Biffy Clyro @Download Festival France
Ben & James
Avocat le jour, rédacteur sur Horns Up la nuit et photographe à mes heures perdues.
C'est dans le cadre de la première édition du Download Festival à Paris que nous avons pu interviewer Ben (Batterie) et James (Basse) du groupe écossais de rock Biffy Clyro, de retour en France pour promouvoir leur album Ellipsis sorti le 7 juillet dernier. Retour sur cet entretien.
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Horns Up : Merci à vous deux de m’accorder cette interview. Comment vous sentez-vous ?
Ben : Super bien ! Cela fait une éternité que nous n’avons pas joué à Paris !
3 ans, si ma mémoire est bonne ?
Ben : Quelque chose comme ça oui. On a toujours eu une forte connexion avec la France, on est venus y jouer de nombreuses fois et y on a eu parmi nos meilleurs concerts. On avait donc vraiment hâte de revenir, surtout dans le cadre du Download Festival, qui est un festival majeur en Grande-Bretagne, et qui semble également le devenir en France.
Vous avez un nouvel album, Ellipsis, qui sort dans quelques semaines (ndlr : l’interview a été réalisée le 12 juin 2016, l’album est sorti le 7 juillet). J’imagine que vous êtes excités à l’idée que vos fans le découvrent ?
Ben : On est très excités ! Cela fait trois ans que l’on n’a rien sorti et on a passé beaucoup de temps à écrire, travailler et enregistrer ce nouvel opus. Cet album est un peu un changement de direction pour nous. On reste un groupe de rock, évidemment (rires), mais on a tenté de nouvelles choses. On a donc hâte de faire découvrir cet album et de pouvoir jouer de nouveaux titres en live, comme dans le cadre des festivals de cet été où l'on jouera quelque chose comme quatre chansons d’Ellipsis. On meurt d’envie de savoir ce que le public pensera de ces nouveautés !
Simon a précisé dans plusieurs interviews récentes qu’il avait rencontré des difficultés dans sa vie ces derniers mois, et que cela a eu un impact sur son inspiration et sur son écriture. Ce genre de situations personnelles constituent-elles une inspiration pour vous ? Votre musique est-elle un exutoire pour tout ce que vous traversez dans la vie en tant qu’hommes ou, au contraire, vous utilisez la musique pour échapper aux aléas de la vie ?
Ben : Je crois que c’est un peu des deux. Simon écrit toujours avec son cœur, il écrit également sur ce qui lui arrive dans la vie et ce qu’il ressent (ndlr : comme l’album Puzzle, où il parle de la mort de sa mère). Je crois que comme beaucoup d’artistes ou de musiciens, on s’inspire de tous les problèmes et les difficultés que l'on peut rencontrer dans la vie et on se sert de l'effet cathartique que peut avoir le fait d’exprimer nos colères, nos frustrations, nos incompréhensions. La vie est merveilleuse (rires), et tant nos luttes internes que nos joies et nos bonheurs sont une source d’inspiration. Tout le monde a des hauts et des bas, il y a beaucoup de moment où vous êtes plus bas que terre (ndlr : « fucked up » dans le texte), où vous êtes énervés par tout ce qui passe autour de vous et dans le monde d'aujourd’hui, mais vous devez trouver un moyen d’être heureux, y compris avec les gens qui vous sont chers. Je pense qu’écrire sur tous ces moments, bons comme mauvais, peut vous aider mais également aider ceux qui se trouvent dans des situations similaires à se sentir mieux ou à être compris. Cela peut être un réconfort.
Pouvez-vous m’en dire plus sur l’enregistrement de votre nouvel album. D’une manière plus générale d’ailleurs, comment se passe l’écriture dans Biffy Clyro ?
Ben : Le process d’écriture de cet album n'a pas été différent de ce que nous avons toujours fait. Simon écrit la musique chez lui, dans la ville où il a grandi en Ecosse, puis on se retrouve tous ensemble pour faire des ébauches qu'il a écrites des chansons que l’on s’approprie tous les trois. L’enregistrement studio a en revanche été un peu différent cette fois-ci. Lors de l’enregistrement de nos trois premiers albums, nous étions sur un label indépendant : on arrivait en studio, on balançait nos titres sans trop écouter ce que les gens présents avaient comme suggestions sur notre musique (rires). On enregistrait nos albums très rapidement. J’ai souvenir que pour notre second album (ndlr : The Vertigo of Bliss) on avait enregistré l’intégralité des instruments en un jour ! Pour nos quatrième, cinquième et sixième albums, tout était différent avec le producteur Garth Richardson qui a des techniques beaucoup plus traditionnelles. On avait alors enregistré la batterie en premier, puis passé énormément de temps sur les guitares, à peaufiner le tout pour avoir un son propre et efficace. Depuis on a changé de producteur, par volonté d'aller de l'avant, d'expérimenter de nouvelles choses et d'ouvrir un nouveau chapitre dans notre carrière tout en gardant notre esprit et notre patte. Rich Costey aime déconstruire et déstructurer les éléments de la musique. Cela nous a conduit à enregistrer l’album d’une façon novatrice pour nous, comme enregistrer les voix en premier et la batterie en dernier par exemple ! C’était une nouvelle expérience pour laquelle il fallait lui faire absolument confiance. Et je pense que cela a abouti à un son différent de ce que l’on aurait pu avoir si nous avions enregistré le tout d’une manière plus traditionnelle.
