Revue d'actu #13 : Jesu, Lamb of God, Montagne, Khthoniik Cerviiks, Primitive Man
Compte groupé de la Team Horns Up, pour les écrits en commun.
Pour cette 13e revue d'actu, retrouvez les sorties plus ou moins marquantes des deux dernières semaines relevées par notre team de rédaction émérite. Programme chargé en ce doux dimanche : le très attendu retour du metal pluriel de Jesu, les nouveaux singles de proposition sombres et exigeantes avec Khthoniik Cerviiks ou Primitive Man, quelques mastodontes inévitables avec Ensiferum, Kiko Loureiro, Stryper et Lamb of God, mais aussi des propositions plus underground avec les Français de Montagne et de SyStr, les Italiens de Bleeding Eyes sans oublier notre écartade hors-extrême avec A.A. Williams.
Bon dimanche et bonne lecture/écoute !
Jesu
S.A.D.E : Naviguant dans des sphères entre drone, shoegaze et post-metal depuis plus de quinze ans, Jesu commence à avoir une discographie sacrément fournie en splits, EPs et collaborations diverses (auxquels s'ajoutent bien sûr les cinq LPs). En cette morne année 2020 (pas de date plus précise pour l'instant), Justin Broadrick propose un nouvel EP, Never, qui sortira sur son label Avalanche Recordings. On retrouve sur Because of You, le premier extrait, l'atmosphère si particulière de Jesu, toujours palpable malgré la diversité de ses propostions. Une sorte de flottement, de distance au monde s'empare de l'auditeur, une enveloppe cotonneuse moitié triste moitié pleine d'espoir s'enroule autour de nous par le biais des nappes synthétiques et du chant de Broadrick. C'est à la fois beau et froid, sans grande joie mais également sans désespoir. L'approche plus électronique qu'utilise ici Broadrick montre une nouvelle fois que le bonhomme est vraiment à l'aise dans tous les domaines.
Primitive Man
Traleuh : Viscéralement nihiliste, le couloir de mort qu'était, en 2017, Caustic, n'avait pas franchement usurpé son titre. Un Sludge monstrueux, défiguré par un enchevêtrement de Death, Noise, Drone, Black, ces immondes engeances qu'a su engendrer la musique extrême, comme parachevée dans une diagonale parfaitement rectiligne et univoque. Et cela semble également être le pari d'Immersion, tout juste annoncé par Primitive Man, tant The Lifer, en à peine sept minutes, abrège ce qu'a pu être l'expérience Caustic ; une écoute happante, drainante, consacrant l'absolu de la noirceur faite musique en une méthode fatale, limpide et frontale, rigoureusement suivie ; une marche funéraire, hurlée d'un goufre en permanente décomposition. Une immense nouvelle pour les amateurs de noirceur américaine, donc.
A.A. Williams
Raton : Au départ, je voulais vous parler du nouveau single d'Ecostrike mais c'est le même Earth Crisis-worship que d'habitude, donc je préfère quitter les sphères extrêmes pour vous causer de l'envoûtante A.A. Williams qui s'apprête à sortir son premier long format, le 3 juillet prochain. En amont, elle nous propose un nouveau single, le puissant et magique "Love and Pain".
J'ai toujours été fasciné par la capacité qu'avait la chanteuse à conjuguer l'étrangeté mystique et ésotérique aux pouvoirs des landes brumeuses britanniques. L'artiste vogue avec poésie entre dream pop et folk de chambre, proposant des mélodies à la mélancolie charnelle qui peuvent rappeler ses consœurs Darkher et Chelsea Wolfe.
Ce single ne déroge pas à la règle et dévoile des paysages aussi doux qu'hantés. Une proposition aussi singulière qu’ensorcelante qui ne fait que monter la hype d'un cran pour sa publication à venir très prochainement.
Montagne
Raton : Depuis ma découverte avec le premier EP en avril 2017, j'ai toujours été un fervent défenseur du "outdoor metal" de Montagne. Clairement inscrit dans la tradition Neurosis, le collectif parisien emploie un post-metal dopé au flanger et aux influences post-hardcore. Avec leur deuxième EP, en 2018, le groupe s'est davantage orienté vers une recette à la Mastodon en faisant moins ressortir l'approche Isis/Neurosis pour mettre en valeur le côté sludge.
