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Transmettre, communiquer avec, voilà ce que veut dire Abinaya en sanscrit. Apparu à l’aube du second millénaire, ce groupe parisien avait transmis un premier album plutôt grunge – néo metal. Assez unique à l’échelon français, Abinaya s’est musclé pour son second disque intitulé Corps. Pourquoi unique ?
Parce qu’en plus de s’être orientés davantage vers le metal, les parisiens mettent en avant une musique tribale originale, des textes très travaillés et engagés (Baudelaire, Gainsbourg sont leurs sources d’inspiration), une chaleur et une énergie peu courante. Le très beau digipack en est la preuve : Abinaya, c’est le rouge et le jaune du feu, et les nombreuses photos prises en concert contenue dans celui-ci laissent augurer d’un groupe au fort tempérament sur scène (c’est le cas, j’ai pu le vérifier).
L’homme communique en parlant et en faisant des gestes, ce n’est un secret pour personne. Par contre, beaucoup négligent les informations transmises par notre « Corps ». C’est ce que semble dire le premier morceau éponyme, de l’album. Celui-ci donne rapidement le ton avec une intro tribale, des riffs de guitare incisifs, une rythmique plutôt de rock énervé et une double pédale bien présente à la batterie. On s’attend donc à un disque au cocktail riche en ingrédients différents, et c’est le cas dans un premier temps. « Enfant D’Orient », qui dénonce les massacres perpétrés au moyen orient, confirme cela. Ce morceau met en avant le chant d’Igor, proche d’un Noir Désir, tantôt colérique, tantôt éploré. Il est un parfait outil de communication de la musique d’Abinaya. Très souvent, il y a même une superposition de voix, association d’un chant « normal » et de l’aigu, donnant de la profondeur aux messages transmis. Cette profondeur se retrouve dans la variété des influences du groupe, à travers les trois titres suivants : « L’Homme Libre », « Regarder Le Ciel », aux gros riffs aiguisés et aux petits soli de guitare intéressant, « Algo Mais », plus mélancolique et tout aussi réussi.
Mais la suite du disque m’a fait déchanter un peu (et même beaucoup parfois). A part le catchy « Les Chars De Police » et « Partir Puis Revenir », je n’ai pas été conquis. Au passage, « Partir Puis Revenir », ballade avec violons et guitares acoustiques, mêlant tristesse et espoir, est très bonne. Mais pour moi, elle aurait été la pause idéale en milieu d’album. Abinaya l’a placée presque à la fin. Avoir mis ensuite « La Mort Des Amants » (textes de Charles Baudelaire), a été un autre problème pour mon écoute. Il est le morceau que j’aime le moins dans l’album, n’y trouvant pas l’accent tribal présent sur le reste du disque, pas assez d’énergie dans la rythmique, et seul son solo de guitare final a maintenu mon attention.
Ce positionnement sur Corps, et les deux autres morceaux moins bons que sont « Testament » (moins prenant) et « Résiste », font que la fin de l’album ne reflète pas assez ce dont Abinaya est capable. « Résiste » est malgré tout dans le ton des morceaux du début de Corps, mais n’a pas la fougue de ceux-ci.
Si on fait l’état des troupes, j’ai trouvé la prestation de chaque membre d’Abinaya très professionnelle et carrée. De plus, il y a du talent à la composition. La production de Corps met bien en valeur le travail de chacun et offre un son massif, c’est un bon point du disque. Igor le seul guitariste, s’en sort très bien, à la fois dans son chant et dans son jeu aux 6 cordes. Deux Nicolas sont présents dans le groupe : tout d’abord un batteur aveugle dont il faut souligner la performance compte tenu de sa cécité. Il forme un très bon duo avec l’autre Nicolas, percussionniste. Ce dernier apporte un plus très fort à Abinaya : il lui donne du caractère, chaque morceau a une saveur épicée, on se prendrait à voyager au sein d’une tribu lointaine. De plus, pour avoir vu le groupe en live, je peux dire que Nicolas Héraud est impressionnant. Enfin, le brésilien de la bande, Andreas, m’a beaucoup plu, à la fois sur album et en concert. Il a un jeu très vivant.
Pour terminer, Corps n’est pas resté indifférent à Andreas Kisser (Sepultura), qui a découvert le groupe parisien lors de son passage dans la capitale durant l’été dernier. Abinaya n'a pas fait dans la dentelle (enfin si, les calaisiens comprendront ma boutade…) et ce second album a montré que les parisiens ont une belle marge de manœuvre devant eux. Corps m’a plu globalement, mais j’ai trouvé dommage ces quelques disparités entre les titres du début et de la fin. Leur musique atypique, leur énergie sur scène et leurs textes engagés devraient toucher beaucoup de gens. Le message sera-t-il transmis ?
1. Corps
2. Enfant D'Orient
3. L'Homme Libre
4. Regarder Le Ciel
5. Algo Mais (Quelque Chose De Plus)
6. Les Labels
7. Testament
8. Les Chars De Police
9. Partir Puis Revenir
10. La Mort Des Amants
11. Résiste