Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Mine de rien, ça fait quinze ans que Trap Them balance de la haine dans nos tympans. Et en quinze ans, ce qui était à la base un side-project de Brian Izzi et Ryan McKenney (ex - Backstabbers Inc.) est devenu quelque chose de bien plus consistant et régulier, jugez plutôt : quatre EP, un split et un cinquième album dont il est question ici, une discographie déjà solide, d'autant plus que les premiers enregistrements datent de 2007.
Et ce qui est agréable avec Trap Them, c'est que la vocation d'exutoire qu'avait le projet à ses débuts est restée centrale dans la musique du combo. Rien qu'avec les beuglements de l'intro Kindred Dirt, et sa montée progressive en tension Trap Them démontrent qu'ils sont toujours bien là pour péter des bouches par douzaines. Les faisceaux de rage multiples de l'intro convergent vers une première explosion de violence avec Hellionaires et c'est parti pour un voyage en terre crust/grindcore/hardcore dès plus sympathiques.
Dans la catégorie pure mandale, l'album regorge de passage destructeurs, mais deux titres sortent du lot quand on parle de castagne. Premièrement Revival Spine avec son intro complètement furieuse et son refrain made in Pugilat. Et puis surtout Speak Nigh. Trois minutes de haine en bloc, une putain d'agression rythmique avec des micro-blasts de quelques secondes qui défrisent comme il faut, le tout sur du riffing bien énervé. Le titre est imparable, promesse de castagne en bonne et due forme en live.
Mais Trap Them, ce n'est pas que de la brutalité. Non, Trap Them c'est aussi des trucs cradingues qui poissent dans tes oreilles, des larsens vicelards pleins de fiel et des riffs assez tordus pour ne pas être que des prétextes à la bagarre. Écoutez la fin de Prodigala et vous comprendrez de quoi je parle : un jeu de batterie qui se fait plus discret alors que la guitare balance un riff tout étrange d'où émerge un malaise poignant, le tout renforcé par les éructations de Izzi. Mais ce genre de procédés est moins présent que sur l'excellent Blissfucker, et de ce fait Crown Feral est un peu moins intéressant que son prédécesseur.
Crown Feral est ultra-direct, avec morceaux tournant autour des trois minutes et ciblant l'efficacité immédiate. De ce point de vue c'est réussi, l'envie de péter des nuques est là à tout instant quand on écoute l'album, pas de problème. Mais sur la durée, Crown Feral se révèle être moins profond et moins dense. Un titre comme Malengines Here, Where They Should Be, avec son ambiance sombre et torturée aurait pu s'étendre un peu plus, prendre d'avantage de volume, comme un Savage Climbers sur Blissfucker par exemple. Même constat avec Phantom Air, dernier titre de l'album, qui fait descendre le tempo pour que les riffs puissent s'étirer un peu, mais qui garde également un format baston sur la fin. Trap Them a décidé cette fois de cogner fort et vite, et d'un bout à l'autre.
Crown Feral est le premier léger faux-pas dans une discographique qui tendait à se perfectionner à chaque nouvelle sortie. Mais entendons-nous bien, Crown Feral n'a pas à rougir outre mesure de la comparaison avec ses ainés, loin de là. C'est une bonne grosse dose d'adrénaline qui fait du bien là où elle passe, mais qui manque simplement d'un petit quelque chose pour répondre aux attentes (enfin surtout aux miennes en fait, objectivité, tout ça, on oublie).
Tracklist de Crown Feral :
01.Kindred Dirt
02.Hellionaires
03.Prodigala
04.Luster Pendulums
05.Malengines Here, Where They Should Be
06.Speak Nigh
07.Twitching Int The Auras
08.Revival Spines
09.Stray Of The Tongue
10.Phantom Air