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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Savage Circus

Dreamland Manor

LabelDockyard 1
stylePower metal épique
formatAlbum
paysAllemagne
sortieaoût 2005
La note de
U-Zine
6.5/10


U-Zine

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L’égo des musiciens peut parfois détruire un groupe, parfois le souder en s’isolant dans son propre monde. L’exemple de leaders aux égos démesurés ne manquant pas dans notre chère scène metal, nous préfèrerons éviter toute polémique (les noms sont connus) afin d’évoquer les groupes plus rares où chaque membre pourrait presque faire figure de leader. Dans cette configuration peu commune, le cas Blind Guardian est longtemps resté néanmoins l’un des line-up les plus stables de la sphère métallique.
Si Hansi Kürsch, vis-à-vis de son statut de frontman, est souvent vu comme le leader des teutons, il ne faut pas oublier la place prépondérante d'André Olbrich à la six-cordes ou de Thomen Stauch derrière les fûts, eux aussi fondateurs de tout un mythe. Évidemment, lorsque ce dernier entre en conflit musical avec ses comparses, le divorce devient inéluctable et irrémédiable. L’allemand décide d’aller frapper ses fûts ailleurs pour fonder un nouveau projet qui, moins ambitieux et ostentatoire selon ses dires, renouera avec ses racines plus typiquement power metal. Savage Circus était né.

S’associant avec Piet Sielck (Iron Savior) et Jens Carlsson (Persuader), le bougre s’entend bien faire écho aux premières amours de son précédent groupe et continuer là où Somewhere Far Beyond et Imaginations from the Other Side s’étaient arrêtés : un power majestueux mais toujours empli de puissance, de rage et de mélodie, loin de la décadence symphonique et choriste présente sur un A Night at the Opera ayant visiblement dégouté le batteur.
Si l’on regrettera une pochette éminemment clichesque et ridicule pour ce premier opus intitulé Dreamland Manor (le titre n’est pas des plus inspirés non plus), on s’enfoncera dans la médiocrité textuelle vis-à-vis de mots et d’expressions maintes et maintes fois utilisées. Retour aux sources et utilisation des poncifs sont deux éléments différents que Thomen et Piet devraient apprendre à différencier…

Néanmoins, c’est réellement musicalement que Savage Circus tire son épingle du jeu et parvient à renouer avec des atmosphères disparues depuis plus de dix ans, autant grâce à une production très rugueuse et directe, parfois presque trop (un son de batterie approximatif…) qu’à des riffs souvent vraiment très agressifs et speed de bout en bout de l’album, souffrant néanmoins d’une trop grande longueur. La majorité des titres lorgnant entre cinq et sept minutes, et ce sans véritables accalmies, une sensation de saturation prend trop souvent l’auditeur à la gorge. Pourtant, lorsqu’"Evil Eyes" retentit sur la planète, la magie est directe. Jens possède une voix impressionnante, que l’on rapprochera inévitablement de Hansi mais néanmoins bien plus agressive. Les riffs sont très incisifs, Thomen martèle sa caisse claire et sa double pédale et l’on assiste à la reproduction hybride du Blind Guardian d’antan avec le Iron Savior actuel dans la façon de « riffer ». Idem dans la façon plus brutale de chanter de Jens, parfois proche de celle de Piet, même si l’on sent la réelle personnalité du suédois.

C’est avec "Between the Devils and the Seas" que Savage Circus laisse exploser tout son talent. Véritable chef d’œuvre d’atmosphère et de puissance, le morceau s’ouvre sur une ambiance pesante, quelques sonorités de claviers et surtout la ligne vocale menaçante et jouissive de Jens, avant de plonger dans un speed plus conventionnel mais tellement bien maitrisé. Puis ce refrain… majestueux, impressionnant, entêtant… avant un hurlement impressionnant et absolument impérial du vocaliste qui s’arrache comme rarement un vocaliste heavy peut se targuer de le faire. L’on peut raisonnablement penser que si Savage Circus avait accouché de neuf titres de cette trempe, Dreamland Manor aurait été un chef-d’œuvre unanime.

Malheureusement, on sent que Savage Circus s’enferme dans ses propres gimmick et peine (ou ne veut simplement pas) à en sortir, ce qui donne finalement cette sensation de trop plein et de formatage. Ce All Star Band n’apporte rien, et s’essouffle complètement sur un "It - The Gathering" speed en diable mais diablement ennuyant ou une seconde partie ayant en général beaucoup de difficulté à captiver l’auditeur.
On retiendra pourtant un magnifique "Waltz of the Demon" (splendide introduction) débutant comme une douce litanie avant de s’engouffrer dans le créneau d’un power résolument agressif et lourd, où Jens fait une nouvelle fois des merveilles avec sa voix divinement rugueuse, souvent doublée par de merveilleux chœurs, même si complètement empruntés à Blind Guardian (on regrettera aussi que l’intro de "Beyond Reality" ressemble trait pour trait à celle-ci…).
Si "When Hell Awakes" s’était payée le luxe d’être moins longue, probablement aurait-elle été aussi une composition des plus marquantes tant elle met en valeur le travail de titan abattu par Thomen derrière sa batterie, tout comme "Ghost Story", intéressante mais au final épuisant par un tel flux et déluge de notes.

Savage Circus a eu la prétention de croire qu’il suffisait de se réunir et de composer comme à la vieille époque pour produire les chef-d’œuvres passés de Blind Guardian, mais l’album a montré qu’il n’en était pas ainsi et surtout que Thomen n’était pas le seul gardien des anciens opus. Pourtant, Dreamland Manor ne manque pas de qualités et met même en scène un Jens Carlsson encore assez peu connu chez Persuader mais démontrant des qualités vocales relativement extraordinaires. Il reste cependant beaucoup trop de traditionalisme et un manque évident d’ouverture d’esprit à ces compositeurs certes chevronnés, mais éminemment refermés sur eux-mêmes. Oh doux égo quand tu nous tiens…

1. Evil Eyes
2. Between the Devil and the Seas
3. Waltz of the Demon
4. Tomorrowland
5. It - The Gathering
6. Beyond Reality
7. When Hell Awakes
8. Ghost Story
9. Born Again by the Night