James : C’était comme repartir à zéro. Il voulait déconstruire ce que nous avions fait par le passé, nous permettre de recommencer avec un oeil neuf, comme si nous étions à nouveau ce jeune groupe de gamins de 15 et 16 ans. Et je pense que l’on peut entendre le fruit de ce travail dans l’énergie et l’excitation ressenties dans ce nouvel album. Sûrement aidé par le fait que l’on a passé un excellent moment tous ensemble lors des sessions d'enregistrement, ce qui ajoute à l’énergie de l'album.
Que doit-on attendre de vous dans ce nouvel album ?
Ben : Il y a en quelque sorte une division dans cet album. Une première moitié de l’album traite de la nécessité de se défendre et d’avoir confiance en soi, notamment vis-à-vis des autres et plus particulièrement de l’industrie de la musique pour des groupes, lorsque d’autres vous disent quoi faire ou essayent de vous influencer et d’ « entrer » dans votre tête…
Comme dans Wolves Of Winter, votre nouveau single ?
Ben & James, à l’unisson : Oui, exactement.
Ben : Notre volonté était de dire que c’est notre vie, notre groupe, notre approche. C’est notre façon de dire qu’on les emm****, qu’on reste soudés. La référence aux animaux étant un clin d’œil à l’instinct animal de protection, envers nous mais également envers ceux qui nous sont chers et ce qui nous est cher. La seconde partie de l’album est plus traditionnelle avec des chansons d’amour, évoquant notamment la volonté de rendre quelqu’un heureux et tout ce qu’on pourrait être amené à faire pour l’être que l’on aime. Il y a des sentiments différents véhiculés par ces titres, mais on peut dire qu’il y a deux grandes parties dans l’album. Mais il y a également des sentiments comme la colère que nous n’avions pas forcément évoqués par le passé.
Avez-vous eu recours à de nouveaux instruments ou de nouvelles idées, y compris en termes de structures de chansons ?
Ben : On a adopté l’idée d’utiliser le studio et tous les moyens techniques mis à notre disposition, comme un membre supplémentaire du groupe. Utiliser la technologie a toujours été assez effrayant pour nous, comme les boîtes à rythme ou les samples par exemple. Sur scène, on se produit avec deux musiciens supplémentaires ce qui nous permet d’apporter de nouveaux éléments et d’enrichir notre musique par rapport à nos albums. Mais nous n'avions jamais franchi le pas en studio. Je pense donc que c’est ce qui a le plus changé avec ce nouvel album où l’on a essayé d’apporter de nouveaux éléments dès l'enregistrement en studio. Je ne suis pas sûr que ce soit le signe d’un album plus « mature », ce serait fou pour nous de créer un album « mature » car même après six albums on n’a pas envie d’être un groupe « mature » ! On veut créer de la bonne musique comme si nous étions un nouveau groupe et ne pas simplement donner un son plus moderne et une version plus directe de la musique que nous avons déjà faite.
James : Nous avons par exemple utilisés des « drum pads » pour créer des sons synthétiques. C’est plutôt cool de pouvoir mixer ces sons synthétiques avec ceux plus organiques des instruments traditionnels que l’on utilise d’habitude.
C’est l’ouverture d’un nouveau chapitre pour vous, y compris musicalement.
James : Oui, et tous ces changements sont autant de challenges très excitants pour nous. Car outre la composition et l’enregistrement, il faut savoir comment utiliser ces instruments ou techniques en live de la meilleure des manières. En studio, tout se fait dans les règles de l’art, mais en live tout est différent et on essaye simplement de rendre le tout le plus cool possible.
Votre album s’accompagne d’un artwork très original, ainsi que d’une vidéo animée pour le titre Wolves of Winter. Pourquoi avoir choisi ces éléments ?
Ben : Pour la vidéo, on a tout simplement pas eu le temps de filmer un vrai clip (rires) ! Et on se lasse très vite lorsqu’on revoit les vieux clips que l’on a tourné dans le passé. On avait envie de faire quelque chose de nouveau pour cet album et pour le groupe en général. S’agissant de l’artwork, on voulait une photo qui imite une ellipse (ndlr : points de suspension), nos trois corps représentant les trois points d’une ellipse humaine. Nous avions l’impression que cet album serait comme une nouvelle naissance pour nous, faire ces clichés dans une position fœtale nous paraissait donc être la représentation idéale et évidente. C’est une image qui nous montre sous un angle qui nous rend vulnérable, tu ne veux pas que tout le monde te voie les fesses à l’air (rires)… mais c’est un mélange de vulnérabilité et d’audace qui, en réalité, nous renforce.
James : Quand on a commencé la séance photo pour l’artwork, on s’est dits qu’on ne s’était jamais vus dans une position pareille, c’était assez bizarre (rires). Mais le rendu est comme nous le souhaitions.
