Blues Pills + Mars Red Sky
Le Bikini - Toulouse
Anciennement responsable du webzine U-zine.org. Actuellement chroniqueur éclectique et live reporter basé à Toulouse.
Le stoner et les musiques psychédéliques ont souvent été une contre-culture cantonnée aux petits clubs, aux caves, et aux salles de petite taille, là où la proximité avec le public est maximale. Pourtant, il faut croire que les temps changent et que les choses évoluent. Alors que dans un registre tout à fait différent, mais pas si éloigné, on aura vu les légendes hexagonales Magma fouler les planches du Bikini ce mois-ci, c’est un peu plus surpris que l’on voit arriver le concert de Blues Pills. En effet, et comme vous le constaterez un peu plus loin sur ce live-report, il y a encore trois ans personne ou presque n’aurait soupçonné de voir le groupe suédois dans une salle de 1200 personnes. Retour donc sur une soirée rock’n’roll et psyché !
MARS RED SKY
Les Productions du Possible, structure à l’initiative de l’évènement, aura donc fait appel aux bordelais de Mars Red Sky pour ouvrir la soirée. Un choix pas si surprenant quand on sait que lors du premier passage de Blues Pills dans le sud-ouest en avril 2014, la date avait été organisée par Make It Sabbathy, l’asso de Jimmy … bassiste de Mars Red Sky ! Tout est lié ! Ainsi, les bordelais qui fêtent cette année leurs 10 ans de carrière via une tournée qui passera par le Hellfest et l’Xtreme Fest, sont ici pour défendre leur troisième opus Apex III (Praise for the Burning Soul).
Chemise à carreau et casquette vissée sur la tête, pas de doute, le groupe fait dans le desert-rock. La formation nous emmène sur la chaleur désertique de la planète Mars. Oscillant entre la lourdeur écrasante des lignes de basse, à l’image de cette gravité astrale, et passages profondément aériens, la musique de Mars Red Sky montre plusieurs facettes. Le son est chaud, les lumières oscillent entre le rouge et le jaune avec un éclairage latéral renforçant le côté intimiste de leur mise en scène. Pourtant, en terme de scénographie, si les bordelais ont tenté de recréer une ambiance feutrée via une batterie proche du devant de scène, la formule, dans une salle si grande semble en contradiction avec la taille de la scène. C’est pourtant le genre d’ambiance qui aurait collé parfaitement dans des clubs de moindre taille comme le Connexion.
On regrettera également le peu d’utilisation du vidéoprojecteur alors que le groupe en est habituellement très friand. Une curiosité qui reste jusqu’alors inexpliquée puisque lorsque le groupe est entré sur scène, les projections étaient encore actives. De leur setlist, on retiendra essentiellement l’excellente Marble Sky, que le groupe joue ici en version encore plus lente que sur album, donnant à ce titre un côté ultra massif.
Setlist Mars Red Sky (de mémoire):
Alien Grounds / Apex III
Hovering Satellites
Be My Guide
Strong Reflection
Mindreader
The Light Beyond
Shot in Providence
Marble Sky
Up the Stairs
BLUES PILLS
Tant de choses à dire, tant sur l’histoire de Blues Pills que sur le concert … Retournons un peu en arrière. Nous sommes fin 2013, un groupe commence à faire parler de lui dans l’univers du revival 70’s psychédélique : Blues Pills. A l’époque, le groupe n’a pas encore de site internet et il est difficile encore de mettre un visage sur cette voix qui a subjugué plus d’un auditeur. En avril 2014, le groupe annonce son passage à Bordeaux. Pas question de louper l’évènement, on sentait déjà poindre le côté immanquable de la date. Et quand on dit Bordeaux … en réalité le concert avait alors eu lieu au MAC, salle étudiante de Pessac, dans la banlieue bordelaise.
