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Il y a presque 1 an jour pour jour, j’écrivais dans ces colonnes la chronique d’A.N.T.I. Responsabilité agréable que de livrer son écrit sur un album très attendu dans les milieux autorisés ; la résurrection de Diapsiquir, alors que nombreux étaient ceux qui le croyait mort et six pieds sous terre, nous avait coupé l’herbe sous le pied.
L’avis a été à l’époque presque assassin, ce qui n’a pas manqué de faire brailler dans les chaumières, que voulez-vous, à groupe extrême, réactions extrêmes. Trop disparate à mon goût, trop éloigné de la gangrène d’un Virus STN, je n’avais ni accroché et encore moins saisi l’essence d’A.N.T.I., déception de l’année 2011 de la part d’un groupe dont j’attendais beaucoup. Les influences hip-hop avaient été mal digérées, les écoutes certes nombreuses, mais abordées sur le même axe, trop comparatives, pas assez vues dans l’ensemble de l’œuvre de Diapsiquir avaient eu raison de mes modestes délicatesses. C’est pourquoi aujourd’hui, un an après, un concert et des dizaines et des dizaines de dissections plus tard, je me résous à réécrire une chronique d’un album auquel je n’avais pas su rendre justice, je me suis trompé, point barre.
Je n’ai ni perçu, ni compris la quintessence, l’âme et le cœur qui ont ensanglantés la composition d’un skeud qui est dans sa substance une ode intelligente à l’auto-destruction, le pamphlet de l’Anti-Vie. Pourtant, tout y était: la musique caractéristique, indescriptible, ce riffing qui se construit dans le chaos, dans la déconstruction, qui naît d'un rien, ces mélodies de chant qui se gravent dans le cortex comme autant d'invitations à sauter le cap. Mais rien n'y faisait.
Il fallait simplement aborder A.N.T.I. dans la continuité du discours tenu par Diapsiquir sur Virus STN, qui scandait les tripes à l’air qu’un Toxik se ferait trouer par du plomb. Et la force d’A.N.T.I. réside d’abord dans son impudeur, le fait que sa tête pensante s’en explique, s’en excuse presque, que cet album sonne davantage comme une thérapie gavée d’hallucinogènes dont les remèdes seraient bien pires que le mal. On parle entre connaisseurs, de ce postulat, l'album prend une autre tournure.
A.N.T.I. n’est plus l’apanage du Diapsiquir d’un L.S.D. ou d’un Virus S.T.N., qui n’esquive certes pas quelques errances musicales vite contrebalancées par une plume plus incisive, plus dangereuse aussi, qu’elle n’a pu l’être auparavant, c’est dire. A.N.T.I. reste un album difficile à aborder et qui ne devrait trouver grâce à vos oreilles qu’une fois l’implication d’écoute délicate passée. Si l’on retrouve le talent incontestable de Damien en tant que compositeur de riffs et de structures alambiqués, pas ténébreux car le terme serait trop romantique, mais plutôt rampants à te faire baigner les dents du fond tellement ça grince, l’alchimie tendance torture-porn qui galvanisait Virus STN est ici effacée au profit d’une excursion tout aussi apocalyptique dans les affres angoissants d’un homme qui a foutu ses dernières ressources dans un skeud démonstratif dans ses textes, malsain dans sa musique, suicidaire dans son ensemble.
Au-delà du suicide commercial que peut représenter la parution d’un album aussi tranché, et m’est avis que Diapsiquir (et heureusement) n’en a strictement rien à battre, c’est encore une fois à une Œuvre d’Art, avec ses belles lettres, à laquelle nous avons droit ici. Au-delà de l’atmosphère qui caractérisait Virus STN, c’est surtout dans les paroles et dans leur mise en musique que se trouve la force d’un Diapsiquir non pas au sommet de sa forme, mais au sommet de son propos.
J’évoquais lors de ma première chronique à quel point cette formation n’avait de retentissement qu’une fois de lourdes épreuves traversées. Et c’est finalement en cela qu’A.N.T.I. est aussi légitime qu’excellent. A.N.T.I. résonne comme une catharsis sans doute exutoire, mille fois misanthrope, nihiliste comme jamais, une sorte de poème toujours aussi sale destiné à quiconque aurait vu ses ambitions bafouées, ses espoirs piétinés, l’album de ceux dont la vie ne tient qu’aux conduites addictives, tendance musée de l’auto-destruction. Des lignes textuelles aux sursauts de boîte à rythme, tout y est.
Je ne reviendrai pas sur cet avis que je maintiens, le monologue très Gaspar Noé lookalike qui conclut (presque) A.N.T.I. me gène toujours autant, comme une tentative peu inspirée de justification, mais j’ai largement révisé mon jugement sur cet album qui demeure une Chose à décortiquer mille fois pour en saisir toutes les angoisses, un Monstre aussi sensible qu’une veine trop gonflée dans laquelle tu t’injectes quand même les derniers grammes de saloperies potables ou à peu près. Il est aussi fort probable qu’A.N.T.I. ne fasse pas écho à celles et ceux qui se foutraient totalement des propos autobiographique d’un mec qui en a trop vu, trop fait.
Mais A.N.T.I., pour les autres, reste un objet à ne jamais mettre entre touts les mains. Si ta vie a été empreinte de merde noire, de volonté d’en finir, d’excès par excès de confiance, de vice, de malaise, gravée d’un sentiment d’espoir inachevé, de Crasse, ne t’y plonges pas trop, au risque d’y trouver ta voie. Morbide ou non.
Un autre album du Mal, mais avec un grand M, en plus dangereux, plus malsain, tellement plus virulent dans l’introspection qu’il provoquera chez quiconque aurait quelques griefs à invoquer à son encontre un désir macabre, calculé, d’en finir une bonne fois pour toute. Bref une pièce maîtresse face à laquelle je suis ravi de m’être planté. L’apologie de la négativité, l’étendard de l’introspection.
'Il était vicieux mon père, très vicieux
Je lui ai pardonné.' - A.M.A.C.C.
De la rédemption en opposition à un "Jésus Christ a pardonné à ses bourreaux mais pour moi c'est exclu" ?
Toujours plus bas, vers et pour qui ?
Pour qui ? Et si la clé d’A.N.T.I. c’était ça ?
"Ça y est, t'as vidé tous les verres
Fais pleurer tout le monde, même tes frères,
Et t’as sniffé toutes les poussières
Tout avalé, tout dévallé
Gifle la peur pour une fois,
Baisse le front, par 10 fois
Et plus personne ne parlera de toi
Mais quel que soit le moyen, casse-toi de là !
Ça sert à Rien, tout se répète, tout ce que tu aimes bien
C'est que dans ta tête.
Fais-le."
Diapsiquir - A.N.T.I. Verset 7.
1. Ωlow
2. Peste
3. Fuel
4. A.N.T.I.
5. Ennui
6. Avant
7. Fais-le
8. Seul
9. Jet
10. Kmkz
11. Абcoлютний
12. A.M.A.C.C.