Punkach' renégat hellénophile.
Je n'ai jamais été particulièrement tenté par le mysticisme ou l’occultisme, à part d'un point de vue historique et anthropologique. Bien sûr, quand on s'intéresse à la scène Black Metal, on tombe très vite sur des groupes qui ont un point de vue très différent sur la question, voire qui consacrent l'intégralité de leur œuvre à des courants philosophiques dans lesquels je me perds un peu. Et c'est évidemment leur droit le plus strict ; la musique n'a t-elle pas un lien indivisible avec l'occulte depuis que des bluesmen se sont surpris à fréquenter de nuit des carrefours ? Et encore, j'élude là quelques millénaires de compositions rituelles !
Mais je m'égare. Car les membres de Nox Formulae sont, eux, visiblement adeptes d'un occultisme très pointu. Représentant une nouvelle scène grecque qui ne renie pas l'influence de ses aînés sans pour autant suivre aveuglément leurs traces, le groupe a sorti son premier album en 2016. The Hidden Paths to Black Ecstasy était une œuvre presque entièrement mid tempo, instaurant une ambiance mystérieuse, chthonienne même, qui virait progressivement en sarabande lascive. Un album assez conforme aux préceptes typhoniens j'imagine, qui prônent le culte d'une déesse primordiale du monde souterrain en opposition avec les cultes solaires masculins. Et surtout, un sans-faute pour un groupe qui n'avait même pas tenté de se faire connaître au préalable avec des EP.
Quatre ans plus tard, les apôtres de la Main Gauche reviennent avec Drakon Darshan Satan, un album aussi passionné que son prédécesseur était intimiste. Les riffs se font menaçants, le tempo s'accélère tandis que Wolsfbane 1.1 éructe sur "Ravens of Terror", soutenu par une voix claire désespérée. Non pas que Nox Formulae se soit lancé dans un Black Metal ultra violent, au contraire ; mais Drakon Darshan Satan est un album de transe, et non de recueillement. La tension nerveuse monte avec "Eclipse of Gharrasielh" dont le riff lancinant ne nous lâche pas, avant un "The Black Stone of Satan" qui se permet un début mélodique pour mieux virer en un hymne magnifique autant qu'indescriptible.
Drakon Darshan Satan me semble pensé comme un rituel auquel quelque chose de profondément ancien et puissant a fini par répondre, plongeant ses adeptes dans un état d'extase qui n'est pas loin de basculer dans la rage sur "The Blood Oath of Thagirion" ou "Berzeks of OD". Mais les Athéniens arrivent finalement, épuisés, face à la Révélation espérée qui se dévoile derrière les psalmodies presque nauséeuses de Monkshood 333 sur "Eve of Annihilation". Nox Formulae nous offre là une véritable leçon de Black Metal rituel, mais dans une version puissante, presque guerrière, et éminemment personnelle. Malgré une construction très différente de son prédécesseur, Drakon Darshan Satan reste une œuvre dense, bénéficiant en outre d'une production hors pair. Je ne prétends pas avoir compris tous ses mystères. Mais je la recommande.
Setlist :
Psychopath of NOX
Ravens of Terror
Eclipse of Gharrasielh
The Black Stone of Satan
The Blood Oath of Thagirion
The Arrival of Noctifer
Berzeks of OD
Eve of Annihilation