"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Nous sommes en 2133, après la troisième guerre mondiale le monde est devenu invivable à cause des radiations… pour survivre, il faut posséder des parties corporelles synthétiques. Alors rejoignez l’Alliance de Cypecore ! C’est ainsi que l’on peut présenter le concept de ce collectif allemand. Un concept qui a fait son chemin pour aboutir à l’identité musicale comme visuelle de cette formation du Baden-Württemberg. Et Cypecore a fait un bout de chemin pour en arriver là, seulement 11 ans après sa formation et alors qu’après 4 albums, il gagnerait enfin à être connu au-delà des frontières allemandes. Tout avait commencé simplement par Innocent en 2008, où l’on retrouvait simplement en guise de visuel leur logo et leurs couleurs fétiches, le jaune et le noir. Cypecore pratiquait un Mélodeath relativement moderne qui empruntait à In Flames et consorts tout en se rapprochant de formations compatriotes (Dark Age, Kadavrik…) mais qui surtout développait un penchant plus groovy. Malgré un son de caisse claire abominable, Innocent regorgeait déjà de tubes. C’est surtout Take The Consequence (2010) qui permettra au groupe de confirmer et de s’affirmer (c’est d’ailleurs par le biais de cet album que je les ai découverts, par le biais d’un promo de Twilight Vertrieb dont il s’agissait là d’une de leurs très rares bonnes sorties…), sur son créneau Mélodeath groovy qui commençait sérieusement à amener son concept et son atmosphère apocalyptique (notamment pour un morceau comme "Moment of Impact"). Mais ce n’était que le début. Après un changement de chanteur, Cypecore se trouvait une nouvelle identité avec Identity en 2016. C’est là que le groupe a commencé à arborer son style cyber/steampunk si particulier sur scène, et que la musique a commencé à prendre une nouvelle tournure, désormais plus Cyber avec des touches de Fear Factory, toujours sous le joug d’un Mélodeath plus moderne que jamais (des chants clairs ont commencé à faire leur apparition), et avec une créativité remarquable capable d’amener des tubes comme des morceaux plus originaux. Cypecore a trouvé sa voie et sa singularité. Il ne lui reste plus qu’à véritablement exploser…
… Même si le groupe reste fidèle à certaines valeurs et continue d’œuvrer dans une autoproduction plutôt confidentielle. Toute relative car si Identity était sorti sous leur propre entité nommée « Cype Records », The Alliance semble co-produit par pas moins de 5 structures dont on retiendra Vaultroom Records et Cargo Records. Ça vaut ce que ça vaut, mais dans un contexte de survie post-apocalyptique, Cypecore se débrouille tout seul avec ses alliés d’infortune. Bref. The Alliance est donc le 4ème album de Cypecore et autant dire qu’il va lui permettre de passer un cap même si comme je les suis de près depuis plusieurs années, je dirai qu’ils ne font que confirmer leur ascension fulgurante entrevue sur Take The Consequence et Identity. Celle d’un banal groupe de Mélodeath plus ou moins moderne avec des influences palpables qui a réussi à trouver une personnalité très forte. Entre usine à tubes et ambiances portées par le concept, Cypecore a créé quelque chose de potentiellement grand. The Alliance se place avant tout dans la lignée directe de Identity, avec ses particularités amenées à l’époque, mais va encore plus loin pour nous offrir davantage de morceaux inoubliables. Le propos musical se modernise encore plus, amenant de plus en plus de moments cyber-syncopés à la Fear Factory. Le Mélodeath reste toujours le fonds de commerce avec de belles injections mélodiques ici et là et des sonorités typiques, mais on est désormais loin d’un simple photocopiage d’In Flames et Dark Tranquillity ou de Mélodeath allemand à la Dark Age. Le chant arraché est toujours bien adapté au background apocalyptique, presque à la V:28 j’ai envie de dire mais moins mortifère, et le chant clair de Dominic s’est drastiquement amélioré par rapport à Identity même s’il reste relativement parcimonieux. De plus, la production est la meilleure que le groupe ait eue jusqu’à présent, reléguant le son approximatif de Innocent à une vulgaire démo et amenant la puissance nécessaire au Cyber-Metal des Allemands. Vous l’aurez compris, The Alliance va se poser comme une belle tuerie.