C’était il y a trois ans, le groupe avait joué devant à peine 70 personnes, sur une scène d’à peine 10 cm de haut. Et déjà on en était ressorti avec l’impression étrange qu’on avait été témoins d’un concert hors norme tant le potentiel du groupe, à deux doigts d’exploser, était palpable. Ce qui devait se produire s’est produit, l’été suivant Blues Pills signe sur Nuclear Blast, plus gros label européen et prend la tête de la scène jusqu’alors contrôlée par des groupes comme Kadavar, Graveyard, Orchid et Blood Ceremony. Depuis, le groupe a sorti deux albums et enchaîne les tournées. Si jusqu’à présent le groupe était revenu à deux reprises sur Bordeaux (une date amputée au bout de 4 titres suite à une coupure de courant, et une seconde en headliner avec Kadavar en octobre dernier), il s’agit de leur toute première date sur Toulouse.
Fort de leur second album, Lady In Gold, sorti en aout dernier et faisant hommage à un coté plus soul et mature, Blues Pills est venu nous emmener dans leur univers. Un voyage dans le temps, de retour dans le psychédélisme des années 70. Une période libertaire semblant pourtant révolue vu le poids actuel de la technologie et du modernisme. Pour autant, dès les premières lignes de guitare du français Dorian Sorriaux, le public est transporté. La sérénité du jeune prodige marquera d’ailleurs les esprits, alternant soli et autres rythmiques avec autant de calme que de spontanéité.
Si à la batterie, André Kvarnström est désormais bien installé en remplacement de Cory Berry (ancienne section rythmique de Radio Moscow), c’est en revanche à droite de la scène que les regards se font plus interrogateurs. En effet, depuis la sortie de son nouvel album, la formation s’est enrichie de Rickard Mygren au clavier et à la guitare. Un ajout qui, s’il est judicieux et justifié en ce qui concerne les lignes d’orgue, se trouve bien plus dispensable en ce qui concerne les lignes de guitare. En effet, loin d’apporter du contenu, Rickard reste scéniquement dans l’ombre de Dorian tant ce dernier illumine de sa 6 cordes.
Au-delà des musiciens, c’est évidement vers la jeune Elin Larsson que les regards se tournent. La vocaliste, au timbre chaud et suave, rayonne et pétille. Très mouvante sur scène, la blondinette occupe l’espace, et n’hésite pas à discuter avec le public entre les titres. Elle nous révèlera ainsi qu’un de ses rêves d’enfant était de venir un jour à Toulouse ! Tout en simplicité et en sobriété, sa voix si particulière nous fera voyager, tant sur les balades comme Little Sun, que sur les titres très blues/soul comme Devil Man ou sur les titres plus rock’n’roll. Piochant allegrement dans leurs deux albums, la formation n’hésitera pas à rendre hommage à leurs influences, avec Elements and Things, reprise de Tony Joe White, mais surtout avec l’excellent hommage aux légendes du genre Jefferson Airplane avec une reprise magnifiquement exécutée de Somebody To Love.
Si la formation n’a clairement plus rien à prouver sur scène, on se demande en revanche si son management n’a pas une fâcheuse tendance à griller les étapes. En effet, n’oublions pas que Blues Pills jouait il n’y a pas encore si longtemps devant moins d’une centaine de personne, et au vu du Bikini à peine rempli au tiers de sa capacité, on se demande si le groupe n’aurait pas été encore plus à son aise dans une salle plus petite et plus intimiste, qui aurait justement renforcé le côté chaleureux de sa musique. Sans parler des tee-shirts à 25€ … Bref, espérons que le groupe ne finisse pas par vendre son âme au Diable. N’est pas Robert Johnson qui veut !
Setlist Blues Pills :
Lady in Gold
Little Boy Preacher
Burned Out
Black Smoke
Bliss
Bad Talkers
Won't Go Back
Elements and Things (Tony Joe White cover)
You Gotta Try
Astralplane
High Class Woman
Ain't No Change
Little Sun
Outro
I Felt The Change
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Gone So Long
Somebody to Love (Jefferson Airplane cover)
Devil Man