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Album

18 mai 2018 - ZSK

Alkaloid

Liquid Anatomy

LabelSeason of Mist
styleMetal progressif extrême
formatAlbum
paysAllemagne
sortiemai 2018
La note de
ZSK
7/10


ZSK

"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."

En 2014, les départs conjugués de Hannes Grossmann et Christian Muenzner d’Obscura ont provoqué un séisme chez tous les amateurs de Death-Metal technico-progressif. Mais si Obscura est heureusement toujours là et semble garder sa forme malgré le départ de membres importants, Grossmann et Muenzner ont bien vite rebondi. Le premier a déjà son projet solo qui a sorti deux albums en 2014 et 2016, idem pour le second (deux skeuds remontant à 2011 et 2014), mais ils n’allaient pas en rester là et c’est ainsi que Alkaloid est né. C’est même l’aboutissement pour une bande de potes qui collabore de longue date dans divers groupes. On retrouve ainsi dans Alkaloid, outre Grossmann et Muenzner, Linus Klausenitzer (Noneuclid, Hannes Grossmann, et Obscura chez qui il officie toujours), Morean (Dark Fortress, Noneuclid) et Danny Tunker (passé par Aborted, God Dethroned, Prostitute Disfigurement mais aussi Spawn Of Possession avec Muenzner), auxquels on peut ajouter V.Santura (Triptykon, Dark Fortress, Noneuclid, Hannes Grossmann) qui avait produit le premier album, The Malkuth Grimoire (2015). Une fine équipe qui semble avoir décidé de faire route commune pour définitivement poser leur style, Alkaloid - dont le nom semble renvoyer au morceau d’ouverture de Metatheosis de Noneuclid, "Paranoid Alkaloid" - étant assez logiquement une sorte de mélange entre Obscura, Noneuclid, Dark Fortress et le projet Hannes Grossmann. Une manière de stabiliser les choses, même s’il n’est pas exclu que les projets solo et Noneuclid soient réactivés un jour. Alkaloid avait initialement choisi l’autoproduction pour The Malkuth Grimoire mais Season Of Mist a finalement récupéré le bébé, pour rééditer leur premier stuff et se charger de la sortie du second, Liquid Anatomy. Un second album forcément attendu pour tous les amateurs du Techno-Death allemand, de Noneuclid et de Dark Fortress aussi, sous le sobriquet du « Metal progressif extrême » qui pioche autant dans le Black de Dark Fortress, le Death d’Obscura et le progressif de Noneuclid.

Après un The Malkuth Grimoire très convaincant, qui voyait les musiciens tempérer la technique furibonde dont ils font preuve pour passer sur un registre plus axé sur les ambiances en piochant dans le Black-Metal (même si Hannes Grossmann le faisait déjà sur l’album The Radial Covenant), Alkaloid va poursuivre sa carrière et est rapidement devenu un groupe à plein temps alors qu’on pouvait surtout le considérer comme un all-star band à la base. 3 ans plus tard, pas grand-chose n’a bougé, si ce n’est que V.Santura n’est plus de la partie et que Hannes Grossmann a repris toute la production, laissant juste le mastering à Alan Douches. Dommage parce que je considère V.Santura comme un des meilleurs producteurs de Metal extrême, mais Grossmann a bien fait le boulot pour reproduire le même son puissant et gras de The Malkuth Grimoire, qui sied bien à ce Metal voulu quelque peu Lovecraftien. On ne change donc presque rien, aussi Liquid Anatomy ne va pas surprendre le moins du monde, et va surtout se contenter d’essayer de transformer l’essai de son prédécesseur. On ne clignera ainsi pas des yeux à l’écoute du chant clair toujours aussi particulier et original de Morean, qui redébarque dès l’ouverture sur "Kernel Panic". Un opener dans la lignée voire carrément identique à celui de The Malkuth Grimoire avec "Carbon Phrases", avec toujours ces incursions de Metal technique bien mordant qui viennent épicer les passages acoustiques assez lumineux, plutôt que l’inverse. Pas de surprise non plus à l’écoute de "As Decreed by Laws Unwritten", qui nous refait le coup du Death-Metal bien lourd de "Cthulhu" mais pendant 8 minutes, où l’on sent d’ailleurs bien l’influence du Morbid Angel période Tucker, au point même de dire que le collectif allemand ne n’est pas foulé et donne ici dans le photocopiage pur et simple de Morbid Angel… Heureusement, Alkaloid convainc aisément dans le fond avec sa qualité de composition et d’exécution, et dans la forme avec un son que même le grand Morbid n’a jamais eu. On se dit tout de même que la formation allemande n’a pas eu d’idée révolutionnaire sur le coup (ou a voulu rendre un petit hommage ?) mais se rattrape bien vite avec l’excellent "Azagtoth", assurément le hit de cet opus voire le meilleur morceau sorti par Alkaloid jusque-là, où le touché à la Obscura revient en force pour une composition assurément passionnante et efficace, avec des riffs ultimes tout comme des passages de génie, notamment les solos de folie et le chant clair qui n’a jamais été aussi pertinent et maîtrisé.

