"On est tous le boomer de quelqu'un d'autre."
Vous le pensiez mort et enterré ou tout du moins en grande phase de déclin et d’oubli, mais non, le Djent avec un grand D est toujours là. Même si une certaine frange du Deathcore l’a supplanté ces dernières années, le vrai Djent existe encore, celui qui reste résolument ancré dans un Metal progressif moderne, qui est majoritairement mélodique et aérien, qui use de chants clairs lumineux au milieu de compos syncopées virevoltantes. D’ailleurs c’est en France que l’on retrouve facilement ce son, outre Uneven Structure qui va bientôt signer son second full-length (même si le groupe ne revendique pas faire du Djent) ou Beyond The Dust, il y a Kadinja qui nous propose avec Ascendancy son premier album, quatre ans après son premier EP éponyme et alors qu’il avait livré quelques singles en 2014-2015, que l’on retrouvera d’ailleurs ici. Avec un bagage technique remarquable, le quintette parisien est donc fin prêt pour remettre le « trve » Djent sur le devant de la scène, à l’image de ce qu’avaient fait les Américains de SeeS pour leur second album (Three Winters) en 2015. N’espérez donc rien d’autre qu’un Djent rythmé et efficace, avec des refrains, des mélodies et bien sûr une musique résolument moderne et progressive, qui ravira les amateurs du style qui ne sont pas encore passés à autre chose vu que les bonnes sorties dans le genre ne sont plus légion…
Lumineux et aéré tout autant qu’il est dur et complexe, Ascendancy est un modèle de Djent, avec des compos plus techniques qu’il n’y paraît. Niché entre Periphery, Monuments, Ever Forthright, No Consequence mais aussi le Sumeriancore et beaucoup d’autres références du style, Kadinja assure et balance en 48 minutes tout ce qui fait le charme et l’efficacité du style. Les compos sont bien percutantes, les mélodies sont fort jolies (et que dires des nombreuses envolées de leads), Philippe fait le taf que ce soit en voix gueulée ou claire, on se laisse donc vite accrocher par ces 10 morceaux enjoués. Ascendancy commence d’ailleurs avec du lourd, "Stone of Mourning" montre déjà les capacités et l’inspiration du groupe mais c’est le génial "GLHF" qui lance vraiment les hostilités, avec des compos Djent très jouissives. Kadinja est en forme et est déterminé à balancer un Djent particulièrement cossu. Difficile de ne pas accrocher ainsi à des morceaux hyper efficaces comme "’Til the Ground Disappears", le décalé "Dominique" ou encore le bien massif "Ropes of You", qui bénéficie d’un refrain très enlevé. Ascendancy regorge donc de hits potentiels à chaque piste, et on se laisse aussi entraîner par l’aspect plus mélodique de la musique du groupe, avec notamment les deux parties de "Episteme" ou encore des morceaux globalement plus raffinés comme "A November Day", "Bittersweet Guilt" (avec tout de même des riffs bien durs) ou encore le final "Seven (The Stock Figures)".
Ascendancy est donc un album très complet et réussi de Djent dans son versant le plus classique, celui qui finalement descend du premier album de Periphery, jusque dans le goût pour les explosions de compos complexes et les rythmiques bigarrées, mais aussi dans ce côté frais et accrocheur avec les nombreuses mélodies et les chants clairs. Kadinja n’était pas loin de pondre une bombe, pas loin car il faut tout de même bien avouer que l’ensemble manque d’originalité et est parfois légèrement répétitif et redondant, voire sent le déjà-entendu sur certains riffs et mélodies. Mais pour un premier album, les Parisiens ont fait du très bon boulot, même s’il est vrai que l’on peut trouver des « premiers albums » avec plus de personnalité et de singularité. Qu’importe, les albums de « pur » Djent ne sont plus vraiment légion, et avec Ascendancy Kadinja remplit le contrat. Si on pourra s’en lasser plus ou moins vite, cet album regorge tout de même d’un bon paquet de pistes bien mordantes et entraînantes, et il n’y a pour ainsi dire rien à jeter même si hormis "GLHF" pour ma part, il n’y a pas vraiment de morceau qui ressort plus qu’un autre. Homogène et cohérent, Ascendancy est un très bon album de Djent, respectant tous les codes du genre tout en vivant avec son temps. Kadinja fait donc une entrée remarquable dans la scène Djent, s’en tirant avec plus que les honneurs. Il ne reste plus qu’à confirmer cet effort et à affirmer une personnalité propre et l’on tiendra un futur grand nom du Djent (ou ce qu’il en reste, hélas…).
Tracklist de Ascendancy :
1. Stone of Mourning (3:39)
2. GLHF (4:36)
3. Episteme (4:45)
4. Episteme Part II (4:14)
5. 'Til The Ground Disappears (4:25)
6. A November Day (4:59)
7. Dominique (5:15)
8. Ropes of You (6:05)
9. Bittersweet Guilt (5:15)
10. Seven (The Stick Figures) (4:55)