Benighted
Julien (chant)
Dans l'équipe car il était là avant.
Alors que leur nouvel album Necrobreed vient tout juste de sortir en mettant d'entrée quelques claques, Benighted enchaîne quelques dates afin d'enfoncer le clou. On a profité de leur concert à Nantes pour poser deux/trois questions à leur chanteur !
Salut Julien, votre nouvel album, Necrobreed, est sorti il y a maintenant 4 jours ( interview réalisée le 21/02). Quels sont les retours que vous avez pu avoir dessus, que ce soit pour les fans ou au niveau de la presse ?
Pour l'instant, toutes les critiques sont unanimes, on attend vraiment la première très mauvaise critique ! On a que des bons retours jusqu'à présent et on espère que ça va durer, car on est vraiment très contents de l'album. En ce qui concerne les premiers concerts, les réactions ont été géniales, que se soit sur les anciens morceaux ou les nouveaux de Necrobreed. Les gens avaient déjà commencé à les appréhender un petit peu donc certaines personnes connaissaient déjà les nouveaux titres et on l'a vu dans la fosse.
Notre label Season Of Mist nous dit que les pré-commandes sont super bien parties et ça va être un succès donc pour l'instant, on est sur un petit nuage ! Là, on commence la tournée et on a bien l'intention de faire un maximum de dates pour promouvoir cet album et ses nouveaux titres.
L'énorme changement par rapport à Carnivore Sublime, c'est ce line-up qui a complètement changé et dont tu es désormais le seul rescapé. Peux-tu nous expliquer ces changements et présenter les nouveaux membres ?
Bien sûr ! Donc après Carnivore Sublime, on a perdu rapidement le guitariste et le bassiste qui sont partis pour leur projet. On a donc incorporé Pierre à la basse et aux voix, car il me donne un coup de main dessus. C'est quelqu'un qui fait partie de la scène stéphanoise, qui faisait partie de groupes comme Aabsinthe ou High for a Dive et on le connaissait depuis longtemps. Donc quand il s'est proposé à la basse, on n'a pas hésité longtemps parce qu'on avait très confiance en lui et on savait que ça matcherait très bien avec l'esprit Benighted et on ne s'est pas trompé ! Il tient son poste comme aucun bassiste dans Benighted n'a jamais tenu, c'est un vrai bonheur de jouer avec lui.
Pour la guitare, on a recruté Manu qu'on ne connaissait absolument pas. C'était un peu un pari, car il venait de Dijon et était prof de guitare là-bas. On l'a casté en repet' et on a vu à quel point ce garçon avait un large champ de compétences, que ce soit dans son jeu et dans son talent de composition puisqu'il s'est retrouvé à composer 90% du nouvel album. Sans lui, Necrobreed n'aurait sûrement pas été enregistré si vite et il a beaucoup contribué à cet album.
Kevin est parti pour Abbath, car il cherche une situation professionnelle dans la musique et avec Benighted c'est hors de question que ça se passe comme ça. On a casté plusieurs batteurs et on a eu ensuite un contact avec Romain qui se demandait pourquoi on lui demandait pas à lui ! Nous, on pensait juste qu'il était tellement occupé à travers tous les projets qu'il devait assumer, que ce n'était même pas pensable de rentrer dans Benighted. Du coup, on s'est retrouvé un peu con quand on s'est appelé et qu'on s'est dit "bah on ne va même pas te tester, on connaît ton talent "! Il est venu à la maison, on a fait un week-end repet' ensemble et voilà ! C'est un tueur et il est responsable pour beaucoup de l'intensité de Necrobreed, car il y a des tempos vraiment, vraiment rapides et je pense que Romain est un des rares batteurs qui aurait pu tenir comme ça les morceaux enregistrés.
Et enfin, le dernier arrivé en date, Fabien, que l'on appelle Fack et qui joue dans Carnival In Coal et Infected Society. Il nous avait déjà dépannés l'année dernière pour la tournée avec The Black Dahlia Murder, car Olivier étant prof, il n'avait pas pu se libérer pour faire cette tournée. Quand il nous a annoncé qu'il devait quitter le groupe parce qu'il ne supportait plus le rythme, que ça devenait trop dur pour lui et ne prenait plus autant de plaisir qu'avant, on n'a pas eu besoin de chercher bien loin. On savait déjà qu'avec Fack, humainement et musicalement ça matchait très bien. Donc voilà comment on en est arrivé aujourd'hui au line-up le plus carré qu'on ait jamais eu dans Benighted avec que des musiciens monstrueux et pour moi en tant que chanteur, enfin gruikeur ou tout ce que tu veux, c'est un pur bonheur de jouer avec ces mecs et sur scène vraiment ça défonce !
De St Etienne, il ne reste donc plus que Pierre et toi, le reste du groupe se trouve désormais un peu partout en France. Cela à dû impacter sur votre façon de travailler...