Mais patatras, tout s’effondre. Comme on pouvait le sentir à l’écoute des deux premiers morceaux qui appliquaient à nouveau certaines recettes de The Malkuth Grimoire - même si ça fonctionne toujours - Alkaloid va finir par manquer d’idées. Le Metal extrême va même quelque peu s’effacer au profit de la composante plus progressive ! Ce qui n’est pas un mal en soi mais Alkaloid va vite trouver ses limites, notamment le chant clair de Morean qui devient un peu discutable sur "In Turmoil’s Swirling Reaches". Très doux et mélodique, le morceau-titre n’apporte rien, de même que "In Turmoil’s Swirling Reaches" qui joue dans la même cour avec pas mal de mélodies, contrebalancées par quelques fulgurances techniques et des instrumentations légèrement jazzy (avec une basse qui se fait bien entendre). Le registre plus acoustique du groupe prédomine alors sans panache, heureusement la lourdeur est de retour pour "Interstellar Boredom" mais ce morceau a du mal à décoller, malgré la belle performance de Morean. On sent quand même qu’après ce milieu d’album plus posé, Alkaloid a envie d’exploser et va le faire pour le bien nommé "Chaos Theory and Practice", huit minutes trente d’un condensé de chaos et de complexité, avec des compos complètement folles, à la fois lourdes et techniques. C’est vraiment dans le registre extrême que Alkaloid excelle, et Liquid Anatomy va alors s’avérer hétérogène. Le fleuve "Rise of the Cephalopods" va conclure cet opus de belle manière, en passant en revue tous les talents de Alkaloid avec des moments de grâce, même si on trouvera forcément quelques longueurs dans cette pièce de presque 20 minutes. The Malkuth Grimoire avait aussi ses longueurs mais si Liquid Anatomy est plus digeste dans l’absolu, il tape parfois à côté, en voulant trop en faire que ça soit dans la lourdeur ou la progressivité. Bref, l’essai n’est pas vraiment transformé, Alkaloid copiant parfois ce qu’il avait fait sur son premier album, convaincant moins sur certaines composantes, et ne bénéficie plus de l’effet de surprise. Reste les talents des musiciens, l’originalité relative du style et quelques moments bien sentis pour faire de Liquid Anatomy une satisfaction. Toute relative quand on connaît le background des musiciens et les précédents, que ça soit le premier album d’Alkaloid ou les albums solo de Hannes Grossmann et Noneuclid. Pas vraiment une déception, mais on attendait peut-être un peu plus de ce collectif aux qualités indéniables, qui ici s’est contenté de peu malgré son potentiel et un hénaurme premier single. Espérons qu’ils parviennent à se renouveler et pourquoi pas repasser par Noneuclid d’ailleurs…

 

Tracklist de Liquid Anatomy :

1. Kernel Panic (5:42)
2. As Decreed by Laws Unwritten (8:09)
3. Azagthoth (5:38)
4. Liquid Anatomy (5:14)
5. In Turmoil's Swirling Reaches (6:38)
6. Interstellar Boredom (5:07)
7. Chaos Theory and Practice (8:31)
8. Rise of the Cephalopods (19:42)