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Album

04 décembre 2018 - ZSK

Embryonic Cells

Horizon

LabelApathia Records
styleBlack Metal épique
formatAlbum
paysFrance
sortienovembre 2018
La note de
ZSK
7.5/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

Avec sa signature récente sur Apathia Records, on aurait pu croire que Embryonic Cells est un newcomer. Mais ceux qui connaissent un peu la scène Metal française savent que le groupe troyen penche plutôt vers la catégorie des vieux de la vieille. Embryonic Cells a en effet vu le jour en… 1994 ! Une longévité qui force le respect, même si le groupe n’a pas percé plus que de raison. Horizon est son 4ème album et succède à Before The Storm (2007), Black Seas (2008) et The Dread Sentence (2012). Embryonic Cells est donc un groupe qui prend son temps (ses deux premières démos sont sorties respectivement en 1999 et 2001) et ne se sacrifie jamais pour une quelconque productivité qui risquerait de devenir stérile. Alors que quatre ans séparaient Black Seas et The Dread Sentence, Horizon nous arrive après un délai de six années. Il aura fallu être patient, mais Embryonic Cells est bien là, avec son style plutôt personnel. The Dread Sentence s’était d’ailleurs avéré être plutôt prometteur, après des débuts autoproduits forcément balbutiants. Il nous tardait donc de découvrir comment les gars de Troyes vont évoluer, toujours accompagnés par le claviériste Pierre Le Pape (Melted Space). Car oui, Embryonic Cells est un groupe à claviers. Et évolue dans le genre Black-Metal. De là à croire que nous avons affaire à un avatar de Dimmu Borgir et consorts, il n’y a qu’un pas, mais ce serait réducteur pour présenter Embryonic Cells et de toute manière, ce n’est pas franchement le cas. Depuis son premier album, Embryonic Cells marie davantage un Black/Thrash plutôt efficace et un Black mélodique et surtout épique, plutôt que purement symphonique. The Dread Sentence avait déjà permis au groupe de trouver son équilibre, entre un Black/Thrash légèrement old-school (version nordique) et des aspirations épiques qui peuvent évoquer de grands paysages tout autant que Lovecraft, qui reste une des sources d’inspiration lyriques de la formation troyenne. Le résultat est tout autant cru qu’enivrant, et avec Horizon, Embryonic Cells va continuer sur cette lancée.

En six ans, beaucoup de choses auraient pu se passer pour n’importe quel groupe mais Embryonic Cells est resté lui-même, jusque dans les moindres détails. Seul le poste de bassiste a fait l’objet d’un mouvement de personnel, et Embryonic Cells s’articule toujours autour du guitariste-chanteur Max, qui en outre dessine les artworks du groupe. Ainsi, alors que le groupe aurait pu passer un cap vers la modernité, utiliser un son « bombastic » et tout le toutim, il a choisi de rester old-school en toutes circonstances. Dans le fond comme dans la forme, Horizon est donc dans la stricte continuité de The Dread Sentence et conserve cet esprit du Black « sympho » des années 90, en faisant d’Embryonic Cells un des rares groupes évoluant dans le domaine avec par exemple un Mist Of Misery. Son des riffs tout comme claviers sonnent donc nineties à chaque moment, et Embryonic Cells conserve donc ce côté organique et authentique. Par rapport à The Dread Sentence, il y a donc peu de changements dans la forme, si ce n’est que la production globable s’est tout de même améliorée, avec plus d’équilibre et de relief, et que le chant grogné voire un peu trop « déguelé » d’antan a laissé place à un chant majoritairement criard plus classique, avec pas mal de réverb, là aussi pour garder cet esprit old-school en toutes circonstances. Et donc, Embryonic Cells est aussi un groupe de Black « à claviers ». Mais comme pour The Dread Sentence, ceux-ci n’occupent pas grossièrement et grandiloquement l’espace, et sont surtout là en fond pour créer et faire vivre les ambiances. Pierre Le Pape a encore fait du très bon boulot, et là aussi ça sent bon le BM sympho des années 90. Enfin sympho, avec Embryonic Cells il convient plus de parler de Black-Metal « épique » vu que nous sommes vraiment dans cet esprit, quelque chose de guerrier et atmosphérique à la fois, rien de bien horrifique ou trop pompeux, les troyens étant plus du genre à exhiber muscles et épées au sommet de la montagne, enfin c’est ce que ça donne envie de faire.

