Throatruiner Fest
Glazart - Paris
Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse
Afin de fêter en bonne et due forme ses cinq ans d'existence et ses cinquante sorties, le label Throatruiner a monté une mini-tournée de trois dates exclusivement composés de ses protégés et dont la première escale se déroulait au Glazart de Paris le 14 mai dernier. Avec un goût prononcé pour le hardcore qui tâche, Throatruiner a réussi à dessiner une véritable ligne éditoriale et est devenu un des labels français les plus intéréssants ces dernières années. Bref plein d'arguments de poids qui faisait de cette soirée un événement pour les amateurs de sonorités bien crasseuses et violentes.
Calvaiire
C'est Calvaiire qui entame les hostilités dès 16h30 et dans lequel officie au chant le patron du label en personne, Matthias Jungbluth. Dès le début, ça cogne dur donc, Calvaiire proposant un hardcore déstructuré laissant traîner de bons gros larsens pour une approche noise assez rugueuse. La rage est le maître-mot de ce premier set, Matthias tourne en rond sur scène comme un lion en cage en éructant ses paroles, le visage déformé par la colère, pendant que ses comparses balancent la puissance des compos, oscillant entre des moments de violence et des passages plus lents et de ce fait plus torturés. Une rupture de corde de guitare fera malheureusement un peu tache, un long temps mort en milieu de set, mais qu'importe, le premier coup a été porté, la suite arrive.
The Rodeo Idiot Engine
The Rodeo Idiot Engine débarque ensuite avec un hardcore/crust des plus aiguisés et c'est une découverte pour moi ce soir. Là encore les rythmiques saccadées sont de la partie, mais sur des tempos plus rapides que Calvaiire. Au chant, c'est encore le hurlement écorché qui prime pendant que les guitares lâchent des riffs bien tendus, qui apportent parfois un froideur un peu black metal, mais avec cette énergie vicieuse qui fait la force et l'ADN des groupes Throatruiner. Encore un bon matraquage en règle, malgré un public très clairsemé dans le Glazart. Petit point noir déjà présent chez Calvaiire et qui sera assez constant sur la soirée : le chant est un peu bas dans le mix et souvent les chanteurs sont moyennement audibles. Mais fureur est tout de même là, tout va bien.
Comity
Avec Comity c'est une nouvelle découverte pour moi, et très agréablement surprenante. Le groupe propose un mathcore progressif mâtiné de noise (oui, avec Throatruiner tout est difficile à faire entrer dans un case pré-existante). Le chaos fourni est hyper impressionnant, les structures sont incompréhensibles et les morceaux plutôt longs, vraiment une énorme performance en live. Le batteur est tout simplement excellent, toujours à la limite de la rupture, enchaînant breaks bien rapides avec des patterns tout tordus sans l'ombre d'une difficulté. Le côté un peu progressif vient de la longueur des morceaux, mais aussi de l'utilisation d'un lap steel pour fournir des sonorités peu communes et hyper bien senties. Sans doute la découverte de la soirée pour moi et un des sets les plus impressionnants.
Death Engine
Nouveau changement de plateau pour laisser place à Death Engine qui balance un post-hardore noisy avec un son lumineux par moment, mais qui arrive à produire des ambiances pesantes grâce à la densité du propos. Pour la première fois de la soirée, le chant est bien balancé, on peut donc profiter au mieux des compos puissantes du combo lorientais. La salle n'est toujours pas remplie au maximum, mais les heureux présents se prennent des décibels en barres avec encore une fois des larsens bien vicelards qui se glissent dans les morceaux pour en faire sortir l'essence noise.
Cowards
C'est au tour des Parisiens de Cowards de mettre le couvert et c'est évidemment dans la haine que plonge le Glazart. Avec son Rise To Infamy qui a fait à peu près l'unanimité dans la critique, Cowards investit la scène avec son sludge/hardcore baveux et plein de colère pour un set bien dense. Le son de basse est ultra poussé, les guitares sont hostiles au possible, seul le chant est encore une fois le perdant, dommage, vraiment dommage. Reste que la puissance est au rendez-vous, ça suinte la détestation à chaque instant, dans les passages lents comme sur les accélérations sur fond de blast. En parlant de blast, c'est un batteur intérim' qui assure le set, le titulaire ne pouvant pas être là. Et c'est sans problème que le remplaçant gère les compos bien torturées du groupe, c'est carré et sans bavure. Niveau jeu de scène, le bassiste est bien présent avec son regard d'animal prêt à l'agression pendant qu'il chatouille ses cordes. Le set se termine par un duo basse/batterie pesant qui fait retomber la pression.
Plebeian Grandstand
Plebeian Grandstand investit les lieux pour la suite et c'est parti pour une séquence black/crust/crasse/haine/violence/blast/chaos des plus séduisantes. Encore une excellente découverte pour moi, à la fois énergique et pleine de violence. Mention spéciale au batteur qui est peut-être la grosse brutasse de la soirée avec ses blasts omniprésents et les grimaces qui vont avec. Le chant est à nouveau plus correct, même si encore un peu faiblard, je trouve. Mais ça n'empêche pas les Toulousains d'en mettre plein les dents au public qui restera relativement peu compact en cette soirée, alors que pourtant la date avait des arguments de poids.
Et là chers/chères lecteurs/lectrices, je vous prie de m'excuser, mais j'ai été contraint, à mon grand regret, de quitter la soirée avant les performances de Birds In Row et As We Draw, groupes extrêmement intéressants et dont je me faisais une joie de voir en live. Mais les aléas de vie étant ce qu'ils sont, ce sera une autre fois pour moi. Reste que la soirée était excellente, pas d'autre constat possible. Throatruiner a prouvé que la scène hardcore française est bien vivante et que les idées ne manquent pas pour apporter de la nouveauté au genre. Rendez-vous pour les dix ans ?
Un grand merci à Matthias et toute l'orga !