmi peut-être d'autres).
En deuxième partie d'album, on remarque qu'un invité est présent (King Dude sur « Succubus ») ainsi qu'une prise de chant bien plus importante de Déhà, sur un titre entier (« Disappear »), alors qu'il était plutôt discret auparavant quant à son rôle dans le groupe. On ressent finalement à la fois cette envie de construire un cocon étrange qui resserre les liens de la toile qu'ils ont créée, autour de leur univers à eux dans une expérience d'introspection, tout en testant de nouvelles possibilités autour du format qu'ils ont choisi.
Cet entre-deux n'est pas forcément explosif, mais il est qualitatif. Personnellement, j'ai du mal avec les groupes trop ambient et je retrouve ici certaines longueurs qui ne m'emportent pas mais qui sauront ravir les fans de ce genre de composition. Cependant, je dois l'avouer, lorsqu'un élément m’attrape, c'est tout un monde de visions incessantes qui s'ouvre : la ligne mélodique qui suit la simplicité du chant sur « Incarnation », la facette hypnotique et épuisante de « Disappear » ou le chant en français sur « Souffle de Mort » qui clôt l'album à travers l'un des plus beaux titres de fermeture qui soit.
La plupart des titres sont longs et construits autour de quelques lignes succinctes qui s'étoffent, dans une volonté libératrice ou pesante, en fonction des atmosphères souhaitées. Si celles-ci n'ont pas d'effet, on peut rester sur sa faim. Pour ma part, « Alecto » mais aussi légèrement « Mantra » et « Succubus » où je sais pourtant que, sur ces deux titres, la fin est superbe. J'ai finalement du mal à l'attendre et à apprécier la construction qui y mène pendant plusieurs minutes. Bien sûr, ces remarques valent pour la discographie entière de Wolvennest qui a toujours joué sur ces nuances, mais le ressenti me semble un peu plus fort à l'écoute de Temple. Le morceau « Succubus » est très beau et le fait que King Dude le chante apporte sans doute beaucoup d'implication dans les paroles et le symbole par exemple, mais les braises s'éteignent assez rapidement de mon côté. L'effet explosif que j'attendais d'un nouvel album n'est pas entièrement atteint.
Peut-être Temple aura-t-il besoin, pour moi, de mûrir à mon oreille pour que j'en saisisse toutes les subtilités. Peut-être ai-je tant écouté VOID que je n'imaginais pas un nouvel album plonger de cette manière-là dans les abysses de Wolvennest. Toujours est-il que j'apprécie pleinement son écoute sans y trouver entièrement mon compte. Shazzula proposant également le thérémine sur scène, en tout cas d'habitude, j'espère voir le groupe défendre son opus en live notamment si l'ajout de cet instrument est envisagé pour apporter une frénésie qui peut se révéler intéressante.
1. Mantra
2. Swear to Fire
3. Alecto
4. Incarnation
5. All that Black
6. Succubus
7. Disappear
8. Souffle de Mort