Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Combo strasbourgeois déjà fort d'un EP plutôt bien accueilli, Haut&Court revient en 2015 avec un premier album sous le bras intitulé Troffea. Une petite recherche de rigueur effectuée et je trouve l'origine du nom, aussi surprenante qu'insolite : Mme Troffea a été la première personne qui, en juillet 1518 à Strasbourg, fût atteinte de la peste dansante, maladie étrange qui poussait les gens à danser sans cesse jusqu'à ce que mort s'en suive.
Sea Of Shit, le morceau d'ouverture, n'offre pas un cadre idéal à la danse mais plutôt à la baston, avec son ton grind bien énervé, première mandale, mélange de saindoux et d'huile de moteur. C'est d'ailleurs la recette qui va être appliquée à la majeure partie de l'album : du grind/crust bien gras qui vomit de la haine à travers un chant éructé et baveux. Le son est fangeux également et peut s'approcher de certaines productions signées Throatruiner, avec une basse bien épaisse qui fait son effet ça et là (Putin, Swing). Au niveau des compos on tape donc dans le grind protéiforme, mais avec toujours une volonté de faire masse, pas mal de plans ultra saturés font dans l'agression sonore pure. Les morceaux s'enchainent sans temps mort, c'est déboitage de nuque sur démembrage de cervicale, le tout dans une ambiance pesante, sale et sans fioriture. Troffea déferle donc vite et sans concession mais garde quand même quelques surprises sous le coude. Le format un morceau, une minute, une mandale est développé jusqu'au titre Chosta, mais avec le dyptique Hiène/Swing, Haut&Court offre quelque chose de nouveau. Le premier titre démarre comme les précédents, rapide et nerveux, mais sa durée (plus de trois minutes) offre plus de place à Haut&Court pour montrer une autre facette de sa musique, plus pesante, plus lente, plus sludge. La guitare laisse planer un sale larsen en fin de morceau, larsen qui fait la transition avec Swing qui part sur une base lente et malsaine. Ici la haine et la crasse suintent de partout, l'hostilité est à son paroxysme, plus encore que sur les passages blast/agression/mange ton dentier. L'atmosphère qui se dégage de ce morceau est purement putride et insalubre, délicieux.
On trouve aussi des petits détails qui peuvent passer inaperçus dans la masse sonore, comme ces petits breaks de guitares proches d'un mathcore (et de leur premier EP, Vie) qui viennent sur quelques temps à peine, mettre un peu de chaos dans la crasse (Caligari, 1518). Certains plans rythmiques sont aussi un peu tordus, sur Chosta par exemple la batterie devient un peu plus épileptique et instable. Bien que brefs, ces petits effets de styles rendent l'album intéressant au-delà de son côté un peu rentre dedans bas du front qui trouve son apogée dans le dernier morceau, JMLP, sorte d'éxutoire d'où l'intellect se serait échappé pour ne laisser place qu'à la rage trépidante et irréfléchie.
Troffea est dense, brutal et furieux. Ce premier album a pour lui une énergie débordante et une violence débridée, double qualité qui permet de faire oublier une trop forte homogénéité. Ce sont d'ailleurs les titres un peu différents que l'on retient le plus (Hiène/Swing) même si le reste des pistes offre des moments de bravoure délectables.
Tracklist de Troffea :
01.Sea Of Shit
02.Putin
03.Caligari
04.Meursalt
05.1518
06.Ostinator
7.Chosta
8.Hiène
9.Swing
10.Feed The Fat
11.Goetz
12.JMLP