La caution Grunge du webzine.
De ses fréquentations artistiques diverses à sa tessiture vocale atypique (chant grave de type masculin, oscillant entre Grunge et Dream Pop), Sierra Swan a tout du personnage intrigant, errant hors des sentiers battus. Durant ses jeunes années, elle saisit l'opportunité qui se présente à elle et s'illustre aux côtés des Black Eyed Peas en 1998 avec sa soeur. Sa participation demeurera plus qu'anecdotique, son rôle dans le groupe s'étant limité à enregistrer des backing-vocals sur le morceau d'ouverture d'un album. Même s'il s'agit peut-être d'une coïncidence, on ne peut s'empêcher de faire le lien entre cette courte expérience, et la chanson Black Eyed, extraite d'un effort en solo, produit par Billy Corgan. De surcroît, le contenu lyrique de cette dernière s'inspire beaucoup de Smashing Pumpkins ("I've got a bag full of love right here / And you can have it"). Si l'on prête attention à la discographie de l'artiste, on se rend compte que ses influences Grunge ne sortent pas de nulle part. À l'entame des années 2000, les membres de la Cold "Army" la considéraient déjà comme le sixième élément du groupe. Elle posa sa voix pleine de cachet sur des titres tels que No One et Suffocate. Grâce à ces collaborations marquantes avec des formations issues de la vague Post-Grunge (Cold, Depswa), elle obtint une certaine renommée dans le milieu (toutefois modérée). En marge de sa carrière solo qui poursuit son cours, l'Américaine nous présente un EP de cinq morceaux, composés par le nouveau duo qu'elle forme avec Chad Weber.
Passé le temps de l'incompréhension due à la personnalité hautement complexe de Swan, les réticences s'atténuent et laissent place à de la curiosité. Dans un disque comme celui-ci, l'ajout d'arrangements aurait été au moins tout aussi maladroit que de présenter des morceaux trop sophistiqués, ne répondant pas au style plutôt sobre du duo. Contrairement à de nombreux groupes chez qui l'ambiance se construit à partir d'un travail sur l'instrumentation, dans le cas de W/Child, le chant assume seul ce rôle (Don't Even Bother, Scrapes While It Hugs). Les interventions du musicien servent à accompagner la voix ou à accentuer une émotion déjà existante, et non à en créer une nouvelle. Par conséquent, la guitare a une importance mesurée. On a toutefois la sensation, en analysant le mixage final de Scrapes While It Hugs, que sa tonalité très sombre facilite les placements de voix de Sierra Swan. Effectivement, cette ambiance noire et au tempo ralenti se prête mieux à son registre de voix que quelque chose de beaucoup plus rythmé où elle éprouverait sûrement des difficultés à suivre la cadence imposée par son partenaire. Il est également amusant de remarquer les ressemblances qui existent entre la fin du morceau et les outros psychédéliques de Truly. En effet, même si les titres paraissent simples en apparence, à leur façon, ils sont recherchés. À l'inverse de Liquid Space et de son refrain énergique et pour le moins très identifiable, Innocent n'en possède aucun. Seul un court motif répété deux ou trois fois le remplace ("innocent, innocent"). Cette absence de refrain ajoutée à cette voix monotone, rend le morceau pesant et linéaire. Entre une Gwen Stephani en plus dark et le Marilyn Manson ténébreux que l'on connaît, la chanteuse incorpore différentes influences dans sa voix. Un petit côté New-Wave transparaît également dans l'EP (Torch Us, Liquid Space) du fait des claviers aux sonorités vintage et de l'attitude Punk du duo, mais il ne dénature pas l'ensemble. Au contraire, il l'enrichit et équilibre les deux facettes de la musique du duo que sont la "Pop" et le Grunge, dans sa version la plus sinistre.
Seize ans ont beau être passés depuis le dernier enregistrement de Sierra Swan avec Cold, il flotte dans cet EP une noirceur équivalente à celle exposée dans 13 Ways to Bleed on Stage (comme en témoigne la mélodie à la guitare d'Innocent à partir de 3:08). Ces cinq titres de démo sont, en tout cas, une belle démonstration du talent et de l'énorme potentiel de W/Child.
Tracklist :
- Innocent (03:55)
- Liquid Space (04:12)
- Don't Even Bother (ft. Stephen Perkins of Jane's Addiction) (04:36)
- Scrapes While It Hugs (04:01)
- Torch Us (04:33)