Là effectivement, on se retrouve avec un groupe éclaté, on est franco-Français, c'est-à-dire qu'on a Romain qui habite à Cannes, Fake à Amiens, Manu à Dijon. Seul Pierre et moi habitons à un quart d'heure / vingt minutes l'un de l'autre. Sinon il faut vraiment s'organiser pour avoir des repets ensemble. On fait beaucoup de travail à la maison maintenant, on bosse différemment et Necrobreed a été composé différemment de tous les albums précédents. Pour la première fois, on a du travailler beaucoup à distance et par le biais d'Internet.
On va retourner sur Necrobreed, peux tu nous expliquer le concept de cet album ?
Le concept dans Necrobreed part d'un schizophrène qui, à l'âge de 9 ans, a été enlevé en sortant de l'école, puis violé dans un champ durant 2 heures avant d'être redéposé à l'école par ses ravisseurs. La seule image un peu rassurante que sa tronche a gardé de ce moment-là, c'était un chat mort sur le bord de la route, sur lequel il a focalisé son attention afin de se dissocier un peu de ce qu'il est en train de subir. Ainsi quand il tombe malade à la fin de son adolescence, la thématique délirante s'oriente un peu naturellement vers ce qu'il a gardé de rassurant. À savoir le monde animal, mort, mais vivant pour lui parce qu'il représente tout de même quelque chose de rassurant. Il veut fonder une famille comme ça et dans son délire, il pense qu'il a le pouvoir physique de redonner vie aux animaux morts, afin qu'ils soient vivants pour lui dans sa maison. C'est pour ça qu'il se les coud au ventre et quand il sent que ça devient chaud, que ça brûle à cause de l'infection, il pense qu'il a redonné vie à l'animal. Il les décroche et comme tu poses ton enfant dans le berceau, il leur donne une place dans sa maison et ça devient un de ses enfants et il renaît ainsi un peu à chaque fois.
À l’écoute de l’album, on remarque que celui-ci est plus sombre, mais aussi qu’il a un côté très cinématographique, avec les ambiances et samples que l’on peut retrouver dedans. C’est quelque chose vers lequel vous vouliez vous orienter, ou c’est venu naturellement ?
En fait, j'ai tellement bossé mon concept que j'en ai parlé après aux autres membres du groupe et on a vraiment pris cette direction-là. C'est-à-dire qu'il fallait que l'album soit construit comme un film. On voulait vraiment qu'il y ait une représentation d'images, qu'à l'écoute de certains morceaux, on arrive à mentaliser des scènes. Bien sûr avec l'aide des clips, pour avoir les visages et des trucs comme ça. Mais surtout avec les paroles, un peu comme avec un bouquin, quand on lit les paroles de certains morceaux, on imagine que c'est le personnage de Reptilian qui fait ça... On peut se représenter ça comme si c'était un film. Après on va sûrement faire d'autre clips et tous ces clips représenteront un épisode de l'histoire racontée dans Necrobreed pour que ça fasse une espèce de film décousu.
Pour le côté sombre par rapport au nouvel album, on voulait vraiment que ça soit un album film d'horreur. Pas au sens, on va dire, niais du terme, on voulait quelque chose de profond et de glauque, qui est finalement très banal. De l'ordre de la maladie mentale et de la vulnérabilité de certaines personnes.
Justement en termes de films d’horreurs, quels sont tes références ?
J'ai tous mes vieux classiques, les Exorcistes, Vendredi 13, Massacre à la tronçonneuse, tous ces vieux films avec des tueurs qui ont tous eu des enfances dégueulasses ! Après la différence, c'est que dans Necrobreed, et comme dans tous les autres albums de Benighted, la personne qui est malade ne fait de mal à personne à part elle-même, c'est-à-dire que quelle que soit la mensualisation qu'il a par rapport à son pouvoir de tuer des gens ou ainsi de suite, c'est lui qui reste le plus vulnérable, il ne fait de mal à personne et... (Julien est interrompu par un de ses musiciens qui lui rappelle le bon goût cinématographique dont le groupe a fait preuve la veille N.D.R) Ha oui, on a regardé Ghoulise 3 chez moi hier, c'était une catastrophe Hahaha ! Donc, le personnage ne fait de mal à personne, c'est aussi ça le message récurrent dans nos albums, les patients atteints de pathologie psy sont avant tout dangereux pour eux même.
Pour rester dans les grands moments de cinéma, pourquoi avoir choisi de sampler cette scène culte de Commando ?