Cette semaine, les revoilà avec leur premier single en deux ans, pour annoncer leur tout premier LP qui sortira en septembre 2020. Nouvelle Ô combien excitante. Plus sombre et plus grondant, "Mononoké" surprend par une immédiate et redoutable introduction. Le morceau conserve tout ce qui fait le sel du groupe : les riffs sanglants, les saveurs des grands espaces, des passages mid-tempo éclatants et un chant franc et puissant. Un titre qui augure le meilleur pour septembre.
Lamb of God
Michaël : Après un premier extrait, Memento Mori, qui nous avait séché par son intensité, sa qualité et le sentiment global que ce nouvel album s’avérerait très bon, l’essai a été clairement transformé lorsque l’on a enfin pu mettre la main sur l’intégralité de l’album. Après des années à pondre des albums en demi-teinte, le groupe semble enfin avoir montré qu’il était capable de sortir un excellent album (en intégralité), comme il a pu le faire par le passé. Ce nouveau titre, Gears, est la quintessence de ce que propose ce nouvel album : un Randy Blythe hyper inspiré à la voix toujours aussi singulière, un Mark Morton qui enchaine les riffs de qualité, une rythmique hyper efficace qui nous ferait presque (presque...) oublier Chris Adler et, surtout, une intensité retrouvée sur tous les titres. Quel plaisir de retrouver les Américains à ce niveau !
Bleeding Eyes
S.A.D.E : Une introduction toute en mélancolie et en arpèges nous accueille sur le premier morceau extrait du nouvel album de Bleeding Eyes, avant que le chant ne se fasse plus crié et que les guitares lâchent les premiers gros accords. Sans être d'une originalité folle, ce premier "single" de huit minutes laisse entrevoir une suite assez logique à Gammy, l'album précédent. On retrouve le chant en italien caractéristique de Simone Tesser, très scandé, parfois proche d'une déclamation ou d'un discours. L'instrumentation derrière reste dans le territoire doom/sludge qu'ont déjà exploré les Italiens, avec une touche de psyché dans certains arrangements et effets. Golgotha (qui sortira chez Go Down Records), avec sa pochette évoquant un monde noir et désolé, s'annonce peut-être plus sombre que son ainé, ou en tout cas plus enclin à rester dans le versant négatif des impressions offertes à l'auditeur. Reste à savoir si le reste de l'album garde cette approche sur sa totalité ou si Bleeding Eyes nous réserve quelques surprises. Réponse le 31 juillet prochain.
Ensiferum
Michaël : Ensiferum vient de dévoiler le clip d’un nouvel extrait de son prochain album, Thalassic, qui sortira le 10 juillet prochain chez Metal Blade Records. Je dois dire que ce nouveau titre, intitulé Andromeda, a de quoi mettre l’eau à la bouche. Avec des riffs dignes de l’ancien temps (le thème principal n’est pas sans rappeler Sword Chant et Token of Time), un Petri visiblement en forme et un claviériste enfin utile, on peut de plus en plus espérer que ce groupe soit un renouveau après des albums que j’ai trouvé en demi-teinte par rapport à un début de carrière fantastique. En tous cas, cette vibeold-school me plait beaucoup. Espérons, espérons...
Khthoniik Cerviiks
Traleuh : Des corridors gangrenés, des spectres atroces comme sortants de failles vaineuses, parcourant une béance insondable ; il y a comme une urgence à enfanter d'insanes chimères, sans aucune forme de pondération, chez Khthoniik Cerviiks ; comme un instinct fixé sur une bizarrerie permanente, un grotesque constant. Dans Odyssey 3000 - comme dans Recite the Kriitiikal Mæss, l'extrait précédent -, les guitares lacèrent, en des cicatrices minérales, khthoniiks ; un bréviaire tellurique, porteur de toute une sémantique reconfigurée, rappelant en cela l'illustre Portal, dont il partage ce goût pour l'abîme et ses abstractions. En sortent comme des images sourdes et violentes, des spasmes hallucinatoires qu'engendrent quelque cure de Sakel.
