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Je me souviens il y a fort longtemps avoir discuté avec Mattias Ia Eklundh à la sortie d'un concert de Freak Kitchen. Je lui avais demandé d'où était venue cette idée de nom de groupe. Il m'avait simplement répondu : « j'aime bien le mot « Freak », j'aime bien le mot « Kitchen », alors j'ai décidé de les mettre ensemble et voilà le nom de mon groupe. » Désarmant de simplicité, d'humour et de second degré, un bon résumé de l'esprit des Suédois. Depuis Move, le groupe cherche à retranscrire sur chaque album cet incroyable esprit qui mélange métal, virtuosité à la guitare, trouvailles pour le moins originales (le vibromasseur, un téléphone-jouet... utilisés comme instruments) et une bonne dose d'humour. Land of the Freaks ne déroge pas à la règle, avec son jeu de mot dans le titre, en référence à the Land of the Free, surnom donné aux USA, et à l'album de Gamma Ray. Deuxième constante, la pochette est toujours aussi moche. Il est rare que les illustrations se suivent, ne se ressemblent pas, mais sont toutes aussi laides, en restant conceptuelles bien sûr. Le son global de l'album reste semblable à ce que l'on a pu entendre sur Organic et Move, avec peut-être un peu plus de basse. Je ne suis pas un grand fan du son de guitare, mais je le reconnais volontiers comme une marque de fabrique de Mattias.
On remarque donc que les bases sont jetées pour que l'on ne se sente pas dérouté par Land of the Freaks. C'est donc en confiance que je commence l'écoute. Freak Kitchen est un groupe qui s'écoute sur deux plans : la musique et les paroles. Eklundh, en bon parolier, s'attache à donner un fond à ce qu'il chante et à animer ce qui se passe autour avec force effets. On a presque l'impression qu'ils recherchent des thèmes à critiquer avant de construire une musique autour. Cette fois-ci, on a le droit au trafic d'organes (God Save The Spleen), aux hypocondriaques qui nous cassent les pieds (Sick ?), à l'affaire des caricatures de Mahomet et à ses conséquences (Teargas Jazz) et j'en passe. Il faut être honnête, si vous ne maîtrisez pas l'anglais, ou si vous ne prenez pas le temps de vous pencher sur les paroles vous allez louper une grosse partie de l'intérêt de cet album. Le langage est fin, imagé et périphrastique, contrairement aux paroles plus directes auxquelles nous sommes habitués dans le métal.
Mais pour enrober le tout, le trio nous sert ce qu'ils savent faire de mieux : une musique qui part dans tous les sens sans pour autant perdre le fil conducteur de chaque titre. Côté trouvailles, Eklundh s'est tourné vers l'Inde et a incorporé des sons locaux sur Teargas Jazz, petite chronique d'un voyage mouvementé au pays de Gandhi (voyez le clip par ici pour vous faire une idée du rendu). On retrouve quelques titres musclés comme Honey, You're a Nazi, Murder Groupie ou encore God Save The Spleen. Ces titres possèdent tous leur part de folie avec des soli improbables ou des breaks sortis de nulle part. Car Mattias sait tout faire avec une guitare, alors la limite c'est son imagination, et Dieu seul sait si le bougre en a !
Mais il a aussi le sens du collectif et n'hésite pas à passer le micro sur The Only Way, nous refaisant ainsi le coup de Razor Flowers, en laissant chanter Cristfer Örtefors, bassiste du groupe. Ce dernier prend d'ailleurs un peu de galon avec un son plus présent sur tout l'album. Sa basse claque bien sur One Last Dance ou Sick, de plus il faut bien préciser qu'il est le seul soutien de Mattias qui ne double pas toujours ses guitares pendant les soli. Par contre, le batteur, Bjorn Fryklund, me semble faire le chemin inverse avec un jeu plus sobre, même s'il ne lésine pas sur les finesses comme il sait si bien le faire. Sur l'ensemble je l'ai senti plus en retrait, sans état de grâce sur l'album. Je ne remet pas en cause son immense talent, je constate une évolution dans son jeu, à mon goût
Il me semble que cette sensation vienne du fait que dans l'ensemble, Land of the Freaks est un album plus soft que Move, le disque référence du groupe, ou peut-être est-ce la recette qui marche un peu moins bien. On y retrouve plus de mélancolie comme sur OK, moins de moments métal complètement débridés, ou de chansons coups de poing comme Silence, par exemple. Certes vous allez entendre des morceaux qui passent tous seuls et dont le refrain vont rester dans votre cerveau jusqu'à ce que vous deveniez chèvres comme Sick, ou le Hip Hip Hooray que l'on s'entend déjà chanter en concert. Mais parfois le fond prend le pas sur la forme comme sur Do Not Disturb, et on peut comprendre que certains auditeurs ne verront pas un grand intérêt à ce genre de titre.
Cela dit la musicalité, le côté vraiment fun de Land of the Freaks nous montre que Freak Kitchen maîtrise son art et sa personnalité hors du commun. Donnez vous le temps de vous pencher sur cet album, profitez de ses influences orientales, jazzy, hard rock pour voyager avec le groupe. Il reste un peu plus accessible que ses prédécesseurs alors il pourrait être un bon point d'entrée dans le monde des Suédois, avant de venir les voir en concert, moment qui révèle toute cette bonne humeur que le trio ne dissimule pas. D'ailleurs, on pourrait presque se demander ce qu'ils prennent au petit déjeuner pour être d'humeur aussi constante ! Pour finir on peut signaler leur signature chez Roadrunner qui va leur assurer la promo dont ils sont dignes et une place au Hellfest 2010.
1. God Save the Spleen
2. Hip Hip Hoorah
3. Teargas Jazz
4. Sick? (Death by Hypochondria)
5. OK
6. Honey, You’re a Nazi
7. The Only Way
8. Murder Groupie
9. The Smell of Time
10. One Last Dance
11. Do Not Disturb
12. Clean it Up