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samedi 1 avril 2017

Gold + Glencoe @ Lille

Le Biplan - Lille

Nostalmaniac

Le Max de l'ombre. 29 ans. Rédacteur en chef de Horns Up (2015-2020) / Fondateur de Heavy / Thrash Nostalmania (2013)

Si j'ai peu l'occasion d'aller à Lille, ce n'est pas qu'il ne s'y passe rien. Au contraire ! Et je ne parle pas des salles comme l'Aéronef ou de gros headliners de passage dans la Métropole, mais de ces assos qui font vivre aux quatre coins de la ville la scène underground. Nous avons déjà pu vous relater les concerts de nos amis de Ondes Noires ou Nord Forge.

Initialement prévu au El Diablo (énième victime du mépris de la culture alternative dans les grandes villes), le concert a été déplacé le même jour au Biplan sous l'impulsion de Cerbère Coryphée, asso bien décidée à apporter un peu plus de fuzz et de psychédélisme dans le Nord. 

Le Biplan est une salle à la programmation éclectique située dans le quartier de Wazemmes dont je n'avais jamais entendu parler et qui accueille donc ce soir le seul concert français des Hollandais de Gold. Une raison suffisante pour faire le déplacement surtout que le temps est quasi estival et que j'adore découvrir de nouveaux lieux dans ces conditions.

J'ai pu arriver assez tôt pour découvrir la salle qui est divisée en deux parties avec un théâtre et la cave pour les concerts avec un bar au fond. Un endroit fort agréable géré par des bénévoles dévoués et vraiment aux petits soins. Ce qui rend très... optimiste pour la soirée.

Oui, transition facile, car « Optimist » c'est aussi le titre du nouvel album des Hollandais dont j'ai déjà pu dire tout le bien que j'en pensais dans ces pages. Un titre volontairement ironique avec la pochette de l'album qui représente une photo d'un bébé en pleurs (en fait la chanteuse Milena Eva). Il s'agit de leur troisième album chez Ván Records et il faut avouer que malgré ça et la présence d'un ancien guitariste de The Devil's Blood dans leurs rangs, leur popularité n'a pas encore décollé, encore moins en France où le groupe reste malheureusement méconnu (ou confondu avec un certain homonyme toulousain des années 80's). Leur dernier passage en France, à Paris (... "Ville de lumière", bon j'arrête), aurait attiré seulement une dizaine de personnes. Après, Gold n'est pas non plus du genre à vouloir fédérer un public autour d'une étiquette tapageuse et s'amuse à jouer avec les codes et les conventions. Du coup, pas assez Metal pour les metalheads, pas assez rock pour le public rock. Et vous savez quoi ? Ça leur plaît beaucoup...

Pour cette date, ils sont accompagnés par Glencoe. Un groupe de la région qui a déjà ouvert par le passé pour Mars Red Sky et que je découvre. S'ils pouvaient donner l'impression de proposer une touche plus "classique" à la soirée, c'est un peu plus compliqué, car on ressent beaucoup d'influences post-rock (aussi bien de groupes américains qu'européens d'ailleurs) dans leur son. Certains passages, aux accents plus pop, me font penser à Placebo ou Pearl Jam (le chant évoque un peu Eddie Vedder). Les guitares laissent également la place à quelques effusions plus psychédéliques. C'est planant sans jamais tomber dans l'ennui grâce aussi à quelques moments plus nerveux et toujours maîtrisés. Un set vraiment intéressant, et même si ce n'est pas mon univers, voilà qui sert parfaitement à chauffer le public (et les amplis) mais aussi d'apprécier le son qui est vraiment très correct pour ce genre de configuration (la scène est au même niveau que le public).

Le public, parlons-en. En plus de votre serviteur, une quarantaine de personnes ont fait le déplacement ce qui n'est pas extraordinaire, mais honorable pour un jour de semaine. Malheureusement tous ne resteront pas pour Gold qui commence à s'installer sur scène. 

Il faut savoir que le quintet de Rotterdam vient d'enchaîner une dizaine de dates en Suisse, en Autriche, en Allemagne, en Norvège et au Danemark. Cependant, pour avoir pu discuter avec eux dans l'après-midi, l'énergie et la motivation sont bien là. Bien sûr, il ne faut pas s'attendre à des sourires à tout-va de leur part. Comme vous l'aurez compris, l'univers de Gold est bien plus sombre et solennel que le groupe précédent. À l'image de la chanteuse Milena Eva au regard froid et impassible qui donne une dimension assez théâtrale à leur show. 

Gold va évidemment proposer de nombreux titres de leur dernier album (je retiendrai les envoûtants "White Noise", "No Shadow" ou le captivant "You Too Must Die") qui passent à merveille l'épreuve du live. On retrouve dans leurs compos ce côté post-punk renforcé par le jeu du batteur Igor Wouters, sosie hollandais de l'acteur Zach Galifianakis. L'ancien guitariste de The Devil's Blood, Thomas Sciarone, sert d'attraction aussi et déverse ses riffs tourbillonnants et quelques soli avec une conviction palpable. Leur avant-dernier album « No Image » paru en 2015 n'est pas en reste avec l'efficace "Servants" et son refrain, aussi entêtant qu'hypnotique. Je ne leur en veux pas de faire l'impasse sur leur premier album (« Interbellum » sorti il y a cinq ans maintenant) que je juge bien trop naïf et clichésque. Le virage pris depuis « No Image » a suffi à tout balayer. Gold s'est, en effet, approprié une identité forte avec un souci aigu du visuel (ou du non-visuel comme la pochette et les photos promos de « No Image » justement) et a rendu son rock plus sombre, plus "dangeureux". Provocant aussi. "Old Habits" est un autre moment du live avec les guitares volontairement dissonantes et cette atmosphère suffocante. Bien que le groupe ne communique pas avec le public, l'intensité est présente tout au long du set. En atteste le plus tragique et psychédélique "O.D.I.R." tiré également de « No Image ». Du début à la fin, Milena tient parfaitement son rôle de frontwoman avec sa voix toujours juste sans excès de zèle et sa gestuelle de prêtresse. Mais également toujours ce regard glaçant. Ce "Non" qui clignote dans ses yeux et qui correspond aux paroles souvent graves du groupe.

Malheureusement, le set passe bien trop vite et ce n'est pas le maigre public qui est resté qui va pousser à un rappel. C'est bel et bien fini. Je ne suis pas déçu néanmoins, car j'attendais beaucoup de ce concert et Gold n'a rien négligé. Espérons revoir Gold bientôt (avec plus de dates en France) avec, je le suggère, un plateau. C'est peut-être ce qu'il manquait ce soir pour attirer un peu plus de monde. Et pourquoi pas un groupe issu de la belle famille Ván Records ? Je ne serais pas choqué d'un Urfaust - Gold en tournée, par exemple. En tout cas, si Gold n'attire pas encore les foules, c'est un groupe que les plus curieux, et même les plus puristes d'entre nous doivent aller voir, car on en n'en ressort pas indifférent.
 

Petite anecdote "amusante" : à la table de merch, Thomas Sciarone racontera, amusé, à un gars du public qui arbore un t-shirt de Burzum que Varg Vikernes himself a commenté la vidéo de "Servants" en glissant quelques remarques d'un goût douteux. Et, en effet...
 

Merci à Pierre et Anthony de Cerbère Coryphée mais aussi à Raphaëlle et toute l'équipe du Biplan.