Et Cypecore ne perd pas ses habitudes en commençant par une "Intro" (et en terminant plus tard par une "Outro") comme ça a été le cas sur ses 3 albums précédents. Histoire de nous mettre dans l’ambiance et d’embrayer sur le morceau-titre qui, d’emblée, est un pur hymne. Comment ne pas succomber à ce refrain fédérateur ? « Break The Silence ! We Are, The Alliance ! Cause We Are One ! ». C’est un gimmick classique mais terriblement efficace. Et sur les couplets, Cypecore cartonne déjà avec des riffs Cyber de derrière-les-fagots qui déboitent sec, emballés dans leur gros son. Et les mélodies et ambiances sont aussi là. L’art de Cypecore est parfaitement bien troussé et The Alliance va définitivement confirmer l’orientation salutaire prise sur Identity. Les tubes vont alors pouvoir s’enchaîner, mais des tubes très travaillés, pas juste de bêtes mais percutants hits de Mélodeath moderne. Entre le très épique "Dissatisfactory" avec ses claviers surprenants et ses riffs mortels, le plus mordant "Aeons" avec ses compos plus techniques, ou encore le très entraînant et inspiré "The Voice of Conviction" (quelles rythmiques percutantes !) il y a déjà de quoi faire. Mais ce n’est rien à côté des vraies sensations de The Alliance, que sont l’hyper-tubesque "Reject the Stream" aux compos directes et au splendide refrain, le plus fignolé "Remembrance" (morceau le plus long du disque) avec des riffs délicieusement groovy, un refrain ultra épique bardé des meilleures mélodies du disque, et un final apocalyptique du plus bel effet ; et surtout le hit ultime de The Alliance qui est pour moi le sensationnel "Dreamsmasher", qui nous abreuve de riffs Cyber méga punchy laissant place à de subtiles mélodies, le pré-refrain est d’ailleurs succulent et le refrain en lui-même est tout simplement excellent, Dominic arrive à performer un chant clair particulièrement touchant et prenant. Un morceau, parmi d’autres, qui nous démontre toute la classe et l’efficacité que possède désormais Cypecore, à force d’efforts pour se trouver une véritable personnalité et une originalité sur base d’influences connues de tous, prouvant que l’on peut faire quelque chose d’innovant avec du Mélodeath moderne, chose devenue rare. Et Cypecore est cette perle rare…
Il nous reste alors à déguster la fin de l’album peut-être moins marquante après les tueries alignées, mais loin d’être décevante, même si Identity était peut-être un peu plus homogène. "Leviathan" aligne encore un paquet de riffs cossus, le refrain est dispensable mais le final est bien beau, "The Gift of Failure" est plus classique et très groovy, "Values of Death" lui est plus original vu qu’il semble faire écho à "Values of Life" qui figurait sur Take The Consequence et donc se rapproche plus du style pratiqué sur cet album, nettement plus Mélodeath. S’il n’est pas parfait de A à Z, The Alliance est tout de même un album assez monstrueux dans l’absolu, avec des pistes de premier ordre comme "The Alliance", "Dreamsmasher", "Reject the Stream" et "Remembrance", qui ont toutes leurs particularités propres et font de The Alliance un disque varié et pas du tout linéaire. Et cela prouve que Cypecore sait faire de grandes choses, au sein d’un style aux éléments connus mais empreints d’une personnalité futuriste qui fait mouche. On tient ainsi en The Alliance une bonne petite bombe de Cyber-Metal teinté de Mélodeath, un album réussi dans le fond comme dans la forme. Qui ne fait que confirmer le potentiel que le groupe avait montré sur Take The Consequence puis sur Identity avec son léger revirage musical, même si nous n’avons pas encore entre les feuilles un chef-d’œuvre, mais il y a déjà du gros hit qui tue là-dedans, et pas du bête couplet-refrain de 3’30. Il serait donc grand temps que le nom de Cypecore puisse circuler un peu au-delà de son pays natal (où il fait un paquet de concerts cependant) et devienne, au moins au niveau européen, une référence du Cyber-Metal ou plus globalement du Mélodeath moderne voire même du Metal moderne tout entier. Et avec un album de la trempe de The Alliance et tout le concept visuel travaillé qu’il y a autour, il mériterait amplement un franc succès et une certaine reconnaissance.
Tracklist de The Alliance :
1. Intro (0:40)
2. The Alliance (4:19)
3. Dissatisfactory (5:37)
4. Dreamsmasher (6:22)
5. Aeons (5:24)
6. Reject the Stream (3:37)
7. Remembrance (7:12)
8. The Voice of Conviction (5:17)
9. Leviathan (5:35)
10. Values of Death (4:56)
11. The Gift of Failure (4:27)
12. Outro (3:43)