Chronique Retour

Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Mutiny Within

Mutiny Within

LabelRoadrunner Records
styleMetalcore
formatAlbum
paysUSA
sortiefévrier 2010
La note de
U-Zine
7/10


U-Zine

U-zine.org, webzine musical metal actif entre 2004 et 2015. Fermé en 2015 suite à sa fusion avec 2Guys1TV, ses articles (chroniques, live-report, interview, dossiers, ...) sont désormais disponibles directement sur Horns Up via ce compte !

Mutiny Within est l'exemple parfait de ce que toute l'industrie du metal et du disque en général peut produire en bien et en mal. On peut dire que ce groupe de metalcore américain est né avec une cuillère en argent dans la bouche : ils sont signés chez Roadrunner, et ont donc toute la promotion qui va avec, ils sont sur la bande originale du jeu vidéo God Of War 2, ils font une tournée avec Soilwork et ils ont eu le luxe d'avoir un parrain pour mieux se lancer dans le grand bain : Dream Theater. La bande à Portnoy a reconnu dans l'album un croisement entre leur groupe et Killswitch Engage. Drôle de mélange et surtout drôle de pression sur les épaules d'un groupe encore inconnu mais qui a tout à faire. Du coup ils n'ont pas eu l'occasion d'embaucher quelqu'un pour faire la pochette parce que là, c'est service minimum. Au moins là dessus, ils ne prennent pas de risques.

Juste pour l'anecdote, le groupe s'appelait Mutiny et ils ont commencé comme cover band de Children of Bodom. Il faut dire qu'en huit ans d'existence ils ont eu le temps de se construire une certaine expérience et d'écrire une centaine de chansons. Oui, vous avez bien lu, une centaine, on ne rigole pas quand on compose chez Mutiny Within. Surtout qu'à un moment, il a fallut en choisir onze pour donner chair à cet album. Poussés qu'ils étaient par leur maison mère, ils ont donc pris seulement le meilleur (dixit le seul membre originel du groupe Andrew Jacobs le bassiste). En même temps, on se doute qu'ils ne vont pas faire une compilation gag de leurs titres les plus pourris. Une belle Lapalissade en somme.

Nous ne sommes évidemment pas en mesure de juger de la pertinence du choix, puisque les 90 morceaux mis au rebut ne seront révélés que pour relancer le groupe pendant une période creuse ou agrémenter les rééditions, mais on peut dire qu'Awake est un bon départ. Vous remarquerez la possible référence à Dream Theater. Le titre d'ouverture est enlevé, rentre-dedans et respecte parfaitement la dualité extrême / mélodie du genre. On se laisse conquérir par le tempo, la technique, la diversité et les différents timbres de Chris Clancy.

En lisant la bio du groupe, on note qu'une grande partie est consacré au chanteur, seul membre britannique du combo. Et c'est vrai que son talent, qui réside dans son amplitude vocale est assez impressionnant. Il varie à l'intérieur d'une même phrase avec des transitions assez naturelles (Oblivion). Il est à l'aise avec ses capacités vocales et cela se sent, du coup il n'a pas peur de tenter des parties un peu plus osées et du coup plus intéressantes que celles de ses congénères.

Mais il n'est pas le seul à avoir un réel talent dans Mutiny Within. Les guitaristes sont aussi des virtuoses et n'hésitent pas à servir à l'auditeur leur portion de shred. Vous retrouverez l'esprit moderne que l'on sent chez Scar Symmetry par exemple. Pas forcément très longs mais denses en terme de mélodie. Pour les riffs, on reste dans le concept metalcore à la Killswitch Engage, avec souvent deux parties de guitares distinctes, afin de rajouter es couches à la musique comme sur Oblivion. La troisième couche étant celle des claviers, omniprésents en ambiance. S'ils restent très en retrait au niveau du son, ils n'en restent pas moins là et évitent le cliché des nappes à outrance et donc du musicien pot de fleur.

Pour ce qui est de la musique elle-même, Mutiny Within voulait avoir un esprit progressif dans leur composition tout en conservant l'énergie du metal. Les rythmiques sont souvent rapides comme sur Lethean ou Awake, débordant parfois sur quelques blasts de décoration. On découvre aussi des plans que l'on connait chez Soilwork, et qui sont typiques d'un metal typé plus facile d'accès : le début et le refrain de Suffocate, Year Of Affliction qui sonne comme du Dark Tranquillity nouvelle période... et pour finir on pourra parler de repompe de Killswith Engage sur Falling Forever. Vous voyez donc que l'alchimie regroupe les tendances les plus vendeuses du moment. Mutiny Within est un groupe intelligent qui a su créer un patchwork de ce que l'auditeur nord-américain et par extension, européen attend d'un groupe de premier plan.

Ce commentaire, comme vous l'avez remarqué, n'est pas dépourvu d'une certaine critique. Car donner un statut de star à une formation qui n'a pas encore fait ses preuves devant le public et surtout devant l'histoire est une entreprise risquée. Cela crée des attentes, et l'on se doit de les atteindre. Alors pas le droit aux morceaux moyens et malheureusement cet album en contient : Falling Forever est plus que bateau, tout comme Undone. En fait on se rend compte qu'ils ont réussi à composer avec les obligations du genre, sans pour autant les sublimer. De même à trop vouloir jouer sur plusieurs terrains, on ne s'y retrouve pas au final. On sent le côté compilation de ce premier album.

De plus quel avenir pour un groupe qui a écrit cent titres avant d'en tirer la substance d'un seul album ? On a raison d'être enthousiaste pour le moment car Mutiny Within mérite qu'on s'y attarde, mais de là à les nommer les successeurs de Killswitch Engage, il y a un pas que je ne pourrai pas franchir, car la pérennité de leur travail est limité aux spotlights que l'on veut bien braquer sur eux. Le metal serait donc aussi victime d'un star system qui pourrit le reste des genres et qui vit aux dépens des musiciens talentueux ? Allez savoir, en attendant écoutez donc cet album, ça va vous détendre.

1. Awake
2. Images
3. Falling Forever
4. Year of Affliction
5. Forsaken
6. Lethean
7. Oblivion
8. Undone
9. Hours
10. Suffocate
11. Reflections