Entre efficacité et epicness, Horizon se dessine alors, et se pose bien vite comme une version améliorée de The Dread Sentence. L’intro "Crossing" nous met alors dans l’ambiance, avant que "Don’t Serve Your King" n’aligne d’entrée des trémolos bien sentis et quelques rythmiques cossues. Le style d’Embryonic Cells n’est d’ailleurs plus vraiment à classer dans le « Black/Thrash », plutôt dans un BM old-school classiquement mélodique, malgré quelques passages rythmiques toujours efficaces, dès ce premier vrai morceau d’ailleurs. Et avec ces quelques montées mélodiques et le chant certes cru mais vraiment prenant de Max, on se retrouve bien vite dans un terrain épique, avec bien sûr en point d’orgue le fond de synthés très maîtrisé et même assez envoûtant, malgré des sonorités finalement classiques. Embryonic Cells est inspiré et démarre ainsi cet album sur les chapeaux de roue, avec le très incisif "Carved in My Skin" qui regorge de riffs bien tranchants et de lignes vocales délicieusement saturées, mais qui s’offre tout de même un break atmosphérique très onirique ; et surtout pour "Never Let You Fall" qui est un véritable hymne, avec un refrain ravageur accompagnant des cavalcades mélodiques de haute volée et toujours quelques rythmiques bien saignantes, le tout avec une ambiance quasi-médiévale mais toujours guerrière à souhait. Après avoir balancé ses hits, Embryonic Cells va ensuite s’échiner à travailler son art et justifier encore plus le qualificatif « épique » qu’on lui donne. Les Troyens vont alors se laisser aller à de nombreuses envolées atmosphériques ou autres breaks quasi-acoustiques, et cela va commencer avec le fleuve "Across the Mountains" qui tutoie les huit minutes. Embryonic Cells élargit sa palette, avec des mélodies plus libératrices et un chant plus varié à la limite du growl, on sent même la formation lorgner vers un The Great Old Ones dans l’inspiration Lovecraftienne. Et nous aurons droit à un des grands moments de Horizon avec ce break central à nouveau quasi-médiéval, particulièrement enivrant et émotionnel, où le groupe se prend à tutoyer les cieux.

La seconde partie de Horizon est donc résolument placée sous le signe de l’epicness, avec notamment le diptyque-titre "Horizon…" - "To Horizon", avec de l’acoustique, des trémolos qui font voyager, un chant Black possédé, des montées lumineuses et attention, du chant clair histoire de franchir encore un autre rubicond de l’épique. Embryonic Cells tente de toucher le sublime, même s’il revient vite sur terre en finissant cette belle œuvre par des riffs hyper old-school et du chant très glaireux, histoire de joindre avec brio les deux bouts de son art. Et pour le grand final "No Boundaries", ce sont les claviers qui vont se lâcher pour une fois, mettre en valeur l’étiquette « symphonique ». Mais tout Embryonic Cells est finalement là-dedans, avec des riffs encore bien tranchants et tout le spectre vocal de Max, de quasi-growls caverneux au chant clair presque grégorien, en passant bien sûr par le chant Black saturé qui fonctionne très bien dans le style du groupe. Avec tout ça, Horizon justifie bien le côté « épique » qu’on colle à Embryonic Cells, avec un touché finalement personnel, le groupe n’étant pas à classer dans les disciples de Summoning. Après, tous les ingrédients employés sont assez classiques, et Embryonic Cells ne révolutionne pas grand-chose, comme tout groupe estampillé « old-school » après tout. Le savoir-faire est là, et les Troyens réussissent bien à donner du BM nineties tout en proposant leur propre univers, qui prend vie dans des facéties épiques qui coupent souvent le souffle. Malgré ses 24 ans d’existence, Embryonic Cells a tout de même encore de la marge de progression et d’évolution, et on aimerait qu’il aille encore plus loin, creuse encore plus son univers foisonnant, sans renier ses bases de Black mélo/sympho old-school qui fonctionnent aussi bien. Horizon est donc comme je le disais une version plus poussée et encore meilleure de The Dread Sentence plutôt que d'être un aboutissement total, qui comblera néanmoins leurs fans et ceux de ce genre assumé vieille école en général, même si certains éléments ne plairont pas à tout le monde (en particulier le chant réverbé qui a ses détracteurs). Sans réinventer le genre, Embryonic Cells a livré une belle pièce de Black-Metal épique et particulièrement authentique, qui nous fait facilement planer dans de belles contrées brumeuses.

 

Tracklist de Horizon :

1. Crossing (1:09)
2. Don't Serve Your King (4:53)
3. Carved In My Skin (5:19)
4. Never Let You Fall (4:44)
5. Across The Mountains (7:39)
6. Horizon... (2:54)
7. To Horizon (6:10)
8. No Boudaries (7:09)