Eh bien, je t'avouerai que c'est un peu par hasard, parce que ça n'a rien à voir hahaha ! Mais du coup, je ne sais pas, comme je t'ai dit, l'album a été écrit comme un film et on aime mettre des choses un peu décalées dans Benighted. Si tu veux, plutôt que de sortir des intros qu'avec des cris, des bruits de violons parce que ça devient flippant et ainsi de suite, on s'est dit bah voilà, le mec peut être tout bêtement en train de regarder la télé et pourquoi pas le film Commando ! Je suis un gros fan des vieux films de Schwarzy et c'est vrai que je me suis rematté Commando pas tellement longtemps avant et quand y a eu ce passage, je me suis dit, putain, faut qu'on en fasse une intro ! Donc je l'ai envoyé à tous les autres qui m'ont dit "ho bah oui, feu ! On y va !" C'est complétement décalé et puis malgré tout ça matche parce que c'est vraiment le parallèle entre la vie réelle du personnage et sa vie fantasmatique qui arrive derrière dans les paroles
C’est devenu une habitude des albums de Benighted, vous avez fait appel à d’autres chanteurs pour faire des featuring sur certains morceaux, peux-tu nous les présenter ?
On a demandé à Asphodèle (öOoOoOoOoOo) de nous faire la voix sur l'intro parce que déjà, elle a un accent génial, elle a une voix... Enfin, elle sait tout faire, elle est incroyable ! La question que je me suis posé après, c'est putain, c'est vrai que je lui demande de faire que des intros ! Je pense qu'un jour, j'aimerais vraiment l'incorporer à un morceau, pour utiliser sa voix, car elle sait growler, elle sait tout faire ! Donc c'est quelque chose qui pourrait être pensé dans le futur. Mais voilà, pour l'intro typiquement film d'horreur années 80 avec cette belle scène de la maman sur le perron qui appelle ses enfants à dîner avec le carillon, sa voix collait parfaitement pour faire la mère de famille bien-pensante qui ramène ses enfants à la maison "allez à table !"
Après il y a Arno de Black Bomb A qui est un ami de très longue date. En fait, ça doit faire deux ou trois albums qu'on voulait l'inviter à chanter sur un morceau, mais il nous manquait le morceau ! Les guest, on se les représente toujours pendant l'écriture d'un titre, c'est-à-dire qu'à un moment ça frappe, moi ou un des autres : "putain sur ce passage, faudrait trop une voix comme celle de ce mec-là". Arno, on est tous fan de sa voix, car il en a une d'enfoiré, et quand on a fait Cum with Disgust, lorsque je plaçait des chants, je me disais ouais, là si Arno venait me doubler ou si on faisait des questions/réponses, ce serait terrible ! Et c'est comme ça que ça s'est fait ! Cette fois, on lui a demandé et j'adore le résultat ! Il a une voix à la Gorefest qui est monstrueuse.
Et enfin notre troisième guest, Trevor de The Black Dahlia Murder, avec qui on a tourné pendant un mois l'année dernière. Quand j'ai composé le refrain de Forgive me Father à la voix, je faisais des placements qui ressemblaient à ceux de Trevor et je me suis dit putain, on va lui demander, pourquoi je me ferai chier à essayer de me rapprocher d'un type de voix que Trevor pourrait très bien faire ! C'est un frontman monstrueux, j'adore sa voix, du coup, j'ai envoyé un message lui disant qu'on serait très flatté de l'avoir sur un morceau, que la voix collerait super bien. Il m'a répondu "Avec plaisir, j'adorerai faire ça !". Il a même acheté un nouveau micro studio pour que les prises soient vraiment bonnes, il était super touché et nous aussi, car quand on a reçu ses voix à la maison, on était vraiment sur le cul. On était super contents parce qu'il y a toujours ce petit doute quand tu reçois les voix, tu te dis que si jamais ce n'est pas bien comment on dit au mec que "bah désolé, mais on ne peut pas les mettre ça ne va pas le faire" haha ! On a reçu les trucs et "Ho putain ça va être terrible !".
Du coup, vous avez l’air d’être devenus bons copains avec The Black Dahlia Murder, c’est quand qu’ils vous prennent en tournée US ?
Ha bah écoute, quand ils voudront, j'ai envie de dire ! Après je ne sais pas s'ils ont beaucoup de liberté sur le choix des premières parties. Il faut aussi que ce soit intéressant pour eux, car c'est un gros investissement de faire venir un groupe français aux US. On adorerait tourner avec eux et on sait qu'ils seront ravis qu'on tourne ensemble, il faut juste trouver le bookeur qui serait ok pour monter ça !
Mais même sans parler de The Black Dahlia Murder, vous avez déjà tourné au Québec par le passé, vous n’avez pas eu de propositions pour jouer un peu plus bas ?
On a eu des propositions, mais on veut vraiment des bonnes conditions pour jouer ! Les US, c'est cher et Benighted, ce n'est pas mon boulot ! Je prends des vacances pour Benighted et partir aux US tourner un mois dans des conditions lamentables où on a juste envie d'arrêter la musique en rentrant, je n'ai pas envie quoi hahaha !
