Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Lorsque deux groupes s'assemblent pour un split, on a toujours tendance à réfléchir à la pertinence de la chose : que vont s'apporter mutuellement les groupes ? leurs musiques respectives sont-elles compatibles ? qui a la plus grosse ? (cette dernière question est bien plus facultative). Dans le cas de Mono et The Ocean, le fossé est relativement large entre les deux groupes : d'un côté un collectif allemand tapant dans le postcore et de l'autre un groupe japonais oeuvrant dans le postrock. Fossé culturel et fossé stylistique sont là, mais pointe néanmoins une certaine logique à ce rapprochement, un commun impalpable mais qui est tout de même là et qui justifie sans problème l'émergence d'une entité hybride.
Entité qui démarre d'ailleurs sous les meilleurs auspices avec le morceau de Mono et une introduction tout en délicatesse par une guitare légère quoique déjà triste. La batterie marque le tempo et la grande envolée se profile quand arrive la seconde guitare. Le son si typique de Mono est reconnaissable d'emblée, cette touche nippone que l'on ressent sans pouvoir dire d'où elle provient réellement, la pureté et la beauté fragile qui se dégagent du morceau sont prenantes. Etalée sur un nombre incalculable de mesures, la progression est permanante, on avance lentement vers une apogée dont l'intensité semble augmenter à chaque instant. L'ensemble vibre d'une attente interminable, un voyage à travers la vie et la mort qui, s'il n'est pas vraiment douloureux, reste difficile à entreprendre, les aigus montent, la caisse claire s'énerve, le sommet approche et la fin aussi, et enfin on aperçoit ce qu'il y a derrière. Ca grince et larsen pendant un temps, les limbes sont plus obscures mais un violon(celle?) vient nous apaiser et nous guider dans ce pays inconnu. Cette deuxième partie est bien plus apaisée, piano rêveur et douceur tendre.
Les premiers instants de The Quiet Observer prolongent l'atmosphère de la fin de Death In Reverse avec là encore un piano et un violoncelle, posés sur une batterie très lointaine. Le voyage se poursuit même si la direction a peut-être changé, on ne sait plus vraiment vers où se trouve la mort et dans quelle direction on retrouvera la vie, mais ces questions sont bien superflues, déjà la batterie devient plus lourde et la construction du morceau évolue. Des cris douloureux pointent et la tension monte, mais cette fois la retenue n'est plus de mise, l'explosion tant attendue chez Mono prend forme dans la moitié de The Ocean. Les guitares lâchent la distortion tandis que le violoncelle maintient une touche de douceur, douceur que l'on sent s'effacer petit à petit. Là encore l'immersion est totale, on suit le groupe dans son cheminement à travers la mort, jamais vraiment perdu, mais jamais vraiment sûr de l'endroit où l'on se trouve. Une accalmie vient rouvrir une dimension que l'on croyait perdue, mais qui était juste sous nos yeux. "Why don't you make yourself useful, and go kill yourself ?", réplique extraite de Enter The Void de Gaspar Noé, dont The Quiet Observer se veut être une transcription musicale, marque la rupture vers les tourments plus profonds, l'âme esseulée est bousculée avant que le violoncelle reprenne le premier plan et termine ce voyage sur une ambiance étrange, ni accueillante, ni inquiétante.
Nourri des expériences différentes de ses deux géniteurs, Transcendental est cohérent et fonctionne parfaitement. Des questions posées chez Mono trouvent leur réponses chez The Ocean et inversement, des échos s'échangent entre ces deux longues pièces qui, au final, forment clairement un tout.
Tracklist :
01.Death In Reverse
02.The Quiet Observer