La collaboration avec Howls of Ebb ne faisait alors que confirmer les impressions recueillies par les premières sorties du projet : Khthoniik Cerviiks semble s'imposer, avec Odyssey 3000, dans une des déclinaisons les plus tortueuses du genre. Un Death Metal aux entrailles noires, une odyssée en excavation, un Death Metal rejoignant la mort par la route calcinée des veines.
SyStr
ZSK : Remarqué avec son premier album Gazole en 2011, très bon disque de Metal-Indus entre KMFDM et Deathstars, les Nantais de SyStr s’apprêtent à enfin sortir leur second opus qui se nommera Gigamachines. En 9 ans, le groupe a eu le temps d’évoluer et a pris un tournant assez intriguant et délirant, s’étiquetant comme faisant de l’« Electronic Body Building », adoptant une image d’ouvriers musclés et machos, proposant des remixes et surtout des reprises incongrues (Elsa, Daniel Balavoine, le "Carmen" de Bizet…), n’hésitant pas à assumer un petit côté kitsch dans sa musique frisant avec de la vieille Techno avec des vocaux vocodés de partout, que l’on a déjà pu goûter sur l’EP Megamachines sorti en 2014 avec notamment le savoureux "From New York to Montluçon". Il faut adhérer au délire… ! Et il ne semble pas prêt de s’arrêter sur cet album à venir en fin d’année, avec notamment un premier single, "Bulldozer", dans la lignée des inédits de Megamachines. Mais le deuxième extrait dévoilé, "Eat & Spare", va remettre les pendules à l’heure. Oui, SyStr demeure malgré tout un pur groupe de Metal-Indus et il est toujours aussi efficace quand il envoie les grosses grattes. Ce second single hyper percutant, parfaitement produit en sus, montre que caché sous ses facéties, SyStr est une redoutable machine de Metal-Indus, avec ici des samples qui rappelleront les meilleures heures semi-metalliques de Combichrist. La rigolade n’est jamais loin, en témoigne le court sample clôturant ce single, mais SyStr va certainement revenir très fort avec une giga-machine de Metal-Indus. On a hâte !
Kiko Loureiro
Storyteller: À Horns Up, on ne lâche pas les projets de grands musiciens comme ça. Kiko Loureiro a lancé il y a de ça quelques semaines, et vous aviez été informés dans ces colonnes, un financement participatif pour un album solo. Les mélodies de cet album seraient disponibles en open source pour que les fans puissent se les approprier et les réadapter pour plus de richesse et de partage. Mais le guitariste de Megadeth ne s'arrête pas là, puisqu'il propose cette semaine un premier titre. Il se nomme Imminent Threat et, c'est là où l'on sent l'esprit de familles des shredders, on y voit la présence d'un certain Marty Friedman, ancien guitariste de Megadeth.
Titre de cinq minutes avec un visuel plutôt coloré, géométrique et plein de métaphores, Imminent Threat est un régal pour les fans de guitares. Plutôt équilibré entre soli intenses et harmoniques bien pensés, ce sera un bon teaser pour l'album à venir.
Stryper
Storyteller: C'est dimanche et on sait qu'il y a deux choses à faire : lire la revue d'actu de Horns Up et aller à la messe. Vous avez loupé votre obligation dominicale ? Pas de souci, elle vient à vous avec le nouveau single de Stryper. Blood From Above annonce le prochain album à paraître le 4 septembre. Il s'appellera Even The Devil Believes et la pochette ne laisse aucun doute sur le côté Metal chrétien du groupe, connu aussi pour des tenues extravagantes et totalement fashion il y a bien longtemps.
Le clip ne laisse guère de doute sur le quasi prosélytisme du groupe. Vous allez sentir une auréole au-dessus de votre tête d’ici quelques minutes. Au-delà de ces considérations religieuses, le groupe nous sert un bon gros heavy avec un tempo assez enlevé. C’est assez classique mais ça fonctionne pas mal, si on ferme les yeux. L’intérêt du groupe est aussi de présenter leur nouveau membre, le bassiste Perry Richardson.