Lors de votre dernière tournée avec eux, j’ai eu l’occasion de vous voir en France (Dunkerque) et à l’étranger (Vosselaard, Belgique) et on sentait vraiment une différence au niveau du public avec un public beaucoup plus réservé. Vous sentez cette différence d’attente, et comment vous êtes perçu à l’étranger ?
En France, on a toujours été beaucoup, beaucoup soutenu. Quel que soit l'endroit où on joue, les gens répondent présent, il y a un gros bordel, on nous achète beaucoup de merch... On a vraiment beaucoup de chance, car les Français nous soutiennent énormément. À l'étranger, c'est quelque chose qui s'est beaucoup développé depuis ces 5 dernières années. On a senti au travers de toutes les dates que l'on a pu faire un peu partout en festival ou même les dates de tournée avec The Black Dahlia Murder ou Aborted qu'à chaque date, il y avait une partie du public qui ne nous connaissait pas et qui venait nous voir à la fin qui demandait "vous sortez d'où ? C'est génial !" et ainsi de suite et qui du coup adhèrent beaucoup à Benighted et sont prêts à nous recevoir en tête d'affiche. C'est génial, et c'est pour ça qu'on a booké notre première tournée européenne en tant qu'headliner. En novembre, pour la première fois, on a joué en Roumanie, en Bulgarie, on a fait des shows sold out ! Quand on joue en Allemagne, c'est pareil, on a toujours eu beaucoup de succès là-bas, l'Autriche pareil, les Pays-Bas, on a un très gros nom aussi, la Belgique pas trop, c'est un pays où on n'est pas beaucoup développé, Suisse aussi. Mais c'est vrai que les pays germanophones ou les pays de l'Est, on a un nom qui a de l'importance.
Lors de mes précédents live report, j’ai beaucoup chouiné sur le fait que vous ne jouez pas d’anciens morceaux. Or, j’ai ouï dire qu’un morceau d’I.C.P. était revenu dans la set list…
Et bien oui, on rejoue Stay Brytal ! On a écouté ce que les gens nous disent depuis des années ! C'est vrai que les changements de line-up n'ont pas aidé parce qu'à chaque fois, il faut rebosser les set-list et ainsi de suite et quand tu changes tous les 6 mois de musiciens, c'est compliqué d'arriver à se dire "Tiens, faisons un bilan et réintégrons un morceau". On est plus dans le : il y a des dates qui arrivent, il faut bosser, on a la set list qui marche bien, on y va. C'est plus une question pratique.
Après on a remarqué une chose, essayé d'intégrer certains anciens morceaux, par rapport à la rapidité à laquelle sont les nouveaux, ça fait des grosses cassures dans le set. On s'en est rendu compte aussi. Stay Brutal fait exception à la règle, car elle a ce côté dynamique, mais on la burne un peu, elle est plus rapide que sur album et du coup, elle passe très bien dans la nouvelle set list. Mais tu vois, on avait essayé de jouer d'anciens morceaux en repet et on se rendait compte en les jouant que ça ralentissait le rythme et ça nous faisait baisser en énergie donc en live ça sera forcément pareil. Il a donc fallu qu'on réfléchisse et que l'on adapte les morceaux pour qu'ils soient aussi intenses que le reste. Mais on ne renie pas du tout I.C.P, ça reste l'album qui nous a fait passer le plus gros palier dans Benighted et j'ai beaucoup d'amour pour cet album, j'en suis super fier encore.
Ok, parce que pas mal pensaient que comme vous aviez explosé avec Asylum Cave, pour ce nouveau public vous délaissiez un peu la période antérieure.
Paradoxalement non, car quand on est arrivé au Québec, les mecs juraient tous par Identisick ! C'est des trucs que t'apprend une fois que tu te déplaces, t'en as aucune idée, mais t'arrives sur place et les mecs gueulent Identisick ! Tout dépend sur quel label tu étais, quel a été la promotion, à quoi ils ont pu avoir accès, et ce qu'ils ont essayé de te suivre après cet album-là... Il y a beaucoup de facteurs, mais là le fait est que l'on essaye de représenter tous les albums depuis ICP avec au moins un titre.
L’entrevue touche à sa fin, tu as un un dernier mot pour les lecteurs d'Horns Up ?
Et bah déjà merci à toi, car tes chroniques, c'est celles qui me font le plus marrer parmis toutes celles que je lis ! Franchement celle de Necrobreed est fantastique, on a eu un fou rire monstrueux hier en la regardant ! Et un grand merci à ceux qui lisent Horns Up, qui regardent Horns Up et nous soutiennent ! On vous donne rendez-vous sur la route avec les kilos de dates qu'on a pour promouvoir Necrobreed et on a hâte de vous voir faire la fête avec nous !