Et original ! Je n’ai jamais vu un artwork comme celui-ci !
Ben & James, à l’unisson : Non, c’est certain (rires) !
Parlons de vos performances en live. Je vous ai vu jouer au Hogmanay cette année (...)
Ben & James, à l’unisson : Ah, sérieusement ?
Oui, c’était fou !
James : Fou et très froid (rires) !
(...) votre prestation a été très intense et assez incroyable compte tenu des conditions. Vous avez d'ailleurs une excellente réputation et vous avec même gagné des distinctions à cet égard (ndlr : NME Award du meilleur groupe live en 2011 notamment). Quels sont les ingrédients de Biffy Clyro pour performer autant en live ?
James : Il doit certainement y avoir beaucoup de raisons pour qu'un groupe soit apprécié en live, mais je pense que le premier ingrédient est d’avoir de bonnes chansons. Vous ne pouvez pas garder l’attention d’un public très longtemps si vous n’avez pas de bons titres pour aiguiser leur intérêt. Vous pouvez arriver avec un Mac, un logiciel de mixage, des basses énormes et faire danser tout le monde, mais au bout de deux titres les « Wooo » disparaitront, les bras se baisseront et le soufflet retombera. Vous avez besoin de bons titres pour maintenir le public avec vous.
Ben : Peut-être également aussi l’honnêteté de la prestation. Je pense que vous pouvez le voir quand un groupe triche sur scène, en faisant le strict minimum et en quittant la scène, contrairement à un groupe qui donne tout ce qu’il a, toute son énergie, toute son âme sur scène. Je pense que ça vous maintient engagé dans le concert, groupe comme public.
En vous voyant sur scène, on a en effet cette impression que chaque concert est unique.
James : Tous les shows sont différents, qu’on le veuille ou non. Vous ne pouvez pas être « professionnels » au point de toute faire de manière identique, de prononcer les mêmes put*** de mots, de faire les mêmes choses tous les jours, sauf si c’est le but recherché.
Ben : Il y a évidemment des choses que l’on fait à chaque concert, mais le show doit rester spontané et excitant pour tout le monde. Ce n’est que comme cela que l’on peut maintenir une certaine excitation.
Est-ce que le rendu live de vos titres est un élément que vous gardez à l’esprit lorsque vous composez ?
Ben & James, à l’unisson : Non.
Ben : Je crois que ce serait dangereux de raisonner de cette façon. Si vous écrivez une chanson dans un objectif, un but précis, vous allez à l’encontre même de la raison d'être d'une chanson. C’est l’une des raisons pour lesquelles Simon a eu une certaine perte de confiance pendant un temps, car son processus d’écriture était perturbé par le fait qu’il se disait que Biffy Clyro est un gros groupe désormais, et qu’il fallait composer des chansons qui seraient jouées sur les scènes de gros festivals, etc.. C’est un processus forcé qui ne débouche pas sur de bons résultats. La seule solution est de libérer votre esprit et de se laisser aller pour écrire des chansons qui ont un sens pour vous, et qui fonctionneront par elles-mêmes, de par leur honnêteté. On a alors d’autant plus de plaisir à voir l’une de nos chansons avoir un excellent effet sur le public (rires).
Nous sommes un webzine de musique metal, donc je suis dans l’obligation de m’adresser au metalleux qui sommeille (peut-être) en vous.
Ben & James, à l’unisson : (rires)
Avez-vous une appétance pour le metal ou des groupes de metal vous ont-il influencés dans votre musique ?
James : Comme beaucoup, le metal a fait partie de notre éducation musicale. Des groupes comme Pantera ou bien encore Metallica que l’on trouvait tout aussi excitants qu’exotiques dans notre enfance. J’écoute toujours quelques groupes de metal ou de hard rock comme Marmozets, un groupe britannique. Je trouve néanmoins que le metal moderne a tendance à être un peu prévisible, sans prise de risque. Mais j’imagine que de nouveaux groupes finissent toujours par arriver et secouer un peu les choses établies. Le fait est que lorsque vous enchainez les festivals pendant deux décennies, vous finissez par voir toujours les mêmes groupes et l’on n’a pas toujours l’impression que les choses vont de l’avant. Mais le metal fait partie de notre culture !
Ben : On a grandi en écoutant du metal, des groupes comme Pantera, Biohazard ou Anthrax. Même Korn qui nous rendait fous quand nous avions 16 ou 17 ans ! David Silveria, même s’il n’est plus dans le groupe aujourd’hui, a influencé mon jeu de batterie, parmi tant d’autres. Le metal a toujours été un genre que nous suivons. Et pour évoluer en tant que groupe, vous devez vous ouvrir aux autres genres.
On arrive malheureusement au bout du temps qui nous est imparti. Peut-être avez-vous un dernier mot pour vos fans français (en français !)
Ben & James, à l’unisson : Oh ! (rires).
James : « Nous sommes très contents de revenir à Paris ! » (en français dans le texte).
Ben : Je n'ai pas compris le moindre mot qu'il vient de prononcer (rires) !
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Merci au service de presse du Download Festival France, à Ben & James de Biffy Clyro et à Warner.