Punkach' renégat hellénophile.
Il y a de cela quelques semaines, c'est sans chauvinisme aucun que j'avais profité de notre revue d'actualité bimensuelle pour mentionner mes compatriotes d'Antzaat. Avec leur single "Man Made Flesh Made God Machine", les Anversois avaient trouvé le ton juste pour titiller ma curiosité à grands coups d'un black metal occulte, moderne et efficace, doté du rythmique entêtante et entraînante. J'étais donc très curieux de découvrir leur premier album, For You Men Who Gaze into the Sun, dont la sortie était prévue pour les dernières chutes de feuilles de 2020.
Dès les premières notes du morceau éponyme s'installe ce qu'Antzaat réussit plutôt bien tout au long de l'album : une instrumentation mid tempo contemplative, voire ritualisante, qui parfois s'accélère brutalement en long passages aériens soutenant la voix spectrale de Ronarg, qu'on a connu comme guitariste chez Ars Veneficium et qui fait preuve ici d'un autre talent musical. Et, toujours, le son si particulier de cette caisse claire qui marque le tempo et semble hanter la musique, discrète quand celle-ci monte en puissance pour mieux se révéler sur les passages les plus contemplatifs.
Si je n'aime pas coller des étiquettes au style d'un groupe qui peut encore le faire fortement évoluer, la patte d'Antzaat connectera vite quelques synapses pour l'auditeur ayant suivi les grandes tendances du black metal de ces dernières années. Tant par les compositions du groupe que par l'esthétique développée par ses membres, Antzaat se rattache à la mouvance aussi récente qu'omniprésente qu'on qualifie de "black à capuche" en francophonie (y'a-t-il un équivalent dans d'autres langues d'ailleurs ?). Instrumentations répétitives frôlant l'atmosphérique, voix sépulchrale et soli discrets ; l'influence de Mgłase fait sentir, mais il faut reconnaître qu'on a tellement baigné dans l'aura des Polonais qu'on les entend un peu partout. Si je devais citer une autre parenté avec la musique de ces Flamands, ça serait plutôt le premier album de Uada, très bonne surprise à l'époque, et dont je retrouve des bribes dans la rapide et claire fuite en avant de "Crown of Concrete", ou dans la montée au climax de "Radiant Fire". Mais j'ai conscience que c'est très subjectif.
Black occulte classique certes, For You Men Who Gaze into the Sun recèle quoiqu'il en soit de quelques très solides morceaux ; le très aérien "Through the Eyes of a Rotten Mind", ou "Veil of Darkness" au chant doublé et scandé, avant une longue descente tourbillonnante et quasiment instrumentale dans les abysses de la psyché humaine sur "And This Day Shall Come Again". Avec ce premier album, Antzaat s'insère dans la liste des "jeunes" groupes que je serais bien curieux de découvrir en début de journée d'un Throne Fest par exemple, comme j'y ai d'ailleurs entendu pour la première fois Ars Veneficium il y a de cela une éternité. Peut-on seulement espérer retrouver l'obscurité de ces bien-aimées cavernes, alors que l'impitoyable couronne solaire se refuse à descendre sous l'horizon ?
Tracklist:
Intro
Between the Beginning and the End
For You Men Who Gaze into the Sun
Crown of Concrete
Through the Eyes of a Rotten Mind
Radiant Fire
Veil of Darkness
Man Made Flesh Made God Machine
And This Day Shall Come Again